« One good thing about music, when it hits you, you feel no pain. »
Bob Marley
Antoine, jeune diplômé universitaire obtient un poste de coordinateur de projet managé par une association humanitaire.
Il est fraichement débarqué dans un village d'un « pays d'Afrique » dont il ignore tout.
Gagnant la confiance des villageois, rapidement une dynamique s'initie autour du maraichage et permet une première récolte abondante, laissant penser qu'un développement vertueux et une prospérité nouvelle sont possibles.
Célestin, un jeune instruit du village, a la soif d'apprendre et passionné par la culture occidentale, se lie à Antoine et un partage mutuel s'ancre progressivement.
Antoine n'est pas insensible à la mystérieuse et généreuse Djeneba dont son petit frère Alioun se saisie pour se rapprocher du jeune français. Ils sont issus d'une famille de griots. Lui a une voix proche du miracle lorsqu'il se met à chanter.
Le village rêve de richesse et nait la crainte des jalousies des villages environnants.
Il y a une bascule lorsqu' Antoine se rend compte qu'il participe à une expérience de culture OGM sans recherche préalable sur la dangerosité pour l'homme.
Les mois défilent pour Antoine s'adaptant à cette vie de brousse avec simplicité, il est parfaitement intégré et son idylle secrète avec Djeneba comble son bonheur.
Mais rien n'est simple dans ces régions du monde et le chao vient aisément remplacer cette douceur si fragile. La dynamique du village se heurte à une logique de décentralisation dirigé par un pouvoir autocratique. Un satrape du pouvoir est parachuté dans le village.
Le ver est dans le fruit. La violence revêt ses habits de haines.
Célestin disparait, Antoine s'effondre. Alioun sera le gardien de la vengeance armé par son patrimoine mémoriel, sa voix et celle de ses ancêtres.
Récit sous forme de conte parfois. La poésie s'invite et adoucit l'angoisse d'une écriture au rythme changeant, m'imposant des pauses dans cette lecture comme pour contrer un pressentiment dans ce récit basculant vers un ailleurs, toujours en mouvement.
Les relations se font puis s'éloignent.
Il y a l'enfance et la rue où Alioun apprivoise codes et dangers cette nouvelle jungle aux antipodes de sa forêt d'enfance. Un air de
Peter Pan.
La suite est une alternance des parcours croisés d'Alioun et Antoine, chacun pensant ne plus jamais revoir l autre. Entre désillusions et reprise en main du réel où chacun respectivement croise d'autres âmes errantes. Aicha pour Antoine, Myriam pour Alioun notamment.
Le récit nous fait faire des allers-retours entre espoir et horreur. Rien de linéaire dans ce roman où l'on navigue à travers un large panel des monstruosités humaines. Parfois des ilots de quiétude permettent une halte méritée pour nos deux protagonistes, mais souvent de courte durée avant une fuite avant.
Le passé s'entremêle au présent.
Difficile de résumer ce riche roman, cette aventure humaine que j'ai prise comme un hommage à tous ces voyageurs forcés, oubliés, cachés et méprisés dans d'ignobles généralités ou statistiques déshumanisées.
Un immense merci à Melanzé éditions pour ce cadeau et ce riche moment passé à m'émouvoir pour ces deux personnages.
PS : découverte aussi d'un artiste togolais à l'origine de cette magnifique couverture, Sitou Matthia.