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Citations de Stéphane Larue (42)


Des mains marquées par vingt ans de cuisine, par les brûlures quotidiennes, le couteau à coquillage qui glisse et se plante dans la paume, les mauvais coups de lame qui retranchent les bouts de doigt, par les milliers de shifts passés à écosser, éplucher, émincer, touiller, éviscérer, désosser, hacher, par les manipulations répétitives et interminables des aliments crus ou en train de cuire, par l’infinie succession des poêlons, par le récurage des comptoirs en stainless et des ronds de poêle en fonte à l’aide de laines d’acier et de dégraisseurs aussi abrasifs que du solvant.
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J'ai voulu me commander un autre verre, mais je me suis rappelé que je n'avais plus un clou. J'ai regardé autour de moi. Depuis mon brouillard, j'observais un à un les visages fendus de sourires, ces gens beaux sur lesquels une belle étoile brillait sûrement. J'étais redevenu un ti-cul cassé qui lave de la vaisselle.
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- Perds pas le beat, sinon t'es faite. Si ça rushe et que ce n'est pas propre, checke les savons pis le filtre. Rince bien avant d'envoyer le stock dans la machine pis change ton eau souvent. Essaye d'enlever la marde qui tombe dans le dish pit au fur et à mesure, pour ne pas boucher l'évier.
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Non seulement je ne gagnais presque rien, mais pendant ces trois mois-là j’avais perdu davantage que dans les six mois qui avaient précédé. Je n’avais pas encore compris la formule. Plus tu joues, plus tu perds. Je jouais tous les jours.

(Le Quartanier, p.98)
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Bébert avait un visage rond et des joues charnues de bambin, mais on n'aurait pas osé les lui pincer. Son menton se perdait dans sa gorge large. Il lui manquait une dent et il remplissait sa veste de cuisinier de sa carrure trapue mais solide. Une bedaine commençait à lui pousser. Ses manches retroussées laissaient voir sur ses avant-bras épais deux ou trois tatouages inachevés. Il n'avait pas de toque comme les autres cuisiniers, il portait une casquette des Indians de Cleveland sur ses cheveux rasés à trois. Son pantalon était trop large pour lui, comme celui d'un rappeur. Il devait avoir vingt-quatre ou vingt-cinq ans à l'époque, pas plus, mais il me donnait l'impression d'être plus vieux que cela.
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C’est eux qui ont inventé ça, le heavy métal. Sans Black Sabbath, Iron Maiden n’existerait pas.
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Stéphane Larue
Une femme, dans un long manteau crème, m'a coupé en laissant un sillage de parfum vanillé. Elle parlait d'une voix cassante au cellulaire. Les talons de ses bottines claquaient sur le trottoir humide.
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La gratte éclaire de son gyrophare la façade
blanchie des immeubles. Elle avance lentement sur
Hochelaga en tassant la neige devant elle. On arrive
enfin à la dépasser et on tourne dans une petite rue mal
éclairée. Le ciel est encore bas, sombre et cotonneux. La
chaleur confortable de l’habitacle m’endort presque.
On entend la voix du répartiteur au Cb, mais à peine.
Mohammed baisse le son dès qu’on monte dans sa Sonata
noire.
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- Ça va bien aller, mon gars. C’est juste un restaurant.
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J’avais l’impression d’être enveloppé dans un acouphène, coupé du reste du monde, aspiré dans une orbite au fond de la nuit. Je n’aurais pas pu me lever de la table pour aller aider ma mère mourante à dix mètres de moi. Toutes mes facultés ou presque étaient engourdies, comme anesthésiées. J’ai misé en deçà de toute volonté, maintenu en place sur une chaise par le frisson de milliards d’aiguilles le long de mon épine dorsale. Il y avait les mises, ma main, le tapis vert.
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Il était partout en même temps, tight pis toute, une vraie machine. Mais en fin de veillée, des fois, il se transformait en monstre. Je l’ai déjà vu se faire deux grosses barres de même, sur le comptoir à côté des pompes à bières. Il les a sniffées d’une shot pis il s’est mis à dégueuler dans le lavabo de service, devant des clients qui finissaient leurs digestifs. Il s’est rincé la gueule avec du Jack comme si c’était du Listerine pis il est allé porter des factures à une table comme si de rien n’était.
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Mon jeton a été balayé par la croupier. J'avais l'impression d'être enveloppé dans un acouphène, coupé du reste du monde, aspiré dans une orbite au fond de la nuit. Je n'aurais pas pu me lever de la table pour aller aider ma mère mourante à 10 mètres de moi. Toutes me facultés ou presque étaient engourdies, comme anesthésiées. j'ai misé en deçà de toute volonté, maintenu en place sur ma chaise par le frisson de milliards d'aiguilles le long de mon épine dorsale. Il y avait les mises, ma main, le tapis vert. Il y avait le lent fonctionnement silencieux du cosmos, les nébuleuses du hasard et le temps qui s'effondrait sur lui-même sans fin. (pp. 476-477)
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Le bar, style Foufounes électriques en moins punkeux, était vaste, sombre et enfumé, et puait la vieille bière séchée par terre. Ca grouillait de gens début vingtaine. Le décor, le mobilier, tout avait l’air abîmé par des années de party. On marchait dans le sillage que Greg créait dans la masse compacte des clients.
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Le taxi filait vers le nord, passant parfois trois feux verts de suite, la voiture donnant l’impression d’aller sur l’eau, portée par une longue houle au milieu de la ville blanche, endormie sous l’ambre glacé, et je me suis laissé somnoler, en route vers le bout de rien du tout, de rien du tout.
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Je me suis posté devant la machine sans enlever mon manteau ni prendre le temps de m’asseoir sur le tabouret. J’ai glissé un billet de vingt dans la fente. Je fondais sous mes vêtements. J’ai choisi Cloches en folie. Les premières donnes, j’ai joué en misant gros, mais je n’ai fait que des petits gains. Le tic-tac électronique des crédits qui fluctuent m’engourdissait jusqu’au bout des doigts. Ça faisait du bien. Ça bourdonnait dans ma tête. Je lévitais à cinq pouces du sol. En moins de vingt minutes, j’ai brûlé presque cent dollars. Toujours aucun gain, mais perdre ne me faisait rien. C’est jouer qui comptait. C’est de ça que j’avais besoin.
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Le Saint-Laurent était noir et immense en contre-bas et chatoyait de flammes orange frémissantes et de mille lueurs fantastiques. Des décorations de Noël battaient au vent, lugubres, accrochées aux garde-fous du pont de la Concorde. J'étais calme. Je me jetais des regards fuyants dans le rétroviseur, comme pour vérifier que c'était bien moi qui me trouvais sur la banquette arrière. Le taxi roulait, solitaire, ses phares éclairaient la voie d'une lumière blafarde. L'île Notre-Dame se profilait devant. Après avoir quitté le pont, on a roulé sur une route large qui longeait un plan d'eau. À ma gauche, j'ai aperçu les lueurs de la Rive-Sud, qui dansaient dans le brouillard rampant sur le fleuve. Une limousine est passée en sens inverse comme un vaisseau languide et silencieux. Devant, au loin, une forme hérissée, ivoire, illuminait la nuit. Une chaleur apaisante s'est propagée en moi et s'est convertie en cette lente détente qui précède la montée d'adrénaline. Cette sensation ne s'émoussait jamais.
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Au fond de la nuit, on tombe parfois sur des êtres comme Mohammed. Après des années à faire les shifts de soir, à me coucher à quatre heures du matin, j’ai croisé tous les spécimens, des fêtards les plus verts que la coke fait jacasser à tue-tête aux désespérés les plus toxiques qui t’aspirent dans leur spirale vénéneuse. La nuit n’appartient malheureusement pas aux gens comme Mohammed, mais ils la rendent plus hospitalière à ceux qui l’habitent.
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Stéphane Larue
Le manège se poursuivait jusqu’au dernier vingt piasses. J’ai pensé au refrain de «Master of Puppets» : «Come crawling faster. Obey your master. Your life burns faster. » Your life burns faster. J’ai réfléchi à ce que moi je faisais brûler à coups de vingt piasses. Ce n’est pas ma vie que je faisait brûler; ce n’est pas mon corps qui subissait le ravage de mes conneries. Ce qui brûlait, c’est tout ce que je touchais. Argent, chums, amies, projets. Tout finirait par disparaître, je le savais. Mais je continuerais à jouer quand même.
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Sur le stage, une blonde aux seins refaits glissait le long du poteau, la tête en bas, ses cheveux bouclés ondulant comme des algues, les jambes raides comme les branches d'un compas qui tracerait les paraboles d'un calcul absurde.
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Son parfum m'enveloppait, nuée d'anges capiteux qui dégommaient molécule par molécule les émanations soufrées de mes diables grimaçants.
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