C’est une vie qui bascule, le matin tu te réveilles, encore dans un état léthargique, ta matinée se termine sur cette vision, une mort. Une mort aussi affreuse qu’un cœur arraché. Rester insensible à la douleur et pleurer, pleurer, s’effondrer et pleurer. Ce n’est plus une envie, ce n’est plus une réalité. Tu ne le sais pas encore, mais ta vie vient de changer, changer à tout jamais. Tu as toujours voulu jouir de la vie, profiter de ton plaisir, de ta mère. Elle vient d’être supprimée, soudain, sans prévenir, par un homme qui se prétend ton père. Un père de douleur, un père de honte, un père sans père.
''Je pose mon oreille contre la porte, j'entends la mort frapper.''
Quitter ce monde avec des milliers de souvenirs. Boire une dernière gorgée de bière, laisser la boisson dans ta bouche quelques instants pour en savourer toute la fraîcheur avant de baisser la tête, avaler, se repositionner, faire tomber ta bière et te retrouver face à cette fenêtre. Tu ne voulais pas te jeter du quatrième étage, non, tu ne voulais pas tomber face à cette rue, cette rue…
Je voulais… je voulais changer de vie en effleurant cette réalité, je voulais donner une envie, un espoir, et pourtant, je dis aux autres que rien ne m’importe, que cette réalité est loin, loin de toutes possibilités aujourd’hui. Je ne suis rien ni personne, et pourtant mon cœur crie, crie à l’aide, il souffre d’une douleur inexplicable créée par les tumultes de la vie, je sens mon cœur balancer, ce cri, je sens le cri venir, le cri de douleur, le cri du diable, le cri de la cruauté, je m’en souviens, oui, moi, Rose, je me souviens de ce cri, celui que j’ai poussé lorsque que je l’ai vu, lorsque j’ai vu mon père, devant ma cage, mon père avec une arme dans la main, une arme blanche, une machette parfaitement aiguisée. Je me souviens de son regard baveux, de cette soif de vengeance qui allait devenir réalité, je pouvais sentir la mort dans cette pièce, la mort dans son regard. Le regard de cette femme, cette femme qu’il tenait, le bras droit écrasant sa poitrine, cette femme qui avait ce regard, un regard bleu luisant.
Je veux encore croire qu’il est là pour s’excuser, trouver un compromis, me libérer et me dire qu’en échange, je devrai me taire à tout jamais. Mais malheureusement ça ne sera pas le cas. Il est là,derrière cette porte et cet homme est là pour commettre le pire des actes. Je pleure, je tremble sans moyen de me canaliser. Je sens la porte qui s’ouvre doucement, la bouche tremblante, je sens un courant d’air venir à moi. Je lève la tête, une silhouette noire, derrière, une immense lumière blanche. Il avance, cet homme imposant, il a les traits vieillis, la peau qui sent une odeur de moisissure. Je vis sans cesse dans la crainte d’être de nouveau abusée. J’ai la peur dans le ventre lorsque je me couche. Je sens qu’il est fort probable que le matin je finisse devant lui à devoir répondre à ses besoins. J’ai peur de l’avenir. Je crois au destin, celui que la vie m’a donné. Je suis peut-être un test de la nature, une chose divine qui est apparue pour accepter la pire des souffrances.
Je t’ai croisé à plusieurs reprises, c’est l’air heureux mais le cœur déchiré qu’une après-midi tu étais là, à seulement quelques mètres de moi en train de signer des autographes pour ton dernier thriller dans une célèbre librairie d’un centre commercial. Je suis venue vers toi, tu m’as demandé ce que je voulais indiquer dans la première page. Je t’ai alors répondu :
– Pour mon frère.
Je me souviens de ton sourire. Pendant un instant j’ai cru que tu avais remarqué mon grain de beauté mais non.
– Mais Scarlett, c’était il y a trois ans cela, depuis je n’écris plus !
– Oui Ugo trois ans.
– Tu n’as pas essayé de me recontacter depuis ?
– Si j’ai voulu mais le problème c’est que quelques semaines après, j’ai été enlevée et emportée ici…
– Tu vas me dire que ça fait trois ans que tu es là ?
– Bah oui Ugo mais toi aussi.
Critique de « L’ange tomba »
Une nouvelle bien accrochante on est de suite dans le sujet l’evriture Est comme à son habitude très fluide. Le thème m’a de suite plu je regrette même que cela ne soit qu’une nouvelle... merci à vous de m’avoir permis de lire cette nouvelle en avant première 😍
Tu avais seulement ces souvenirs en toi. Les souvenirs, ils refont surface, d’un simple geste, tu penses à une chose, une autre arrive, sans te laisser le temps de réfléchir, tu sombres dans un état psychologique inquiétant, tu perds pied, tu le sens, tes pas n’ont plus de poids, presque aériens.
La peur lui fait perdre ses moyens, elle scrute le danger sans pouvoir le maîtriser, elle rêve seulement que ce danger ne l’approche pas, qu’il reste le plus loin possible de son corps trop fragile pour le supporter. Elle lève la tête pour apercevoir des étoiles cachées par une étrange épaisseur, le plafond. Elle voit le plafond, elle le sent, elle monte sur une chaise, elle peut toucher ce plafond et pourtant, elle voit les étoiles qui scintillent les unes après les autres, parfois toutes en même temps pour lui indiquer un chemin, un chemin qui la mènera directement dans l’endroit qu’elle souhaite. Un pays où les peurs n’existent pas, elles sont invisibles, cachées derrière de maigres murs, des murs eux aussi presque invisibles.
J’oublie mon passé malgré tout ce que je peux laisser croire. Oublier, loin de tout, loin des autres, je pars loin, je parle à cet homme qui se trouve devant moi, je lui parle longuement sans trop savoir si mes mésaventures l’intéressent, mais je continue, je lui donne de l’espoir, il veut cette vérité, oui, cette satanée vérité. Je ne sais pas, aujourd’hui, si je vais trouver quelque chose à dire, je n’en sais absolument rien. Va-t-il se présenter face à moi, va-t-il me demander la vérité une nouvelle fois ? Une vérité que je ne semble pas maîtriser. Non, je connais une autre vérité, une histoire plus étrange encore. Celle de ma mort, oui, ma mort, Rose. Mon expérience de mort imminente.