Oeuvre complexe et ambitieuse, La Pierre Amour offre une présentation singulière, riche. Je ne connaissais pas le poète Xavier Bordes, musicologue, traducteur de poètes grecs, collaborateur à des revues poétiques. Il a aussi un blog et semble toujours très actif à 77 ans!
Le recueil s'ouvre sur un poème intitulé" achillées", mystérieux et prenant. Il y aura 26 poèmes de ce titre, tout au long du livre. D'autres textes, de la même façon, reviendront comme des refrains, des poèmes en prose, des sonnets, la description poétique d'une ville. Et les caractères typographiques varient. Tout cela donne un ensemble ample, polymorphe.
La femme, surtout rêvée, est au centre de tout. Elle prend différents noms: Aïlenn, Isis, Marie-Ange...Et la symbolique de la Pierre Amour est révélée dans le très émouvant premier poème en prose.
Mon impression sur cette oeuvre est mitigée. J'ai été emportée par de nombreux vers et quelques poèmes, hypnotiques, étranges mais marquants. Ils m'ont fait souvent penser à l'univers énigmatique , onirique et frémissant de Robert Desnos.
Cependant, l'érudition de l'auteur, les mots rares utilisés , les références grecques ont un peu fait obstacle à ma compréhension des textes. De même pour cette construction compliquée, que la préface ne m'a pas aidée à bien saisir. Cela crée un monde attirant, certes, mais comme à distance, peu accessible. On perd alors en émotion.
Ce n'est évidemment qu'une impression personnelle. Curieusement, ce sont surtout des vers isolés, rarement un poème complet, qui m'ont plu.
Néanmoins, voilà une découverte intéressante , subtile. Quelques vers, pour vous donner envie:
" Et la mer commence à mousser tel un rire de verre
Telle une immense césure où s'ouvre tout l'horizon"
" Je l'aimais comme à travers
une vitre embuée
qu'éclaire seulement le sillage des larmes"
" Elle avance son corps clair
frissonne comme un arbre au vent vert"....
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J'ai trouvé ce recueil ( publié en 1997) dans une boutique de livres d'occasion. le titre est bien sûr une citation d'Aragon, puisqu'il s'agit, Marie Etienne nous l'explique dans la préface, d'écrire autour de lui: " Jouons avec vos mots, faisons les nôtres ". Je pense que cette démarche aurait plu au poète, qui dédiait souvent ses textes à d'autres auteurs. Et c'est aussi un clin d'oeil à ce centenaire écoulé depuis sa naissance, en 1897.
Cinquante-six poètes ont donc participé à cet écho collectif aux mots d'Aragon, qui apparaissent en italiques, mais ne sont pas toujours utilisés, chacun faisant ricocher à sa façon son ressenti aragonien.
Le mien est mitigé : certains textes, notamment ceux de Xavier Bordes , de Martine Broda, de Nedim Gürsel ( un auteur turc que je ne connaissais pas, une biographie est heureusement donnée à la fin), m'ont beaucoup plu. Par contre, pour d'autres, soit je les ai trouvés hermétiques, soit ils m'ont paru bien éloignés du sujet, ou sans intérêt.
C'était prévisible car confier à tant d'auteurs ce " jeu" donne forcément un résultat hétéroclite. On trouve un extrait de pièce de théâtre, de la prose qui ressemble à un journal intime, mais évidemment surtout des poèmes. C'est original, déroutant car manquant d'unité. A tenter, peut-être...
Je conclurai avec ces mots d'Andrée Chedid:
" Des incendies de l'Histoire
de l'absence enténébrée
Emerge la voix d'Aragon
Sacre de l'avenir et de la parole
Evoquant Paris son Paris
Notre ville
Sa poésie"
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