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Citation de Nastie92


Et puis j'ai vu mon premier mort de guerre, à quelques mètres de là. Un bras qui dépassait d'une couverture, brancard posé sur le trottoir. Le bras d'une femme, avec sa chemise de nuit soudée à la chair. Séanna a posé une main sur mes yeux. Je me suis dégagé.
− Laisse-le regarder, a lâché mon oncle.
D'un geste, j'ai repoussé mon frère. J'ai regardé. Le bras de la femme, sa main aux ongles faits, sa peau qui pendait du coude jusqu'au poignet comme une manche arrachée. Nous sommes passés tout près. La forme de sa tête sous l'étoffe, sa poitrine et puis rien, la couverture affaissée au niveau de la taille. Plus de jambes. Dans la rue, un crieur de journaux vendait le "Belfast Telegraph". Il hurlait des centaines de morts, un millier de blessés. Moi, j'ai vu un bras. Je n'ai pas pleuré. J'ai fait comme tous ceux qui passaient. Mon index et mon majeur sur mon front, ma poitrine, mon épaule gauche, mon épaule droite. Au nom du père et de tous les autres. J'avais décidé de ne plus être un enfant.
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