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Critique de CDemassieux


A l'heure où l'érotisme, sous cellophane torride, envahit les cerveaux disponibles – pour reprendre les propos frappés du bon sens d'un ex patron de chaîne télévisée ! –, étalant comme une crème solaire bon marché ses nuances d'ennui, causons donc initiation à la soumission charnelle et sévices en tout genre.
Histoire d'O, de Pauline Réage – un pseudonyme : songez que le livre est paru dans les années 1950 ! –, raconte l'éducation sexuelle d'une jeune femme qui abdique à peu près tout sauf sa nature. Quand je dis « éducation », rien à voir avec l'enseignement dispensé aux jeunes filles d'alors !
Dans ce château de Roissy, l'éducation d'O la conduira à une obéissance aveugle, et librement consentie, à un homme. Si l'on est loin du bréviaire de la perversité que constitue Les 120 journées de Sodome de Sade, le livre de Réage, d'une écriture très classique, est une descente dans les profondeurs de l'assujettissement au désir, à commencer par celui de l'autre. Car le désir a lui aussi ses raisons que la raison ignore. le plaisir ? O le connaîtra d'autant mieux qu'elle aura pleinement admis son statut d'esclave sexuelle. Aveu encore aujourd'hui inacceptable, faisant de Réage une traîtresse à la cause féministe.
O sera alors marqué, au propre comme au figuré. Mais surtout : elle appartiendra enfin à quelqu'un, comme une caution de son existence. O existe parce qu'elle est la possession de quelqu'un. Et c'est un choix délibéré, ce qui est encore plus déroutant.
Selon Jean Paulhan, dont l'auteur – Dominique Aury, de son vrai nom – fut la maîtresse, Histoire d'O révèlerait une vérité au grand jour : les femmes sont ontologiquement dédiées au sexe.
Ce qui différencie Histoire d'O des romans érotiques mièvres ou gratuitement salaces ? En fait, c'est ce qui différencie un bon roman d'un mauvais : son indéniable qualité littéraire. Et lorsque le sujet tient autant en équilibre, étant donné sa nature, il faut une certaine maîtrise pour ne pas sombrer dans la vulgarité facile. Pauline Réage a aussi réussi ce tour de force de ne pas fabriquer un produit de scandale : c'est le scandale qui est venu à elle, une marque des grandes oeuvres.
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