Au programme de cet épisode, deux livres, écrits par des femmes (oui, oui, il y en a plus que vous ne le pensez) et qui traitent de la figure maternelle dans leur vie. A travers le deuil avec "Les falaises" de Virginie Dechamplain (éditions La Peuplade) et à travers une enfance mouvementée et chaotique avec "Basse naissance" de Kerry Hudson (éditions Philippe Rey)
Générique et sound design : Gampopa
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Rester calme. Comme toujours. Ma plus grande qualité. Mon plus grand défaut. Rester calme. En tout temps, rester calme. Respirer de partout. Pour les autres, pour tout le monde. En photosynthèse, presque. Un sapin du Grand Nord. Des fois j’aimerais qu’il y ait quelqu’un d’autre qui respire pour moi.
je cherche les cerisiers
un goût de grands espaces dans le fond de la bouche
comme un mal de cœur qui passe pas
comment on fait pour s’évader
quand on est déjà à l’autre bout du monde
Se bâtir quelque part où on peut rentrer et descendre ses épaules.
Ça va r’venir, inquiète-toi pas.Vivre c’est comme le vélo. Ça revient toujours.
Mon nom. plus personne ne s'en souvient. Mon nom n'existe plus. Je suis maman maintenant. Maman! maman la guérisseuse, la cuisinière, la couveuse, maman la disciplinaire, la couturière, la maîtresse. Maman qui attend. qui attend que sa vie passe, ,qui la regarde passer. ...
j'attends que vous soyez tous au lit pour sortir dans la nuit, ouvrir grand les bras dans la tempête et hurler mon nom dans le vent. Claire, mon nom est Claire.
Des fois j’aimerais ça me rappeler des choses que je me rappelle pas. Comme ma naissance. La première chose que j’ai vue. La première chose qui m’a fait rire. Qui m’a fait pleurer pour vrai. La première fois que j’ai eu mal. J’aimerais aussi avoir pris une photo mentale de moi pendant des moments importants pour pouvoir me les rappeler quand je vais être vieille. Je prends pas la peine de me souvenir de moi. De quoi j’avais l’air en dedans quand je suis tombée en amour. À quel âge j’ai eu peur de mourir pour la première fois. Et toutes les autres. Les fois où je me suis perdue, les fois où je suis partie, celles où j’aurais voulu rester.
J'attends qu'il fasse noir pour qu'on se voie moins un peu. J'attends qu'il fasse noir et je défais ses bretelles . Détricote son chandail. Détricote ses cheveux attachés sur sa nuque, les laisse glisser sur mes joues. La laisse glisser sur mes joues. Les mains enfiévrées les doigts araignées d'eau. J''échappe ses taches de rousseur sur le plancher.Ses dents accrochées dans les recoins sensibles de mon cou.
Je me lève et j'erre dans la maison aux fenêtres ouvertes, la maison où tous les pas raisonnent. J'aimerais que la vie passe plus vite. Que le monde s'effrite, que le monde finisse par finir de tourner, que la Terre éclate et qu'il reste plus que moi, ensevelie sous la charpente en miettes. Qu'il reste que moi avec plus personne à aimer. Plus personne à laisser partir.
- J’suis brisée, Marie. J’ai envie de courir mais je sais pu comment, de sacrer des coups de poing dans des murs mais je sais pu comment, de crier mais je sais pu comment. Quand je crois que ça va mieux, ça recommence à aller mal. Y’a toujours quelque chose qui se brise plus creux ou qui me pousse à m’enfuir.
(La Peuplade, p.140)
En espérant qu’aucun de vous ne se mettrait à hurler mon nom. Mais non, mon nom n’existe plus. Plus personne ne s’en souvient. Je suis maman maintenant. Maman ! Maman la guérisseuse, la cuisinière, la couveuse, maman la disciplinaire, la couturière, la maîtresse. Maman qui attend. Qui attend que sa vie passe, qui la regarde passer.