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Critiques de Stanislas Lem (140)
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Solaris

Une œuvre très particulière, qui est entrée dans les classiques de la sf avec en plus deux adaptations cinématographiques en 1972 et 2002.





Le docteur (psychiatre) Kelvin débarque sur la station atmosphérique Solaris sur la planète du même nom. Il y est accueilli par Snaut et Sartorius, qui se cachent et visiblement, ils sont perturbés. Gibarian qu'il devait rejoindre s'est suicidé. Quand Kelvin rencontre en « chair et en os » sa femme qui s'est suicidée il y a dix ans, il s'interroge, au bord du gouffre. Est-il devenu fou ? Ou l'océan vivant de cette planète, objet de près de 78 ans d'études contradictoires, au point d'en faire une science à part : la solaristique est à l'origine de ses visions matérialisées ?





Une œuvre courte (320 pages) et dense. Une écriture poétique et hypnotique. Ce n'est pas de la sf conventionnelle, mais presque un essai philosophique, métaphysique sur l'inconnu, les possibilités de communication inter-espèces. Quelque chose de plus grand que nous, qui visiblement nous dépasse. Que faire face à l'inconnu ?

Vous cherchez des réponses ? Passez-votre chemin, je n'en ai pas trouvé. Je le savais en début de lecture. L’œuvre est suffisamment connue (encore que je croyais que Solaris était une étoile) pour savoir dans quoi on s'embarque, mais je me suis retrouvé happé par le texte. le background est vieillot mais on le laisse rapidement de côté. L'écriture est solide, beaucoup d'incursions dans le scientifique tant réel qu'imaginaire (et je suis bien en peine de faire le tri entre le vrai et l'inventé) et les descriptions imagées sont intéressantes à lire.

J'ai lu le livre en une journée et n'ai pas voulu le lâcher avant la fin. Pour un résultat nul, mais je le savais par avance. Allez comprendre pourquoi j'ai bien aimé...





Une atmosphère particulière, qui se rapproche pour l'ambiance de 2001 : L'Odyssée de l'espace, plus que de Rendez-vous avec Rama du même auteur (comme l'indique le quatrième de couverture).
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Solaris

J’ai trouvé mon Graal littéraire de la science-fiction !

C’est un livre lent, peu d’action, peu de mouvement, un huis-clos étouffant et éblouissant à la fois, à la fin de chaque chapitre, j’avais besoin de m’arrêter pour en savourer plus longtemps toute son étendue.

Kelvin arrive en mission sur Solaris. Solaris est une planète entièrement recouverte d’un océan sans vie, enfin, pas tout à fait, cet océan est susceptible d’être une entité pensante ou du moins vivante. Autre surprise qui attend Kelvin sur la station d’observation, des êtres semblent se matérialiser dans leur entourage, des êtres surgit de leur passé ou de leurs fantasmes... fantômes, visiteurs ? Les trois hommes de la stations vivent accompagnée d’une présence physique, un être sorti de leur passé, comme une pénitence, une expiation ou alors un cadeau. Pour Kelvin, c’est Harey, une femme qu’il a autrefois aimée et qui s'est suicidée plusieurs années auparavant.

Le thème du roman, c’est bien sur le contact avec l’extraterrestre, mais c’est aussi la conscience, la perception, humaine et non humaine. Dans la démonstration de Stanislas Lem, j’y ai trouvé des analogies avec les mythes de Lazare, Frankenstein, Sisyphe, les problématiques sont variées, étendues et subtilement explorées...

J’ai aimé les passages scientifiques, et parfois épistémologiques, retraçant les interprétations de la compréhension de cette planète. Il crée une science, qu’il appelle la “Solaristique”, une science qui a une histoire, déjà plusieurs générations de savants se sont succédés sur Solaris. C’est l’étrange océan qui semble stabiliser cette planète sur une orbite stable entre deux soleil, dans une situation a priori impossible. Cet océan est un mystère pour la compréhension humaine, un mystère que Stasnislas Lem va s’efforcer d’imaginer et de comprendre de nous faire comprendre. C’est tout une démarche philosophique qu’il explore avec cet argument.

L’aspect scientifique est pointu, subtil et rigoureux, il est question aussi bien de physique astronomique, des particules que de psychologie, l’auteur confronte ses personnages, mais aussi le lecteur, à la vision erronée d’une interprétation anthropocentriste, anthropomorphique, il va même parvenir à se libérer de ces carcans, à imaginer une pensée, une perception, une conscience qui n’est pas humaine.

Cet aspect touffu et introspectif, est servi par une plume belle, élégante et une imagination luxuriante. La description de cet océan est aussi bien chirurgicale, scientifique et visuelle que poétique et lyrique. Il crée tout une panoplie de phénomènes, “Longus”, “Mimoïdes”, “Agilus”, “Vertébridés”, “Symétriades”, “Asymétriades” expliqués avec précision et élégance. Sanislas Lem jongle avec les mots, ce sont de véritables bijoux d’écriture.

Et pour une fois, un auteur de science fiction ne tombe pas dans les écueils du panthéisme mystique en voulant donner une intelligence ou une conscience à une entité astrale, alors que c’est le sujet même du livre. Ce livre est intelligent, et c’est une véritable prouesse littéraire. Tant d’auteurs de science fiction ont essayé de se lancer dans cette voie pour une conclusion mystico-religieuse qui tombe dans le puéril ou le ridicule, voire pire, dans l’illumination religieuse, même parmi les plus grands noms. Ici, tout tient parfaitement en équilibre, sur le fil du rasoir. La fin laisse volontairement quelques points en suspens, mais quelle fin digne et belle.

J’ai vu et adoré l’adaptation d’Andreï Tarkovski à la fin des années 80, sans savoir que c’était adapté d’un roman, ce n’est que récemment que je l’ai découvert, après avoir lu l’étonnant “Cybériade”. Cela faisait un moment qu’il était dans ma pile de livres à lire, et cette lecture me donne envie de lire l’autre roman de SF adapté par ce cinéaste, Stalker de Boris et Arcadi Strougatski.

Bref, cette lecture m’a totalement subjugué, je crois que j’ai trouvé le roman de science-fiction que je rêvais de lire un jour.
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Solaris

Il y a vraiment des époques qui vous persécutent. L'auteur a connu une sauvage guerre mondiale et l’assaut du fascisme le plus hideux qui soit. Il a aussi composé avec l'instauration d'une dictature collectiviste dans son pays et dans les pays voisins.

Pour rester libre de ses choix de vie, il n'a pas terminé ses études de médecine . Il les a reprises des années plus tard. Dans son étroit espace de liberté, il a trouvé le moyen d'écrire un nombre important de roman de SF traduits de l'autre côté du rideau de fer et en russe aussi.

Il a résisté et il a trompé son monde avec un langage qui lui est propre et dont l’ambigüité se dévoile ou se dérobe en fonction de l’approche du lecteur.

Solaris est un monde dont l'océan est vivant et global. Il est tout et il est bien plus que la somme de ses parties.

L'équipe qui étudie ce monde , le fait au prix d'une folie se traduisant par des hallucinations troublantes et réalistes qui s’invitent dans la réalité. Elles créent des mondes issus des souvenirs des victimes effrayées souvent .

L'aspect science-fiction est bien présent dans cette œuvre . L'océan global est tangible et la station spatiale aussi.

Ce roman a généré deux films, un pour chaque côté du rideau de fer.

Deux sujets parallèles et imbriqués s'offrent au lecteur à mon humble avis misérable :

1- Comment peut-on communiquer sur un mode individuel avec un être totalisant , qui est tout et qui contient tout, qui est la totalité d’un environnement et qui est aussi ,l’environnement en soi et un sommet de l'étrangeté. Un être indéfinissable , car il est au-delà de la compréhension et des méthodologies qui essayent de le définir et de le comprendre. Les chercheurs essayent de l'étudier. Ils l’étudient en vain alors donc ,il reste une question absolue.

2- Par ailleurs les hallucinations et la folie que cet être génère chez ceux qui sont physiquement proche de lui vient avant tout du psychisme et de l’univers individuel des personnages qui le côtoient.

Cette folie oblige les personnages et le lecteur , à réfléchir à comment composer avec les démons personnels , avec le passé en général et avec des êtres issus des souvenirs, qui deviennent réellement présent dans une palpable réalité ? En n'étant pourtant que des habitants de la mémoire ,et le reflet de souvenirs plus ou moins construits.



Je suis longtemps passé à côté de Solaris car je suis assez rétifs aux organismes qui sont construit à l'échelle d’un monde.

Solaris plus que jamais montre que les univers de SF sont souvent des métaphores, malgré leur fonctionnalités romanesques et leur réalisme accomplis dans certains cas.

Comment communiquer avec le totalitarisme. A quoi mène une tentative définir le totalitarisme par ses effets ,quand on le vit concrètement et que l’on s’y confronte?

Toute cette folie conduit à être attentif à ce qu’il génère à l'intérieur du cerveau de celui qui y est confronté et à où se blottit l’étincelle de libre arbitre qui sauve l’avenir à default de sauver le présent.

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Mémoires trouvés dans une baignoire

Voici encore un texte donné par l'auteur polonais qui fut effrontément subversif mais qui grâce à sa patience , à sa dissimulation équivoque et à sa ruse toute intérieure, échappa aux foudres du centralisme démocratique pendant toute sa vie personnelle et dans celle d'auteur de fiction aussi .Les partisans du totalitarisme ici polonais (ceux qui peignaient les murs en rouge) s'imaginèrent qu'il était un étendard de l'est publiant ses romans à l'Est comme à l'Ouest. Il est connu pour Solaris mais il y a aussi : Mémoires trouvées dans une baignoire , qui est un texte redoutable et dont le moindre ressortissant britannique à l'humour le plus exigent n'hésiterait pas à faire son quatre heure.

L'Histoire se place dans notre futur et lors de l'exploration des ruines d'un pentagone qui date de l'époque glorieuse de notre guerre froide, on a trouvé ce texte que vous lirez peut-être . Ce roman fut Publié en 1961. Pour info sur le contexte de publication sachez que en 1962 le monde est réellement passé à un cheveux de l'hiver nucléaire. C'était pourtant une époque formidable où le bikini fut inventé avec la mini-jupe et où on ne portait pas encore la nappe intégrale.

Dans cet univers extirpé d'une baignoire ,le monde est uni et la langue de bois imprègne l'univers et toutes réalités . le monde est un interminable rébus emboité dans milles sens cachés, dérobés et équivoques.

Le tour de force du récit est de n'avoir pas seulement enraciné le récit dans un univers approprié mais d'avoir aussi structuré l'univers en une incarnation de la thématique centrale.

Un jeune homme obéissant et motivé (un espion ?) s'engage dans un monstrueux labyrinthe administratif et il y entraine le lecteur qui se perd avec lui , très vite ,dans un dédale de couloirs, de sous-sols et de salles dérobées ou l'on fait des découvertes improbables qui suscitent la méfiance car les espions ,les incompétents, les personnalités pathologiques et autres se cachent partout et ils encombrent l'espace située entre ces murs opaques sertis de portes intrigantes qui parsèment des locaux ubuesques et immenses où l'on se perd au point que la raison vacille et que l'on oublie pourquoi on est là.

Finalement arpenter ce centre du monde a pour but de poser une errance qui suscite une paranoïa pathologique mais qui est peut-être salutaire finalement.

Selon des modalités différentes mais comme dans Solaris, l'auteur pose de nouveau un univers où la vie et la survie reposent sur un train de mesures et de conduites , qui incarnent la nécessaire dissimulation ,salutaire certes mais dangereuse pour l'intégrité mentale des habitants de cet univers métaphorique et du corps social en entier qui apparait comme éclaté et extrêmement retranché dans une nécessaire solitude désolée mais salvatrice.

Cet univers qui consiste largement en un bâtiment immense et une interminable déambulation est une métaphore incarnée du totalitarisme et c'est aussi sur le plan romanesque une sorte d'aquarium où les victimes de cette structure politique rendent palpables le mode de vie exigent et impérativement autocensuré rendu nécessaire par le totalitarisme le plus exigent. Ce qui est le plus monstrueux c'est que tout le monde fait semblant de faire semblant.

Un humour incontestable habite cet assez long récit qui est délicieux mais qui est une véritable expérience qui exige une véritable endurance car c'est un univers qui se pratique autant qu'il se lit.

C'est un monde en poupées russes où on se perd au sens existentiel et littéral . L'expérience s'appuie solidement sur la longueur du texte et il faut le savoir car cela peut lasser.

Nous avons un exquis prologue anticapitaliste qui était destiné à tromper la censure socialiste et qui de ce fait dut plaire à Jean-Paul Sartre ,car elle ne faisait pas désespérer Billancourt.

Cette époque à disparue et le centralisme démocratique à presque sombré dans l'oublis lui aussi alors que Billancourt a été confié aux promoteurs immobiliers. Mais, Mémoires trouvées dans une baignoire reste d'actualité malheureusement car ce n'est pas les totalitarismes qui manquent actuellement et malheureusement.

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Solaris

Un des romans les plus marquants qu'il m'ait été donné de lire, et qui demande sans doute à être lu et relu pour en saisir toute la portée.



L'histoire de Kelvin, rejoignant trois collègues sur la planète Solaris pour y mener des études scientifiques, se scinde volontairement en deux narrations parallèles, ce qui peut déstabiliser le lecteur, les passages de l'une à l'autre se révélant parfois un peu abrupts. Deux narrations, donc. L'une se consacre à l’installation de Kelvin sur la base et à ses découvertes : l'un de ses collègues est mort, les deux autres, épuisés, reçoivent la visite régulière de créatures par lesquelles ils se sentent harcelés. Kelvin lui-même va rencontrer un de ces êtres, sous la forme d'une femme qu'il a autrefois aimée et quittée, et qui s'est suicidée. De cette relation, qu'il va rejeter d'abord de toutes ses forces, va naître un sentiment profond de Kelvin pour cette femme dont il ne sait pas qui elle est, ni même ce qu'elle est.



La seconde piste narrative s'attache elle à l'histoire millénaire de la solaristique, à savoir l'étude de la planète Solaris et, plus spécifiquement, de son océan. On y apprend comment, notamment, les hommes ont tenté de comprendre cet océan et de communiquer avec lui, le considérant soit comme une entité qui aurait atteint à une sérénité "à la yogi", soit comme une créature vivante mais stupide - des approches multiples s'insérant entre ces deux théories. En apparence, et tel que je l'ai résumé ici, l'histoire de la solaristique paraît moins attractive, moins chatoyante, moins propre à la réflexion et à l'émotion. Ne vous fiez pas aux apparences : c'est notamment dans les descriptions de l'océan que vous trouverez les passages les plus poétiques, et sans doute davantage matière à faire disjoncter vos neurones. Car cet océan-là invente les créations physiques les plus étranges, les plus terribles et les plus belles. Je ne puis rendre ici l'effet qu'ont produit sur moi les ballets des symétriades et des mimoïdes... Je ne m'attendais d'ailleurs pas à les visualiser aussi bien, moi qui ai toujours du mal à reconstituer dans ma tête le moindre paysage décrit sur papier. Sans doute la lecture de la série BD Aldébaran m'a-telle servi, puisque la Mantrisse est une créature qui n'est pas, et c'est voulu, sans rapport avec l'océan solarien.



Deux pistes narratives, donc. Mais un seul sujet. Celui de l'homme en tant qu'individu, confronté à son destin solitaire, à la fois tributaire et victime des ses sentiments ; celui de l'homme en tant qu'espèce, enfermé dans sa vision étriquée de la conquête spatiale, incapable d’imaginer un être éminemment différent de lui, et, a fortiori de communiquer avec lui et de le comprendre. Un roman, donc, dont la mélancolie le dispute à la beauté, et dont la beauté le dispute à la portée philosophique et métaphysique.



Fans de 2001 : L'odyssée de l'espace (dont je fais partie) , ce roman est fait pour vous ; et je gage que l'apparition du bébé géant sur Solaris n'a pas été pour rien dans le final sublime du film de Kubrick. Ceux qui détestent 2001 vont détester Solaris, je le crains. À moins que...
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Solaris

Incursion dans la SF, très loin de la planète Terre.

Kelvin est un psychologue propulsé sur la Station qui surplombe la planète-océan Solaris, pour tenter de percer son mystère et d'établir un contact avec elle. Il y retrouve deux autres spationautes, devenus paranoïaques et à moitié fous, et surtout terrifiés par les "visiteurs" qui apparaissent parfois dans leur chambre sous les traits d'êtres familiers. Ce phénomène ne tarde pas à toucher Kelvin, et va le pousser à faire des découvertes sur lui-même.



Quel roman étrange ! Typiquement le genre de science-fiction qui me fascine, nimbée de beauté et de réflexion, où l'on explore avec rigueur et poésie (c'est compatible !) à la fois tout un univers et l'âme humaine.

Avec mon esprit littéraire, je n'ai pas tout compris aux raisonnements scientifiques qui expliquent certaines particularités de Solaris, mais j'ai adoré le soin apporté par Stanislaw Lem à créer et faire vivre cette planète. J'ai été emportée par les descriptions de cet océan de plasma soumis à deux soleils (un rouge et un bleu), et en perpétuel mouvement. J'ai été épatée par le résumé des nombreux ouvrages rédigés par différents chercheurs se contredisant ; quelle imagination il faut, pour inventer un tel univers avec autant de précisions ! J'ai également été subjuguée par les sentiments, les émotions, les rêves qui peuplent cette histoire, et par les pensées qui s'en écoulent : "Nous ne voulons pas conquérir le cosmos, nous voulons seulement étendre la Terre jusqu'aux frontières du cosmos." -et cela date de 1961, Elon Musk n'était même pas né.



Bien qu'ardu et tortueux, exigeant, c'est un roman qui m'a émue par sa beauté et son humilité, et qui m'a envoûtée par sa perspective imaginaire. J'ai hâte de voir le film que Tarkovski en a tiré.

(Et si vous n'avez toujours pas trouvé de destination pour vos vacances, je vous suggère cette petite balade en apesanteur.)
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Le congrès de futurologie

Stanislas Lem n'est pas seulement l'auteur de Solaris, il a aussi écrit des récits satiriques particulièrement réussis : c'est le cas du "Congrès de futurologie", écrit au début des années 70.

Le roman est très court, les péripéties s'enchaînent à un rythme rapide, l'imagination de Lem semble sans limite.

Le narrateur, Ijon Tichy, personnage récurrent de Lem, participe donc à un congrès consacré à l'avenir de la planète, et plus particulièrement aux conséquences désastreuses de l'explosion démographique.

Ce congrès a lieu dans un pays imaginaire d'Amérique latine, le Costaricana, dont le régime autoritaire utilise des moyens originaux pour désamorcer l'opposition : il verse dans l'eau des canalisations des "bénignateurs", des drogues qui vous rendent bienveillant même envers vos ennemis !

Les participants de ce congrès proposent des solutions radicales pour enrayer l'explosion démographique : désérotisation de la société, célibat obligatoire, onanisation (valorisation de l'autosexualité) et, pour les incurables, castration. Certains même vont plus loin : ils proposent un nouveau code pénal dans lequel la procréation serait considérée comme un délit grave, hautement nuisible pour la société.

Evidemment, des contestataires virulents manifestent leur opposition, les combats de rue se multiplient, si bien que les autorités sont obligées de bombarder les manifestants avec des "bembes", des Bombes de Mutuelle Bienveillance (B.M.B.) ; mais comme la concentration des aérosols a été mal évaluée, les masques des policiers sont insuffisants et ceux-ci font de gros câlins aux manifestants !

Le congrès est interrompu, Ijon Tichy avec quelques participants tente de s'enfuir mais, rattrapé, il est intoxiqué par une dose fatale d'hallucinogènes : son cas étant désespéré, il est congelé et se réveille dans la Terre de l'avenir, une société où les êtres humains consomment de multiples drogues en quantité considérable.

La plus grande partie du roman est donc consacrée à la description et à la dénonciation de cette dystopie d'un nouveau genre, une pharmacocratie.

Mais un incroyable coup de théâtre intervient dans le dernier quart du roman, un coup de théâtre digne des meilleurs romans de Philip K. Dick : c'est un avenir terrifiant qui attend l'humanité ...

Un livre important qui fait rire très jaune et qui donne beaucoup à réfléchir.

Note : 4,5 / 5
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Solaris

Planète océanique scrutée depuis 100 ans par les hommes, Solaris est l’objet de toutes les hypothèses. Face à ses manifestations multiples et complexes, sous forme par exemple d’extraordinaires symétries éphémères, les suppositions ont fonctionné à plein régime : l’océan est-il un méga-cerveau ultra-évolué ? n’est-il au contraire qu’une forme de conscience balbutiante ? ou alors régressive ?



Si la planète focalise autant l’attention, c’est probablement parce que bouillonne en souterrain la question mystique ultime qui taraude l’être humain : le fantasme du Grand Contact, celui que l’homme aurait enfin avec l’Autre, absolu, extérieur, un esprit supérieur qui serait à la fois explication ultime et onguent rafraîchissant sur nos affres existentielles.



Kelvin qui a consacré sa thèse à cette planète, débarque enfin, plein d’allant, dans la petite station d’étude où ne subsistent plus que deux scientifiques. Première douche froide : s’ils n’ont pas encore totalement perdu les pédales, ceux-ci en sont à 2 doigts ; on dira pudiquement qu’ils ne brillent ni par leur entrain ni par leur jovialité ; un stage intensif de décompression avec Christophe André serait à prévoir dans les meilleurs délais ; haute-tension palpable, atmosphère électrique, le burn-out n’est pas loin.



Kelvin va-t-il lui aussi perdre la boule sur la planète aux deux soleils ? on l’excuserait : dès son premier réveil, il découvre Harey à ses côtés, sa petite amie qui s’est suicidée 10 ans plus tôt, et qui plus est, bien décidée à ne pas le lâcher d’une Moonboots.



Il se rend compte rapidement que ses 2 autres collègues sont eux aussi accompagnés d’avatars venus de leur lointain passé. Serait-il possible que le méga-cerveau-océanique vienne fouiller dans les cerveaux humains et se serve de leurs anciennes empreintes pour créer des clones 3D ? Ses intentions sont-elles malveillantes ou bienveillantes ? Cherche-t-il à les étudier ou leur faire un cadeau ?



C’est passionnant de voir évoluer les réactions de Kelvin vis-à-vis de cet avatar de la femme qu’il a aimée. La rejetant tout d’abord, presque horrifié, il finit, par un processus finement décrit, par s’attacher à elle plus qu’à son projet scientifique. Traqué par la claustrophobie et le contact autistique avec ses collègues, il se raccroche avec une avidité enfantine à cette seule source d’affection.



Le rapport veille/rêve est également habilement exploré : les rêves de Kelvin ont parfois une acuité qui dépasse largement ses états d’éveil, ce qui est extrêmement perturbant, ça va de soi. Qui n’a jamais eu ce genre de doutes terribles sur l’ambiguïté de ses états de conscience ? D’où découle la question suivante : comment l’homme peut-il prétendre à la compréhension de l’univers s’il ignore tout de son propre inconscient, planète elle-même inaccessible ?



Un doctorat en physique atomique sera un petit plus appréciable pour comprendre certains passages, mais pas d’inquiétude, on s’y retrouve toujours en remplissant les trous par l’imagination.

L’imagination de l’auteur, elle, est totalement débridée, il a craqué les coutures et se donne à fond, hypothèses farfelues, images inédites, hypothèses théologiques galopantes, un bon creusage de tronche qui va faire passer à votre cerveau un sacré quart d’heure, mais qui vaut le voyage.



L’auteur a la finesse de ne rien trancher, rien fermer, il ne nous assène rien sur le coin du museau comme grand final, mais nous laisse avec toutes nos questions existentielles + les siennes, bon ben merci quand même.



Ce livre de 1961 et son hypothèse bottante de cerveau-océan reste en tête fort longtemps après la dernière page.







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Solaris

"Je reviens de loin Si vous n'en croyez rien Demandez à mon ange gardien" -Michel Berger-

Je reviens de loin, de Solaris plus exactement. Une planète aux confins de l'extrême, une planète que je voulais comprendre avec mes yeux et mes modèles d'humains. Mais est-ce réalisable ? Solaris est si différente de la Terre. Comme si la Terre pouvait être l'étalon qui sert à tout analyser... Pensez donc : une planète entourée d'un immense océan autour de laquelle gravitent deux soleils, un rouge et un bleu. Une myriade de feux étincelants entre le lever de l'un et le coucher de l'autre, du pourpre au zinzolin et des éclairs aveuglants. Et sur l'océan se matérialisent des fluctuations de matière que l'homme s'ingénie à dénommer à partir se ses références mais « (...) aucune terminologie ne saurait exprimer ce qui se passe sur Solaris. Les 'arbres-montagnes', les 'longus', les 'fongosités', les 'momoïdes', 'symétriades' et 'asymétriades', les 'vertébridés' et les 'agilus' ont une physionomie linguistique terriblement artificielle : ces termes bâtards donnent cependant une idée de Solaris à quiconque n'aurait jamais vu de la planète que des photographies floues et des films très imparfaits. »



« Quel jeu incompréhensible jouait-on ici, et qui était l'adversaire de qui ? »

Kriss, médecin, atterrit sur la station en orbite proche de Solaris et est reçu par Snaut, le cybernéticien et Sartorius le physicien. Trois hommes pour faire tourner la station, ça fait peu. D'autant que ces deux derniers cachent manifestement quelque chose au nouveau venu. Peu importe, Kriss épuisé par le voyage, part se reposer. A son réveil, il n'est pas seul dans sa cabine. Harey est avec lui. Cette femme qu'il a tant aimée est présente, assise à le regarder. Il se doute à cet instant précis que quelque chose est arrivé sur Solaris. Harey ne peut pas être là, elle est morte sur la Terre, il y a des années ...par sa faute. Et pourtant elle lui parle. Il aura beau se rebeller contre cette.."chose", ce fantôme d'Harey, il découvre que son cœur peut à nouveau battre au fil des échanges qu'ils ont. Mais qui aime-t-il ? Harey l'ancienne ou la nouvelle ?



« - Alors, qui es-tu ?

Elle se tut un long moment. A plusieurs reprises, son menton trembla. Enfin, elle baissa la tête et murmura :

- Harey... mais... je sais que ce n'est pas vrai. Ce n'est pas moi... que tu as aimée autrefois.

- En effet, mais le passé n'existe plus, le passé est mort. Ici, aujourd'hui, c'est toi que j'aime. Tu comprends ? »



Harey serait-elle une émanation de son esprit ? Une hallucination ? Et s'il en était de même pour Snaut et Sartorius ? Sont-ils confrontés à l'apparition de leurs fantômes, leurs peurs, leurs regrets les plus enfouis au fond d'eux-mêmes ?



« L'homme est parti à la découverte d'autres mondes, d'autres civilisations, sans avoir entièrement exploré ses propres abîmes, son labyrinthe de couloirs obscurs et de chambres secrètes, sans avoir percé le mystère des portes qu'il a lui-même condamnées. » ''Connais-toi toi même'' avant d'aller voir Solaris ! L'océan est-il capable de sonder leurs esprits ? Alors que tous les scientifiques au prix de tant d'années d'étude de Solaris, n'ont toujours pas une hypothèse sérieuse concernant la nature de l'Océan...



« Quelqu'un a parlé de symphonie géométrique - nous restons sourds à ce concert. »



J'ai adoré ce roman, autant pour les descriptions de l'environnement que pour les questions qu'il soulève. S'agissant des réponses, Stanislas Lem laisse à chacun le choix. Personnellement, je creuse encore cette petite phrase : « Indifférent, je refusais de savoir que je cheminais vers l'inaccessible et je n'avais plus même la force de me mépriser. »
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Solaris

« Je voudrais soulever la question de la motivation de l'apparition des créations F. J'introduirais la question de la manière suivante : que sont les créations F ? Ce ne sont pas des individus autonomes, ni des copies d'individus déterminés. Ce ne sont que des projections matérialisées du contenu de notre cerveau sur le thème d'un individu donné. »



Ces créations F sont une variante du thème des revenants, mais inscrites dans un cadre de science-fiction puissamment original. Je n'avais jamais lu de romans de Stanislas Lem, cet auteur polonais pourtant réputé et qui a fait partie de « l'âge d'or » du genre. J'ai été impressionné par celui-ci, paru au début des années 1960, mais qui a gardé toutes ses couleurs éclatantes.



Solaris est une planète que les humains étudient depuis de fort longues années sans avoir pourtant réussi à la comprendre. En apparence seul un océan d'une matière visqueuse et animée l'occupe, à l'exception de quelques « îles » stériles. de cet océan surgissent parfois de nombreuses créations éphémères, sortes de Palais du Facteur Cheval, qui se dissolvent plus ou moins vite. Elles peuvent néanmoins être observées de près, et même, pour les plus résistantes, être arpentées par des humains. Mais au fil du temps, malgré l'importante bibliographie issue de ces recherches et observations, les humains ont réduit leur présence.



Au début du roman un scientifique, Kelvin, arrive sur cette station mobile, qui flotte quelques mètres au-dessus de cet océan. Un de ses maîtres, Gibarian, l'occupe, avec deux autres savants, Snaut et Sartorius. Ou plutôt l'occupait car Gibarian s'est donné la mort quelques jours plus tôt…



J'ai lu ce roman sans avoir d'idée, même vague, de ce qu'il contenait. Et je me suis laissé envoûter par cette narration, qui abrite toutes sortes de niveaux de lecture. La simple histoire de revenants est magnifique, avec ses zones d'ombres, mais il y aussi du psychologique, du scientifique et même du religieux… cela m'a donné fortement envie de poursuivre avec d'autres romans de cet auteur.

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Solaris

Depuis sa découverte, il y a plus d’un siècle, Solaris fait les délices et les tourments de la communauté scientifique terrienne. Entièrement couverte d’un océan aux comportements imprévisibles et fantastiques, cette mystérieuse planète hébergerait de la vie. Mais quel type de vie exactement et comment entrer en contact avec elle ? Deux difficiles questions qui n’ont toujours pas trouvé leurs réponses malgré des décennies de recherche acharnée. Passionné depuis toujours par Solaris et ses énigmes, le docteur Kelvin se rend pour la première fois sur la planète où l’attend une désagréable surprise. Dans la station Solaris à moitié désertée, les quelques membres de l’équipe scientifique restants semblent dévorés par l’angoisse et la paranoïa, mais aucun n’accepte de révéler au nouvel arrivant les raisons de cette déliquescence. L’existence de Kelvin va brutalement basculer quand il fait la rencontre en chair et en os d’une jeune femme qu’il a aimée jadis, Harey. La belle, la charmante, la si sensible Harey qui s’est suicidée dix ans auparavant sur Terre après leur rupture… Entre terreur et espoir, Kelvin va tenter de percer le Mystère Solaris afin de sauvegarder sa santé mentale et, par la même occasion, celle des autres habitants de la station.



« Nous ne recherchons que l'homme. Nous n'avons pas besoin d'autres mondes. Nous avons besoin de miroirs. » C’est peut-être dans cette phrase lâchée par un membre de la station à bout de nerfs que réside toute l’essence de « Solaris », étrange roman à la frontière du récit de science-fiction et du conte philosophique. L’errance de l’homme dans l’Espace n’y est pas motivée par la soif de découverte ou la curiosité, mais par le besoin d’y retrouver une image de l’humanité sublimée : l’homme-conquérant, l’homme-explorateur, l’homme-héros. Mais que se passe-t-il quand l’Espace nous tend soudain le miroir tant désiré ? Comment supporter la cruauté, l’impitoyable véracité de ce reflet-là ? Avec finesse et brio, Stanislas Lem explore les tréfonds les plus douloureux de l’âme de ses personnages et nous livre une fascinante leçon sur l’être humain et son rapport à l’Inconnu. Ecrit dans un style un peu froid et comportant quelques longueurs, « Solaris » n’en reste pas moins un récit d’une indéniable profondeur et agréablement atypique : de la bonne science-fiction à l’ancienne, engagée et subtile, qui captivera les amateurs de Bradbury et d’Asimov.

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Solaris

Ecrit en 1961, ce roman de science-fiction m’a pourtant paru très moderne particulièrement pour les questions qu’il soulève.



Trois hommes se retrouvent isolés dans une station spatiale sur une planète singulière où se lèvent alternativement deux soleils, l’un rouge et l’autre bleu, et où règne un océan omniprésent et sans nul doute omnipotent.

Kris, le personnage principal, arrivé le dernier dans la station, découvre en même temps que le lecteur de quoi il retourne (suicide du collègue qui l’avait appelé en renfort) et fait diverses expériences pour comprendre ce qu’il se passe. En proie à bien des doutes, il croit devenir fou lorsqu’il tombe nez à nez avec sa femme morte il y a des années, pense parfois qu’il est en train de rêver, tente d’apporter une explication scientifique… et nous suivons ses pensées alors que l’intrigue se resserre.



J’ai beaucoup aimé le côté mystérieux et quelque peu inquiétant du décor et de l’atmosphère dès lors que Kris entre dans la station. Nous n’avons alors de cesse de comprendre ce qu’il s’est passé et ce qu’il va se passer ensuite. Il n‘y a guère d’action à proprement parler, les réflexions sont plus nombreuses ainsi que de longs passages scientifiques. Les réactions de Kris m’ont parfois surprise voire agacée ; il me semblait quelque peu passif ou bien d’humeur changeante. Mais j’ai aimé le propos développé par l’auteur autour de la conquête spatiale, de la volonté de l’homme de tout vouloir modeler à son image alors que d’autres « natures » peuvent exister dans l’Univers sans que l’homme ne puisse les expliquer... ni ne parvienne à communiquer avec. Cette emprise sur les pensées et les rêves est également troublante.



Cette lecture a été addictive jusqu’au bout, presque hypnotique. Elle me laissera des images marquantes en tête.
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Solaris

Solaris, c’est cette planète si éloignée de la Terre qui a fait tant débats il y a deçà plusieurs décennies, une espèce d’océan aux comportements imprévisibles et mouvants. Une station orbitale y avait été envoyée pour la comprendre, pour l’appréhender, la démystifier, même. Mais le contact ne fut pas simple et incompréhensible. Le temps s’écoula, lentement, les résultats ne vinrent pas et les crédits budgétaires diminuèrent de façon drastique. Aujourd’hui, la station est quasiment à l’abandon lorsque Kelvin, solariste convaincu et grand psychologue de formation, y atterrit après un long voyage depuis la Terre de plusieurs mois…



Mais quels sont les évènements qui ont précipités la chute de la station orbitale. A son bord, il n’y reste plus que deux personnes, et… des visiteurs ! Qui sont-ils ? D’où viennent-ils ? Ces « visiteurs » sont arrivés peu de temps après que les membres de l’équipage envoyèrent une dose massive de rayon X afin de faire réagir l’océan à ces nouveaux stimuli. Est-ce Solaris qui les enverrait pour engager un contact ?



L’homme n’est pas prêt pour certains voyages.



Qui sont ces « visiteurs » ? Simplement des images psychiques enfouis tout au fond de l'esprit des visités, simplement des êtres faits n'ont pas de chair et de sang mais de pensées humaines que l'homme a voulu oublier. Sur le plan humain, ils se régénèrent indéfiniment et semblent plus « vrai » que nature.



L'homme est un conquérant et dans ce but, il n'a pas hésité à bombarder une planète inoffensive sans même en étudier les conséquences à court - moyen - long terme. Il voulait savoir pour dominer. Il a reçu en échange non pas des extra-terrestres mais des visiteurs issus de son propre cerveau... dans les profondeurs les plus enfouies de la mémoire. Et ce qui a été stocké au plus profond de la mémoire, ce qu'on a tenté d'oublier, ce qui a été refoulé est forcément douloureux, profondément douloureux...
Lien : http://leranchsansnom.free.fr/
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La Cybériade

Constructeurs de génie réputés dans le cosmos tout entier, Trurl et Clapaucius parcourent l'univers pour mettre leur talent au service de divers rois. Et les challenges qui leur sont proposés ont de quoi mettre leur intelligence à contribution : l'un, grand chasseur, veut un monstre enfin capable de lui résister, l'autre un conseiller parfait pour le guider dans toutes ses décisions, un dernier se libérer d'un amour impossible. Entre deux missions, les deux savants travaillent sur quelques projets de leur cru : une machine à l'intelligence parfaite, une machine à rimes capable de rivaliser avec les plus grands poètes, etc. Toutefois, les choses tournent rarement comme prévu…



J'ai eu un peu de difficultés à entrer dans ce recueil de nouvelles, car elles sont écrites sous la forme de contes philosophiques, ce qui n'est pas très habituel en science-fiction. Les tournures de phrases sont écrites dans un style « vieux français » (ou vieux polonais en l'occurrence) qui déconcerte au premier abord. Mais une fois ces surprises passées et assimilées, les histoires sont jouissives : énormément d'humour absurde et beaucoup de références et de clins d’œil aux sciences modernes (physique quantique, cosmologie, intelligence artificielle, …).



J'ai découvert ce livre grâce à la bibliothèque de mon quartier, qui l'avait mis en avant sur ses rayons. Je l'ai emprunté sans rien connaître de l'auteur, et je ne regrette pas mon choix : j'ai passé toute ma lecture avec un sourire béat sur le visage (et sans doute un peu idiot, mais tant pis, ça en valait bien la peine!)
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Solaris

J'ai cru lire Solaris. Mais peut-être que Solaris m'a lu. J'ai cru rêver de Solaris. Mais peut-être que Solaris m'a rêvé. Est-ce que Solaris est vivant et conscient ? Est-ce que je le suis vraiment ? Y a-t-il un entre-deux, une place pour vivre au large des mimoïdes et des replis du cerveau humain ? Un lieu statique d'observation où l'on regarderait et l'on serait regardé, comme si on observait de loin son propre liquide cérébrospinal et les lobes qui y baignent, tandis que ceux-ci nous rejoueraient à distance, donc à nos côtés, dans un spectacle idéalisé d'une vie passée à ne pas se comprendre. Une station spatiale qui flotterait dans les limbes, à mi-chemin entre le conscient et l'inconscient, et où reviendrait le refoulé, comme déposé par une vague qui inexorablement va se retirer.
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Solaris

Quel étrange roman que ce célèbre Solaris !

Depuis plusieurs décennies, les scientifiques de la Terre se heurtent au mystère de cette planète lointaine aux deux soleils bleu et rouge, animé par un fascinant océan fait d'une sorte de matière plasmatique, ou protoplasmique, dont on ne sait pas s'il est un être vivant. Une station à été installée sur place pour permettre à quelques scientifiques de percer ses secrets. Le Dr Kelvin est le dernier arrivé, en remplacement du professeur Gibarian, étrangement décédé. Les deux scientifiques, Sartorius le physicien et Snaut le cybernéticien ont l'air dérangés, entre terreur et isolement. Kelvin va découvrir peu à peu que des êtres étranges, d'apparence humaine mais avec on ne sait quoi de modifié, sortes de fantômes issus des souvenirs douloureux de chacun d'eux, sont matérialisés par l'océan et ne les quittent pas d'une semelle. L'océan les régénèrent si on veut les éliminer. Pour Kelvin, ce sera Harey, sa compagne de la Terre qu'il n'a pas su empêcher de se suicider. Entre séjours à la bibliothèque de la station où sont consignées sur des décennies toutes les théories humaines et contradictoires sur la nature de l'océan solarien, observation et conversations avec ses inquiétants collègues et avec Harey, non moins inquiétante dans les interrogations multiples qu'elle suscite (elle a conscience qu'elle n'est pas la vraie Harey, veut-elle à nouveau se faire du mal, en faire à Kelvin, est-il son jouet pour une expérience ?).

Le récit est marqué par l'omniprésence d'une atmosphère pesante, oscillant entre rêve et angoisse, dans un univers aux cieux colorés, où des formes étonnantes sont générées par cet océan tout-puissant au mystère décidément insondable. Les personnages inquiètent, l'atmosphère de huit-clos devient peu à peu irrespirable, alors même qu'il ne se passe presque rien. La patte de Stanislas Lem est en cela remarquable, le lecteur qui pourrait s'ennuyer dans les longs passages descriptifs des théories scientifiques sur l'océan y trouve des briques dont il pense pouvoir trouver l'utilité pour dénouer le mystère, et souffler un peu dans ce climat oppressant. Ce même lecteur suit avec anxiété l'évolution des relations entre Kelvin et Harey...vont-ils pouvoir vivre à nouveau le grand amour ou tout espoir de "normalité" est-il vain dans cet univers factice et truffé de faux-semblants ?



Un roman très exigeant, psychologique, hypnotique, au propos quasi philosophique sur l'altérité, l'incommunicabilité, Dieu, la place de l'Homme dans l'univers, la science et le doute, la culpabilité...où l'auteur témoigne d'une érudition scientifique remarquable, et nous livre de très belles pages de littérature (la dernière page est superbe). Ce roman se mérite, il est parfois difficile d'accès, il nécessite de la concentration pour bien en apprécier les qualités qui en ont fait un jalon légendaire de la grande SF d'anticipation.
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Solaris

Kris Kelvin, un psychologue, arrive par capsule dans la station orbitale qui tourne autour de la planète Solaris. Nous sommes à des années lumières du Système Solaire. Solaris a été découverte environ 100 ans avant la naissance de Kelvin, elle a engendré une littérature abondante de milliers d’ouvrages. Une grande bibliothèque qui sent le vieux bois lui est même dédiée au coeur du vaisseau spatial. Kelvin s’y sentira à l’aise, essayant de deviner le mystère de la planète en se plongeant dans des monographies anciennes, se nourrissant des théories de grands physiciens fascinés par Solaris. 



Kelvin raconte, à la première personne, ses premiers pas dans la station orbitale. On y croit, on s’y voit. 

Il rencontre Snaut. L’homme est îvre et paraît cacher un secret. Il finit par avouer la mort de Gibarian, le scientifique qui a fait venir Kris Kelvin. Il tente de le mettre en garde: 



« Si tu voyais quelqu’un d'autre, tu comprends, quelqu'un qui ne serait ni moi, ni Sartorius, tu comprends, alors... »



Comme un chat qui pense vous faire un cadeau quand il vous apporte une souris dans sa gueule, une des hypothèses formulée sera que l’Océan, cerveau protoplasmatique rangé dans la catégorie Métamorphe, fait des offrandes aux derniers hommes de la station orbitale. Comme s’il avait lu en eux, comme s’il s’était livré à des vivisections psychiques. 





L’histoire de ce classique de la science-fiction est connue puisqu’il a donné deux films. On en sort avec de belles images dans la tête, une mélancolie du bout de l’univers. Lem excelle à rendre le malaise qu’on peut éprouver au contact d’une entité mystérieuse, hors-norme et pourtant totalement pacifique. Le contraste vient de là: les hommes de la station orbitale sont minés par leur psychisme, le retour matérialisé des fantômes de leur vie. Et les fantôme sentent ce malaise, jusqu’à être poussé au suicide, mais les fantômes peuvent-ils mourir ?



Fantastiques descriptions de l’Océan, longuement répertorié et analysé dans la littérature scientifique que compulse Kelvin, et qui a donné naissance à des mots comme mimoïde, longus. L’auteur décrit un organisme en perpétuelle transformation, parfois solide, parfois liquide, non agressif mais rendu dangereux par son imprévisibilité. Feuilleté bitumeux, pellicules, grappes piriformes, grumeaux, cratères, vagues, excroissances, bourgeons, l’océan se dilate, se tuméfie, gargouille, devient phosphorescent, opalescence, abîmes vertigineux...



Ces phases de descriptions et ces mises en abyme dans la littérature du passé forment un contrepoint méditatif au récit tragique de ce qui hante les trois habitants de ce disque d’un rayon de 100 mètres de diamètres. Beau roman de l’attente, du lointain, on en sort puissamment dépaysé. Et on comprend qu’il ait donné envie à des cinéastes. 


Lien : http://killing-ego.blogspot...
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Solaris

Peut étre l'un des livres parmi les plus intriguants ....

Il se dégage ici une atmosphére qu'aucun mot ne peut décrire .

C'est trés cérébral , puissant , profond , cette philosophie à l'oeuvre dans cette oeuvre ne peut que laisser le lecteur dans un ensemble de questions qui dépassent largement le cadre de la SF .

On est ici devant une oeuvre ou il faut oublier tout ce que l'on sait pour réussir à entrer .

Nombreux sont ceux qui doivent étres déstabilisés par cette histoire qui prend son temps , le temps de sa respiration ...

C'est le lecteur qui doit faire l'effort pour aller chercher cette oeuvre si mystérieuse , complexe , d'un niveau largement supérieur aux oeuvres lambdas

C'est un chef d'oeuvre , une oeuvre maitresse , un bijou .
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Une enquête

Une lecture qui ne m’a pas enthousiasmée. Je n'ai pas adhéré à cette intrigue, une enquête policière tortueuse sur des disparitions de cadavres inexplicables dans les environs de Londres, des hypothèses invraisemblables. Impossible d’adhérer à cette histoire rocambolesque, mais j’ai tout de même apprécié l’atmosphère, l’ambiance et l’écriture qui se rapproche d’un fantastique noir du 19ème siècle, avec un décor nocturne qui a quelque chose de victorien, mais en plein XXème siècle, avec téléphones, voitures, ascenseur et contexte bien plus moderne. Une alliance étonnante, décalée et fort sympathique, sauf que cette histoire dure bien trop longtemps, le récit aurait beaucoup gagné à être moitié moins long !
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Solaris

Un grand classique de la SF que je 'avais pas encore lu, ce livre assez court a très bien vieilli parce qu'il est plutôt axé sur la question de la communication avec une vie extraterrestre, l'auteur restant évasif sur la technologie du futur, ce qui aurait vieilli le moins bien !

Le scénario se déroule avec assez peu d'action et beaucoup de réflexions sur cet océan, personnage central du lvre, de relations interpersonnelles aussi entre les occupants de la station.

Le livre est flippant parce qu'il insiste sur notre psychologie, nos peurs inconscientes, nos névroses enfouies, nos fautes inavouées.

Du coup j'ai envie de voir le film de Tarkovski, que j'ai également loupé !

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