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Citations sur Les doigts bleus de la pluie (6)

C'est alors qu'Aline et ses enfants arrivèrent de Tunis. Elle dans ses vétements sombres qu'Eudoxie, sa belle-sœur avait teints elle-même - il y avait toujours de la teinture noire dans la demeure tribale pour les cas de deuil inattendu : une précaution grecque. Les trois petits comprenant encore mal qu'ils étaient orphelins de père, de grand-père et d'oncles, Aline leur avait caché les cadavres, ce qu'ils en connurent depuis ne leur vint que par ouï-dire.
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Cependant, l'huissier-audiencier poursuivait, imperturbable, irréprochable, sa besogne d’auxiliaire de justice. De plus en plus figure de proue. Lorsque, au terme d'une journée, il avait pris place au milieu des siens, un silence sépulcral emplissait l'antique demeure, à peine troublé par les feuilles du périodique qu'il tournait, enfoncé dans son fauteuil.Thérèse se retirait dans sa chambre,. Abel rédigeait sa composition française sur un coin de table, encouragé d'une caresse par sa mère chaque fois qu'elle passait près de lui. S'il arrivait au maître de desserrer les dents, c'était pour faire des remarques désobligeantes sur la nourriture qui lui était servie, ou pour parler argent... Parfois ses prunelles froides s'accrochait aux gestes, au visage d'Aline, elle se sentait transpercée, devenue carpe, maître Grampon sur la berge la tenait au bout de sa ligne, attendait avec patience qu'elle commît l'erreur décisive. Elle en venait alors a exécrer cet homme.
Seigneur, suppliait-elle, faites qu'il meurt d'un infarctus, qu'une voiture l'écrabouille, qu'une de ses victimes le révolvérise.
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Aline habitait la maison bleue, près de la fontaine remplie de carpes et entourée de bouses éternelles. Les vaches venues s'y abreuver les renouvelaient. De temps en temps, monsieur Myons, l'instituteur, la seule personne du village, avec les domestiques, entièrement dépourvue de troupeau, en enlevait l'excès dans sa brouette pour fumer son jardin. Aline chaque jour apportait des miettes aux poissons qui devenaient énormes. C'étaient les carpes communales, nul n'avait l'idée de les voler, pas plus que la cloche de la chapelle. Une fois l'an, les plus grosses étaient vendues aux enchères au profit de la caisse des écoles. Les carpes se convertissaient en livres de bibliothèque, en crayons d'ardoise et en cahiers pour les enfants indigents.Aline restait de longues heures au balcon, un livre sur les genoux, les yeux moins tournés vers les pages que vers l'horizon occidental comme si elle attendait que parût on ne sait quelle caravelle sur ces vagues figées. Des chiens aboyaient dans la plaine, au-dessous de Beauregard, la vrille patiente des vers grinçait dans le bois de la rampe. Madame Florenceau l'épiait en souriant et chuchotait au commandant :
- Surtout, ne la dérange pas ! Elle rêve de son amoureux
!On l'avait préparée pour qu'elle fût le meilleur parti du monde : bonne cuisinière et pâtissière - brillante en matière de confitures -, bonne couturière et brodeuse, bonne pianiste, déjà presque licenciée ès lettres à la faculté de Clermont, elle hériterait, sinon une fortune, du moins le manoir en lave de Volvic, le parc, les vignes, les économies que ne manquerait pas de lui laisser en s'en allant monsieur Florenceau, ex-commandant d'artillerie. Elle n'aurait donc que l'embarras du choix.
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- Abel! criait Théodore de son bureau. Approche-moi mes cigarettes qui sont sur la cheminée du salon!
Maître Grampon aimait à se faire servir par toute sa famille, il devait compter dans son ascendance quelque pacha turc égaré jadis en Limagne. Abel notamment faisait office de groom, de tire-bottes, de commissionnaire. A défaut, il se rabattait sur la fidèle Aline.
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Très belle histoire....Un peu de magie dans un monde parfois difficile à vivre...Dommage que cela finisse "mal"....Une fin heureuse pour une choix aurait fait du bien...
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