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Les rues de Santiago

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WAOUHH !!!



Cela faisait longtemps que je ne m’étais régalé à ce point. Il y a tout pour moi. Une verve, une histoire, des personnages, un style, du rythme, un pays comme si on y était, un vrai monde personnel d’imagination.



Et c’est noir, de plus en plus, le monde obscurcissant de l’Incal... Le troisième volume, c’est carrément un quasar. Un tsunami qui vous bouscule sans menagement.



Grand dommage que Quercia passe à la SF.







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L'Échappée

Sombre et puissant, d’une force inégalée, « L’échappée » est un rêve blessé.

Entre la fiction et ce qu’elle engendre d’exutoire, le vertige d’un roman sur le désenchantement.

L’existentialisme, le point d’appui, un livre de bord dont l’exemplarité terriblement humaine, happe et sidère.

Tant d’émotions, dans ce livre, serrent le cœur.

Contemporain, spectral, âpre, les échappées à l’instar de rais de lumière qui percent les pages subrepticement. Ici, le vif des êtres en perdition. Une histoire en corps à corps, feu, de bois, de craintes et d’anéantissement sociétal.

L’essentialisme comme l’issue de secours. « L’échappée » est cruellement semblable aux vacillements du monde.

Une guerre civile, insidieuse, prend ses marques. Le chaos, la vulnérabilité du jour présent.

François est ici. Juste sorti de prison (et pour cause). Il part à pied pour la Suisse. C’est un homme d’un âge certain, happé par les affres. Son passé est un bagage trop lourd. Il avance dans une cadence de renaissance. Il ne le sait pas encore. Le décorum est précis et radical. Il ne se soit aucun faux pas. Les dangers sont dans chaque angle. Il voit ce qu’il est devenu. Déstabilisé et fragile. La quête, pas à pas, vers la Suisse où il sera dans les temporalités de paix et financières.

Lui, qui vivait dans cet avant avec Faustine, sa femme, décédée brutalement et ses deux enfants. Un pavillon, un travail, le roulement d’une quiétude musicale, l’échappée vers le bonheur.

Ses enfants devenus vastes et éloignés, ombres et silence. Ils ne savent pas pour les années de prison. Ils ignorent ce que François est devenu. Un homme prisonnier de ses malheurs et de sa honte, de ses regrets et remords.

Universitaire à la retraite, un homme intelligent, mais sans énergie ni distance. Il marche et se terre, bête aux abois.

« Je lisais des romans, je revoyais des films où des personnages jeunes et beaux se désiraient…. J’avais eu le ventre plat, les cheveux épais et bruns, le sentiment d’éternité… Quelqu’un avait écrit que dans chaque vieux, il y a un jeune qui se demande ce qui s’est passé. »

Il voit le paysage défilé dans sa conscience. Il se heurte au passé, franchit la ligne d’une nostalgie où il ne peut plus spéculer.

Revenir parmi les vivants. Il est seul et pourtant il rayonne dans la grandeur sentimentale.

Fortuitement, il rencontre « L’échappée », Constance, une violoncelliste qui elle aussi, est en partance vers la Suisse. Elle veut retrouver les siens, ses parents et son frère. Renouer avec la généalogie. Reprendre vie dans la matrice familiale. Mais le jour est sournois. La traque et les milices, les ordres et les craintes, le basculement dans le chaos. Ici, tout est fragile et risqué. L’idée de dépassement, franchir l’autre rive, l’immanence sacrée.

« Ça venait d’elle, de cette fille, Constance Dreyer, de ce qu’elle était devenue désormais, pour moi. Mon enfance, ma jeunesse, mon âge de déraison. Tout ce que j’avais aimée dans la vie se coagulait dans le chant presque humain du violoncelle. Elle était la dernière jeune femme, et d’elle s’échappait tout ce à quoi je n’aurais plus jamais accès. »

Le périple est l’expérience vitale de la confiance. Ils vont être retenus, prisonniers d’une bande de garçons à peine adultes. Dans cette fécondité de se croire des caïds. Alors qu’ils sont eux aussi, à l’instar d’animaux traqués. Comment ce réel incertain et lugubre va-t-faire saillir la fraternité et l’apprentissage de la survie ?

Constance et François sont lianes et de connivence. La fusion des détresses et la mélancolie comme une couverture de survie sur leurs corps fragilisés par les diktats d’une guerre civile et de leurs tourments intérieurs.

« C’est l’heure François… Nous avons trouvé la route qui avait été ensevelie par les éboulements… J’imagine qu’affublés comme nous l’étions, nous devions ressembler à un cortège de lépreux ou de pauvres hères. »

Que va-t-il se passer dans cette échappée où le temps fige l’âge ?

Ce roman est un hymne à la rédemption. D’une beauté certifiée, tremblant de pluie, il est le sacre de l’autre. Celui ou celle dont on ne sait rien avant l’heure du jour. Le prodigue presque charnel d’une renaissance en advenir. Le sentiment indicible d’une lecture poignante et spéculative.

« L’échappée » de Jean-François Dupont, dont les crépitements sont un requiem.

Publié par les majeures Éditions Asphalte.



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