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Critique de kielosa



La narratrice a éprouvé le besoin d'écrire cet ouvrage trois quarts de siècle après les événements, car personne d'autre l'aurait fait, "parce que si ce sont les vainqueurs qui écrivent l'Histoire, que ne saura-t-on jamais de la vie des autres, de ceux qui ont cru en une cause qui s'est avérée être mauvaise et funeste, une cause qui les a perdus."

Ce paragraphe à la page 53 du livre en résume parfaitement sa teneur. Il s'agit en effet d'une dame, Mathilde, née en 1944, qui s'efforce de reconstituer "le mauvais pas" de son père, Louis, face à la menace nazie en 1940. Fidèle au maréchal Pétain (1856-1951), le héros de Verdun, et comme fermier craignant qu'une victoire bolchevique lui ferait perdre sa ferme et les moyens de subsistance de sa famille, il a fait le mauvais choix, qui l'a fait aboutir dans la Milice française, supplétive de la Gestapo allemande.

Le récit est en fait double : d'une part celui de Mathilde, qui se documente dans les archives officielles pour essayer de comprendre cette page de déshonneur sur laquelle la famille a toujours gardé le secret et d'autre part l'aventure collaboratrice de Louis.

Le roman est construit en 3 grandes parties chronologiques et 39 brefs chapitres dans lesquels les 2 récits s'alternent. L'ensemble compte 268 pages.

J'ai trouvé la partie de l'erreur du père du point de vue historique et narratif la plus instructive et captivante. Elle nous emmène de sa ferme 'La Jardinière' à Allauch proche de Marseille à Vichy et au camp de Natzweiler-Struthof en Alsace.

On y apprend également comment sous les auspices de Joseph Darnand, fusillé en 1945, Louis s'est trouvé embrigadé dans le Service d'ordre légionnaire (SOL), une formation paramilitaire, et finalement dans la Milice française, créée le 30 janvier 1943.

Noëlle Barbiera nous relate avec grande délicatesse et empathie les effets dramatiques du choix déplorable de Louis pour son épouse Nella et leurs enfants Jules, Cécilia, Paul et Marie, ainsi que la future Mathilde.

À ce propos, son livre m'a fait penser à celui de Pierre Rigoulot "Les enfants de l'épuration".

La valeur du livre réside à mon avis essentiellement dans l'approche sobre du phénomène de la collaboration, sans grandes prises de positions et loin d'effets sensationnels.
Comme psychiatre professionnelle, l'auteure fait preuve d'une analyse humaine pénétrante et équilibrée. En fin de volume elle remercie l'ethnopsychiatre et auteur Tobie Nathan pour son soutien.

Noëlle Barbiera manie une langue fort littéraire avec de nombreux renvois à Anne Sylvestre, Louis Aragon, Rainer Maria Rilke, Fernando Pessoa etc.
À la page 245, elle cite la merveilleuse phrase de Paul Verlaine, qui résume à sa façon l'histoire : "Je me souviens des jours anciens et je pleure."
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