AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Ellane92


Comme tous les ans, Djenifer Goranitzé traverse le continent ravagé et affronte mille dangers pour parvenir à une décharge qui est également le cimetière fortuit des opposants tombés au champs du déshonneur. Au milieu des détritus, faisant fuir les rats qui disputent le territoire aux mouettes, Djenifer frappe du pied le sol jusqu'à en faire résonner les entrailles et rappelle, du royaume des morts, Nathan Golshem. Quand il commence à apparaître, elle lui parle avec le langage des morts, et continue à danser, les pieds en sang, pour donner plus de substance à son amant. Alors, après les premiers cauchemars, ils évoquent ensemble leur cause, leur vie d'avant, les compagnons tombés au combat, et ils s'aiment.

Que voilà un drôle de livre, dans lequel le sublime côtoie le plus souvent le sordide ! Tombée sous le charme du premier chapitre, qui décrit le rituel de rappel de Nathan Golshem, avec un petit côté symbolique que "La femme squelette", conte inuit, n'aurait pas renié, je suis vite retombée sur les ruines sur lesquelles Lutz Bassman, alias Antoine Volodine, construit son roman.
J'ai apprécié le rythme du texte, le phrasé précis, non exempt de répétitions assumées, qui donne au récit un petit côté mélopée pas désagréable et plutôt poétique. J'ai été surprise, agréablement, par les petites listes désopilantes, avec leur petit côté absurde, inattendu, dont semble friand l'auteur.
En revanche, j'ai trouvé le récit trop contrasté ; peut-être que le "sublime", le beau, le bon, le courage ou l'héroïsme paraissent plus grandioses quand ils sont opposés au sordide, au sale, au moche, à l'absurdité, à la méchanceté et à la mort. Moi, cette opposition constante, ce rappel systématique du plus "pire", m'a gênée. Les régnants, race supérieure humaine (?), se prêtent à tous les exactions possibles et surtout inimaginables pour remettre dans le droit chemin des opposants, les autres, tous les autres qui ne correspondent pas à cette caste régnante. Et ces opposants, en retour, s'opposent. A tout, à rien, tout le temps et à jamais. Ils s'opposent, c'est leur raison de vivre, leur mode de fonctionnement. Ils s'opposent à tout, et perdent lamentablement tous leurs combats. Ils sont méprisés, ignorés, humiliés, parqués, torturés, tués, sans relâche. Qu'importe la façon, ce qui importe, c'est l'opposition, le refus, sous toutes ses formes et sur tous les objets. du coup, les rappels que font Djennifer et Nathan des hauts-faits de leurs anciens compagnons d'infortune, construits sur le même modèle et amenant inéluctablement à la mort dudit compagnon, ont fini par me lasser.
Danse avec Nathan Golshem est ma première incursion, en demi-teinte, dans le post-exotisme de Volodine. D'un point de vu littéraire, c'est un livre à part, avec une écriture qui vaut le détour. En revanche, rationnellement, et en bonne humaniste, je n'adhère pas à l'instrumentalisation intellectuelle du monde tel qu'il apparait dans ce livre.
Commenter  J’apprécie          260



Ont apprécié cette critique (24)voir plus




{* *}