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Critiques de Werner Heisenberg (12)
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La partie et le tout

D'emblée, l'écriture simple et naturelle de Werner Heisenberg nous fait partager sa jeunesse (post 1ere guerre mondiale), sa vie (adepte de randonnées en montagne), et très rapidement ses réflexions sur la physique théorique, en pleine mutation depuis Einstein et Planck, aux source de sa vocation et tout au long de sa carrière.

C'est clair, fluide et l'auteur nous met en contact avec l'histoire allemande, dans une réflexion très philosophique sur la science des années 20 aux années 60.

Ses conversations avec les plus grands scientifiques nous font partager les fondamentaux de la physique quantique, au travers de questions compréhensibles avec un minimum de connaissances.

Il partage également tous ses questionnements sur son rôle politique face à l'arrivée brutale du nazisme, notamment parce qu'il a choisi de rester et de tenter de garder le contrôle des conséquences des découvertes autour de l'atome dès 1935.

C'est très intéressant de voir émerger les idées et de constater que la physique est une co-construction dont le résultat est plusieurs prix Nobel et une avancée significative dont on exploite encore aujourd'hui les découvertes.

Les derniers chapitres, sur le positivisme et les questions politiques ne sont pas des plus utiles, ni même très clair, d'autant que l'impression des pages devenait proche de l'illisible en approchant des 40 dernières pages. Bizarre pour une édition de 2001.
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La grande unification

unifié les forces fondamentales!! le rêve ultime de tous les physiciens!!
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La partie et le tout

Au premier abord, ce texte est une autobiographie intellectuelle. C'est ainsi que son auteur la présente. Or que ce soit sur le plan le l'histoire des sciences ou que soit sur le plan de l'histoire de la Seconde Guerre mondiale, le nom d'Heisenberg est attaché dans la mémoire collective à la notion d'incertitude ; d'une part, l'incertitude de principe sur le mouvement des particules ; et d'autre part incertitude historique sur la loyauté du physicien pour faire aboutir la mission que lui confia l'Allemagne nazie pour concevoir une arme atomique.

Dans un roman ("Le Principe", éditions Actes Sud, 2015), Jérôme Ferrari s'était donné pour tâche d'encadrer, la trajectoire d'Heisenberg sur la scène historique.

Plaidoyer pro domo ? Autobiographie intellectuelle ? Livre de dialogues philosophiques ? Tout cela à la fois? En tous cas la Partie et le tout n'est pas un livre de vulgarisation mais sans être un livre difficile, il vaut mieux pour en tirer quelque profit avoir au minimum déjà lu un peu de vulgarisation sur les particules élémentaires (du reste comment peut-on s’intéresser à Heisenberg sans jamais avoir entendu parler des quanta?). La physique est la principale héroïne de ce livre, on ne pourra donc guère en tirer profit sans un minimum de connaissances.

Bien sûr, Heisenberg y raconte sa vie. Mais il ne retient de celle-ci que ce qui touche à la science qui l'a rendu célèbre. Et tout ce qui est circonstanciel et contingent n'est raconté que parce que la mémoire de l'auteur lie ces circonstances et contingences à la maturation de ses idées scientifiques qui leurs sont intimement liées.

Heisenberg s'est très tôt passionné pour les mathématiques. Il raconte avoir lu le Timée en grec avec difficulté ; les idées de Platon lui paraissaient confuses mais sans constituer pour autant son initiation à la physique, Heisenberg semble avoir d'emblée pu distinguer entre un discours sur la nature qui assignait aux mathématiques un statut d'objet idéal dont le monde est l'incarnation imparfaite (Platon) et un autre discours où les mathématiques constituent un outils imparfait pour avancer dans la compréhension d'un monde qui nous dépasse (la physique moderne). Pour Heisenberg qui ne méprisait pas les mathématiques appliquées, les mathématiques avaient quelque chose à nous dire du réel. Lorsqu'il hésitait encore entre une carrière de mathématicien et une carrière de physicien, sur les conseils de son père, il se présenta devant un prestigieux mathématicien allemand qui dénigra devant lui la théorie d'Einstein (Heisenberg avait lu les travaux d'Hermann Weyl qui donnèrent une première forme mathématique à la Relativité), le jeune homme n'hésita plus ; il sera physicien.



C'est principalement au travers de dialogues et de discussions avec ses collègues que Heisenberg raconte son évolution intellectuelle. Ses interlocuteurs s'appellent Arnold Sommerfeld, Wolfgang Pauli, Niels Bohr, Albert Einstein pour ne retenir que les plus connus.

Heisenberg reconnaît le caractère un peu artificiel de ces reconstitutions écrites après plusieurs dizaines d'années pour beaucoup d'entre-elles. Il demande à son lecteur de lui faire confiance, au moins sur la chronologie dans laquelle les idées quantiques s'élaborent.

Cette importance du dialogue fait tout le charme du récit. Avait-il conscience de renouer avec la tradition du dialogue platonicien ? Car le projet de Heisenberg semble autant de nature historique que philosophique. Pour Heisenberg les principaux enjeux de la nouvelle physique sont philosophiques ; elle porte une nouvelle vision de la nature et de la connaissance qui est susceptible de renouveler en profondeur la civilisation (c'est ce que j'avais cru comprendre par ma lecture du Manuscrit de 1942).

Pour ajouter au charme les dialogues philosophiques ont presque toujours pour cadre les nombreuses randonnées pédestres des étudiants, et plus tard des physiciens, dans les montagnes de Bavière, les promenades à Göttingen ou dans la nature Danoise avec Bohr ou aux États-Unis.

Dans une marche commune, l'histoire de la physique du 20ème siècle semble tenir dans sa main celle de l'Histoire et les paysages traversés n'ont pas toujours ce charme bucolique. Ainsi au chapitre 15, Heisenberg raconte comment dans la nuit du 1er mars 1943, il a dû rentrer chez lui à pied en compagnie du prix Nobel de Chimie Adolf Butenandt. En traversant les rues désertes d'un Berlin en flamme que les bombardements alliés venaient de dévaster, ils discutent de l'avenir de la science et de la recherche scientifique allemande, de sa nécessaire reconstruction après le désastre nazi. Un moment une chaussure de Heisenberg se met à brûler car il a marché dans une flaque de phosphore. Dans la même veine, toute une longue discussion sur les relations entre biologie, chimie est physique s'est déroulée sur le voilier de Bohr pendant toute une nuit de navigation entre Copenhague et Svendborg.

Une promenade est certainement une situation des plus commodes pour un auteur de fiction qui souhaite écrire une discussion avec de longs développements entre deux personnages ; pour un romancier, elle économise l'imagination narrative et lui permet de se concentrer sur les échanges d'arguments. Pour le mémorialiste, cette situation lui permet d'économiser la mémoire des circonstances en réduisant celles-ci à de simples déambulations tout en lui permettant d'aller à l'essentiel du contenu discuté.

Quoi qu'il en soit, la marche semble avoir constitué une source d'énergie essentielle à la vie intellectuelle de Heisenberg et de bien d'autres de ses collègues. Et ce n'est pas sans ajouter un charme singulier à ce très beau texte qui est certainement une des plus belles lectures philosophiques qui m'aient été données.

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Physique et philosophie

Un ouvrage d'une grande beauté physique et philosophique dans lequel le grand physicien Werner Heisenberg nous montre l'étroite relation qui existe entres ces deux domaines.
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La partie et le tout

En ces temps incertains, alors que le coronavirus sème le chaos et laisse planer le doute sur l'avenir de la planète, alors que les médias font appel à l'avis de mille experts, ou spécialistes, voici ce qu’Heisenberg écrit, page 286 du livre La partie et le tout, à leur sujet : « … Beaucoup de gens répondraient qu’un spécialiste est un homme qui sait beaucoup dans un domaine donné. Mais, pour ma part, je ne peux pas accepter une telle définition, car en fait on ne peut jamais savoir beaucoup dans un domaine. J’emploierais donc plutôt la formule suivante : Un spécialiste est un homme qui connaît bien quelques-unes des erreurs les plus grossières que l’on risque de faire dans le domaine en question, et qui sait donc les éviter. »

Cette formule ne convient à aucun des experts que je vois cités dans les médias. Leur expertise me fait penser à celle du jardinier qui, sans doute, connaît bien son jardin, qui le connaît mieux que quiconque.

Va pour son jardin, mais ... la planète?
Lien : https://www.babelio.com/livr..
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La partie et le tout

C’est le livre d'une renaissance, de l'âge d'or, puis du doute et de l'apologie.



Il commence en 1918 par la destruction du carcan protecteur de la famille et de l'école : Werner adolescent devient garçon de ferme. C’est le chaos social avec la guerre civile qui suit la défaite. Dans le monde des idées, c’est la destruction de l'ordre platonicien, et plus précisément l’abandon de la théorie atomique du Timée, un livre qui ouvre et ferme La partie et le tout. Mais l’impeccable machine de l’université allemande ressuscite bientôt et le jeune homme fait à 19 ans la connaissance de Sommerfeld. Il se trouve aussitôt adopté, et transporté d’enthousiasme par les mutations de la physique théorique : ce lent processus […] au cours duquel, peu à peu, le contenu de la discipline en arrive tout d'un coup, et parfois de façon tout à fait inattendue, à produire plus de possibilités et des valeurs nouvelles. Les individualités les plus douées sont attirées de façon quasiment magique par ce processus créateur, par les forces de croissance qui s’y manifestent ; et c'est ainsi que, au cours de quelques décennies, dans un espace géographique limité, sont créées les plus importantes œuvres d’art ou sont mises en œuvre les découvertes scientifiques les plus fondamentales (p 51).

Avant d’avoir 25 ans, Heisenberg établit une profonde intimité intellectuelle avec Niels Bohr, Paul Dirac, Wolfgang Pauli (prix Nobel 1922, 1933, 1945) et fait la connaissance de son grand ainé Albert Einstein (prix 1921). Il discute pied à pied avec lui du principe de causalité, qu’Einstein répugne à abandonner, principe défunt pour Heisenberg qui soutient et construit son principe d’indétermination. A 26 ans, il est invité au congrès Solvay de 1927, dédié à la mécanique quantique, où 17 des 29 invités sont lauréats d’un prix Nobel. Il fait de longs séjours dans les grandes écoles de physique d'Allemagne, de Suède et du Danemark. Les cinq années qui suivirent le congrès Solvay de Bruxelles sont apparues plus tard, aux hommes jeunes qui ont participé au développement de la physique atomique, comme marquées d’une splendeur telle que nous avons souvent parlé de ces années comme de « l’âge d’or de la physique atomique » (p 165). Son orgueil est celui du monde des physiciens, pas celui d’un individu : tout cela est raconté avec une simplicité familière, et Heisenberg ne fait aucune mention de son propre prix (1932).



Mais la rouille apparaît vite. Dès 1922, Heisenberg est surpris par un tract qui met garde les auditeurs d’Einstein contre la théorie de la relativité dont l'intérêt a été grossièrement surestimé grâce à la publicité faite autour d'elle par les journaux juifs, étranger à la pensée allemande (p 86). Mais il n’y voit que l'immixtion dans la science d'une tendance politique. Il ne parle pas de persécution raciale, et nulle part de la Shoah (un anachronisme en 1922, mais le livre est écrit en 1969). Une deuxième crise morale pourrait survenir en 1933 dans une discussion avec « un jeune étudiant national-socialiste qui assistait à mes cours ». Ce dernier comprend que « Hitler vous soit antipathique, parce qu’il vous paraît trop primitif. Mais puisqu’il s’adresse aux gens simples, il doit aussi utiliser leur langage » (p 251). Ce tentateur rappelle à Heisenberg qu’il a créé une rupture épistémologique, et qu’il doit admettre en parallèle une rupture politique. Notre auteur ne le suit pas, mais il cherche la conciliation en jouant au jeune homme le dernier mouvement du concert pour piano de Schumann. C’est l’heure de choisir de rester, ou d’émigrer comme beaucoup d’autres physiciens. Heisenberg demande conseil à Planck qui lui raconte « tout de suite une conversation que j’ai eue avec Hitler il y a quelques jours » (p 259), plaide l’énorme tort qu’il causerait à l’Université, et le dissuade de démissionner. Alors Heisenberg esquive le débat : j’enviais presque ceux de mes amis qui avaient été brutalement renvoyés de leur poste, et par conséquent savaient qu’ils devaient quitter le pays (p 263).



La suite est prévisible et connue. En août 1939, Heisenberg est mobilisé à l’Office des armements à Berlin : Là, j’appris que j’aurais à travailler, en collaboration avec un certain nombre d’autres physiciens, à l’étude des applications techniques de l’énergie atomique (p 294). Il participe à un Club de l’uranium, parfaitement conscient de la course à la bombe, se rassurant par la pensée que l’Allemagne n’aurait pas le temps de rassembler assez d’uranium enrichi avant la fin la guerre. Puis c’est la défaite, l’internement à Farm-Hill, les discussions sur la responsabilité du chercheur, la bombe d’Hiroshima, des épisodes parfaitement reconstitués par Ferrari dans Le principe (2015).



Le livre n’a rien de technique : il s’ouvre et se ferme sur la nostalgie de Platon ; Heisenberg ne parle guère du principe d’indétermination. Après le paradoxe qu’Einstein lui assène p 141 « seule la théorie décide de ce que l'on peut observer », l’auteur est tout entier traversé par un doute sur l’ordre du monde après la destruction des religions, des principes de causalité et de simultanéité, et après le renoncement à l’observation objective ou à la prédiction formelle. L’éthique en est absente.

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La nature dans la physique contemporaine

Un dialogue entre la science et la philosophie, c'est ce que nous offre le grand physicien Werner Heisenberg dans ce magnifique livre.
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Le Manuscrit de 1942

Un livre assez philosophique de la part de l'un des père de la physique quantique Werner Heisenberg qui s'attaque aux problèmes de la réalité dans ce sympathique ouvrage.
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La partie et le tout

un livre dans lequel l'un des plus grands physiciens du XXème siècle nous livre ses souvenirs et ses conversations avec les plus éminents scientifiques de son temps tel que Bohr, Pauli, Planck et Einstein sur la physique atomique et la philosophie des sciences
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Le Manuscrit de 1942

Dans ce texte jamais publié de son vivant et que le public français a pu découvrir au début des années 1980, Werner Heisenberg essaie de faire le point sur la notion de réalité comme objet d'étude de la science. Si l'activité scientifique consiste à produire un savoir sur la réalité, la question est ici de revenir sur cette notion dont la physique du vingtième siècle semble avoir perturbé l'évidence première de « donné », d'objet d'investigation intellectuelle, de chose à comprendre, de chose de la nature, d'indéfini à définir. La science comme quête de la nature des choses de la nature.

En même temps que les théories de la Relativité rénovèrent de fond en comble la scène du théâtre de opérations de la nature (en chamboulant l'espace et le temps), la physique quantique changeait en profondeur la façon d'écrire la comédie des particules en impliquant le spectateur dans la mise en scène. Werner Heisenberg est un des acteurs majeurs de cette histoire et il semble que c'est pour bien « entrer dans son rôle » comme le ferait un comédien méditant sur son personnage, qu'il écrivit ce carnet de 1942.

Le père de la loi d'incertitude qui porte son nom envisage ici la généralité, hors du strict domaine de la physique quantique, du « principe de complémentarité » défendu par Niels Bohr.



Pour ce faire, il conçoit d'abord l'existence de « régions de la réalité » ; il ne faut pas entendre ici le mot au sens géographique ou topographique. Ces régions sont constituées essentiellement par un réel agencé d'une certaine manière par l'esprit humain (manière de prendre la réalité par certains bouts) ; ainsi il est possible de percevoir et penser ce qui nous entoure d'une multitudes de manières. Parmi elles, certaines font sciences quand d'autres fondent des religions, des cultures etc. Parmi celles qui firent science il y eut cette physique classique qui défini des propriété de la réalité telles que l'espace, le temps, la masse etc. Cette physique ne s'intéresse aux objets en tant qu'ils sont repérables dans l'espace et le temps et possèdent une masse. Cette physique construit ces objets sur la base de ces concepts et elle a conduit à la découverte de nombreuses propriétés de l'univers et à une connaissance de la matière d'une puissance inégalée avant elle. Mais la chimie s'intéresse aussi à la matière ; mais elle ne s'intéresse pas aux mêmes « qualités » du monde phénoménal ; chaleur, acidité, basicité, couleur etc. ; le système de la chimie s'est longtemps passé de physique pour se construire. Ce n'est qu'avec la physique quantique que les propriétés particulières étudiées par la chimie ont pu être mise en cohérence avec cette nouvelle région de la réalité qui s'ouvrait avec les quanta. Ainsi, la mécanique classique, la chimie et la physique classique constituent autant de régions de la réalité organisées avec leur « agencements » propres du monde phénoménal.

C'est avec ce concept de régions (qu'il a construit avec l'aide de Goethe) que Werner Heisenberg veut mettre en ordre la réalité telle que la science l'a présente. Ces agencements propres à chacune de ces régions (l'espace, le temps, la masse, etc.) amènent les scientifiques à mettre en évidence des « régularité nomologiques » c'est-à-dire ce qu'on appellerait classiquement des « lois de la nature ».

Les régions ainsi définies sont étanches entre elles et la question de leur compatibilité ne se pose pas. C'est d'ailleurs ce principe là qui a rendu difficile en physique des quanta le passage de la pilule amère « dualité onde/corpuscule ». En fait, tout le travail d'Heisenberg consiste ici à donner une généralité à ce principe de complémentarité. Rappelons que ce principe est censé résoudre ce qui reste un paradoxe inadmissible pour ceux qui n'accepte pas l'interprétation de Bohr (dite de Copenhague) ; Heisenberg semble plaider la cause de l'interprétation de Copenhague.

Mais si ces différentes « régularités nomologiques » existent indépendamment les unes des autres il n'en existe pas moins des relations entre elles. Ces relations Heisenberg tente de les cerner dans une longue seconde partie dans laquelle il parcoure une hiérarchie d'objets de science en partant de la physique classique jusqu'à la conscience en passant par le chimie et la biochimie. Son approche de ces relations constituent autant de programmes scientifiques dont certains, encore balbutiants au temps où il écrivait, ont largement tenu leurs promesses depuis (je pense à la biologie moléculaire).

Le plan de la seconde partie de l'ouvrage conduit ce travail de réinterprétation des différentes régions de la réalité en partant des régions de la physique, de la chimie, de la biologie, de l'esprit humain, de la fonction symbolique et enfin de la faculté créatrice de l'esprit humain.



La ressemblance de la pensée de Heisenberg avec la théorie des paradigmes de Thomas Samuel Kuhn est frappante. Lorsque Heisenberg parle de réagencement de la réalité on ne peut s'empêcher d'y voir le concept de « changement de paradigme ». Sauf que les idées de régions de la réalité et d'agencement semblent avoir une portée bien plus générale pour Heisenberg que le concept de paradigme confiné dans l'espace social de la recherche scientifique. Nulle part dans ce texte si Heisenberg ne fait mention de la psychologie de la forme (Gestaltpsychologie) qui inspirera Kuhn pour construire son concept de paradigme. En cherchant des infos dans Wikipédia je m'aperçois que Heisenberg utilise (p. 137) un exemple musical qui ressemble beaucoup à celui donné par Ehrenfels (initiateur de l'approche Gestalt) pour nous éclaire sur ce qu'il entend par « forme » (Gestalt): en musique, nous gardons en mémoire une mélodie (c'est à dire une structure globale) et non une succession de notes.



Heisenberg écrit ce texte alors que probablement il a déjà été chargé par le pouvoir nazi de lui construire une bombe atomique. C'est dans ces conséquences éthiques que ce texte prend toute sa dimension qui ne peut se réduire à une sorte de vaine métaphysique. L'effort philosophique du physicien Heisenberg n'est en rien une spéculation abstraite déconnectée des enjeux politiques concrets dans lesquels il est lui même empêtré ; il n'est pas simplement une généralisation du principe de complémentarité qui aboutirait à une soupe de la même acabit que la soupe relativiste dans laquelle on a bien voulu tremper la théorie de la Relativité. Le principe de complémentarité élargi n'est en rien une sorte de super relativisme qui tolérerait tous les points de vue. Il donne un sens profond à l'histoire et oblige l'individu à un grande modestie face aux puissances collectives. Les citations que j'en donne devraient suffire à le comprendre.

Ce texte pourrait aussi passer pour une sorte de justification du choix de Heisenberg de travailler pour un régime que de toute évidence il abhorre.

Je suis tenté de conclure par une pirouette dont je ne sais pas si son mauvais goût fait honneur au sujet ; ce texte laisse le lecteur dans une incertitude abyssale qui devrait lui interdire, par principe, de juger un homme.
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Le Cas Kepler, précédé de

L'auteur, l'un des pères de la physique quantique, nous montre le rapport entre la physique moderne et l'ancienne alchimie. Ouvrage fascinant qui traite du rapport entre l'esprit et la matière.
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La partie et le tout

L'histoire de la physique atomique nous est contée dans un langage accessible et élégant.

Un livre d'une grande humanité, plus historique que scientifique et c'est justement là tout son intérêt : ce livre fait le lien entre sciences, histoire et philosophie.

Les questions de sens, de conscience, de responsabilité sont posées avec une clarté tout en gardant une grande densité à la réflexion, captivant.
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