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Critique de Gabrielle_Dubois


« Il y a un duel constant entre le ciel et les intérêts terrestres. »
Certaines personnes sont si intimement persuadées qu'il existe un paradis après la vie, qu'elles acceptent avec résignation, humilité, grandeur d'âme, bonté et charité, tous les malheurs de la vie terrestre, toutes les vicissitudes humaines.
Certaines personnes sont si profondément persuadées qu'il n'existe pas un enfer après la vie, qu'elles s'emparent ici-bas, avec acharnement, prétention, petitesse d'âme, immoralité et avarice, de tous les biens matériels terrestres, de tout l'amour qu'il leur est donné et qu'elles ne rendent jamais.
Eugénie Grandet m'est apparue dans un premier temps comme une jeune fille insipide, soumise, bête. Mais plus Balzac nous dévoilait sa grandeur d'âme, plus elle embellissait au-dedans et au-dehors.
Le père Grandet est un avare : « le Dieu Argent est le seul en lequel il ait foi. » Je connais quelques personnes qui ont les poches cousues, j'ai lu avec plaisir L'avare de Molière, mais on ne peut pas dire qu'on ait connu un véritable avare tant qu'on n'a pas connu le père Grandet de Balzac ! L'avarice n'est pas seulement matérielle, elle est aussi morale et intellectuel, elle est avilissante, débilitante.
Avec le père Grandet de Balzac, l'avarice, poussée à son comble, ne peut engendrer que la misère et la méchanceté, ou la richesse, intérieure et extérieure et la bonté… Et comme la rose odorante pousse sur le fumier, Eugénie Grandet, élevé dans la maison de la misère voulue, répandra autour d'elle les bienfaits de sa bonté.

Derrière ce petit chef d'oeuvre, on sent tout le travail de titan De Balzac qui a cherché toute sa vie à devenir riche sans jamais y parvenir. Pourtant, dans Eugénie Grandet, Balzac nous explique par le menu comment Grandet et son neveu sont devenus riches : pour faire fortune, il faut employer des moyens qui, s'ils sont licites, ne sont pas toujours moraux. C'est peut-être pour cela que Balzac n'est jamais devenu millionnaire : il était trop bon !

Balzac avait aussi, en privé, de bons mots, on retrouve son humour sans pareil de-ci de-là : « Il était bien injuste de trouver que la pauvre fille avait une figure repoussante : elle eût été très admirée sur les épaules d'un grenadier de la garde. »

Balzac avait sur solide corps de paysan, un cou musclé de taureau, mais une grande délicatesse d'esprit, en témoigne cette phrase :
« Charles tira de sa poche un mouchoir brodé par la grande dame qui voyageait en Ecosse, un joli ouvrage fait avec amour pendant les heures perdues pour l'amour. »
Sérieusement, ne trouvez-vous pas qu'un tel mouchoir vaut qu'on lui consacre quatre lignes finement ciselées ? Voilà pourquoi j'aime le 19ème siècle : les mouchoirs n'étaient ni en papier ni jetables !

Pour le plaisir, un extrait d'une rare beauté :
« Quand les enfants commencent à voir, ils sourient ; quand une jeune fille entrevoit le sentiment dans la nature, elle sourit comme elle souriait enfant. Si la lumière est le premier amour de la vie, l'amour n'est-il pas la lumière du coeur ? »
Et encore une belle pensée merveilleusement écrite :
« La femme a cela de commun avec l'ange que les êtres souffrants lui appartiennent. »

Donc, je vous recommande grandement Eugénie Grandet si :
Vous n'avez pas de scrupule et voulez faire fortune à n'importe quel prix,
Vous voulez un bel exemple d'abnégation de soi et de bonté terrestre,
Vous voulez, seule devant votre livre, savourer toute la richesse intellectuelle et littéraire De Balzac, qui vaut bien plus que tout l'or du monde !
Lien : https://www.gabrielle-dubois..
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