Une vie réussie est une vie dans laquelle il y a des enfants, des songes dont on sort difficilement, d’inconsolables peines, de la grandeur, des erreurs profondes comme des graines enfouies dans le sol, une tour, une rue paisible, de la clairvoyance et le sens de l’Histoire, assez de place pour le mystère, de la bonté et quelqu’un à qui parler. P.130
Humainement si prometteur. P.128
L’Art de l’oisiveté (…) ces mots d’Hermann Hesse: « S’il faut des hommes qui construisent des maisons et les abattent, qui plantent des forêts et les coupent, qui peignent les volets et sèment les jardins, i l faut bien aussi quelqu’un qui voie tout cela. » p.98
On répète partout aux gens de garder les pieds sur terre, mais à peu près jamais de se laisser enchanter. P.77
Kroutchev (…) Le Monde: « Il a réussi sa vie mais manqué son oeuvre. » p.75
Les abeilles (…). Leur vieillesse (…) n’est pas comme la mienne l’occasion de se retourner et de regretter le passé. Ce ne sont pas des créatures créées pour la nostalgie. Peut-être devrais-je tirer une leçon de ces existences si brèves et si parfaitement vouées au temps présent. Le passé est un phare, non un port. (…) Je ne déteste pas de temps à autre tenir compagnie à mes regrets mélancoliques. J’y rencontre des audaces, des révoltes, des austérités et mêmes des douleurs aujourd’hui disparues, que j’ai peut-être trop tôt transformées en dogmes, en espérances exagérées, en fausses clartés. P.69
L’innocence nous revient-elle jamais après nous avoir quittés? P.65
Beaucoup d’hommes se pressent vers la lumière non pas pour mieux voir, mais pour mieux briller (Nietzsche). P.43
On dit souvent que les choses n’arrivent pas pour rien. Il m’apparaît au contraire qu’elle ne font que ça, arriver pour rien. Mais n’est-il pas formidable qu’il n’y ait derrière toute chose aucune motivation particulière, hormis peut-être le miracle de l’existence, ce très pur contrepoids de la mort ?
Je ne sais trop comment le dire, mais je songe parfois, en y repensant aujourd’hui, à Ernest Hemingway, dont les fréquents recours à la litote servaient admirablement son constant souci de dire moins pour laisser entendre davantage. Parfois aussi nous nous taisions carrément, et alors on pouvait entendre au milieu du silence de la campagne le chœur des moineaux domestiques répéter ses grands succès. À la maison, ce qui nous rendait le plus heureux, c’était lorsque notre père rentrant de son travail chez Steinberg avec des livres que son patron lui avait offerts à notre intention. « Ils ont été achetés en solde, mais c’est de la qualité, disait papa. Ça vient de la librairie Dussault, à Montréal. » 17 / 18