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Critique de Khalil_Livres


Alain de Benoist est un essayiste et philosophe français prolifique, considéré comme sulfureux pour certains, d'extrême droite pour d'autres. Il n'en demeure pas moins un homme à la pensée complexe, critique, nuancée et loin du politiquement correct castrateur.
« Nous et les autres » est un livre sur l'identité, concept qui fait déferler à notre époque beaucoup de passions, souvent négatives.
S'éloignant des débats hystériques et autres crispations irrationnelles, Alain de Benoist traite de manière philosophique le concept d'identité. Si ce dernier peut être considéré comme flou et sans réelle consistance par certains (Je pense notamment au dernier livre "Siècle des égarés de Julia de Funès"), il n'en revête pas moins un besoin vital pour l'individu comme pour les peuples. L'aspect mouvant et dynamique de l'identité n'est pas une raison pour la rejeter et la caricaturer en renfermement comme le fait Delphine Horvilleur dans « Il n'y a pas d'AJAR ».
L'auteur revient sur les origines de l'identité, concept intimement lié à la modernité et la notion de subjectivisme chez Descartes (Intériorisation de la morale). La dissolution des liens et hiérarchies traditionnelles, l'influence du platonisme, du stoïcisme et plus tard du christianisme et de la réforme protestante incitant à viser la maitrise de soi par la raison, ont renvoyé l'individu à son for intérieur le condamnant à une solitude ontologique qui peut se résumer par la question « Qui suis-je ? »
Par ailleurs, la modernité, par une sorte d'uniformisation des individus (Idéologie du Même) et en les cantonnant à la raison et à des relations régies principalement par le droit, créera le mouvement romantique, caractérisé par l'éclosion du sensible, l'idéal de l'authenticité et de la réalisation de soi ainsi que l'affirmation de sa propre singularité. Cette dernière ne peut revêtir une consistance que dans les yeux d'autrui via la reconnaissance. L'identité se construit avec Autrui.
La modernité ayant suscité le questionnement sur l'identité sans y répondre, on verra proliférer toutes sortes d'identités : identités de classe sociale, identité nationale, identité communautaire etc…
Alain de Benoist soutient que l'identité d'un individu ou d'un peuple est forcément composite. C'est par un processus de narration subjectif que nous forgeons les éléments à privilégier, les valeurs sur lesquelles on se construit et qui fondent notre imaginaire individuel ou collectif (Le fameux roman national dans le cas d'un Etat-Nation).
On retrouve également dans cet essai une des idées principales des « Identités Meurtrières » d'Amine Maalouf, à savoir que le rejet de l'identité d'Autrui renforce les crispations et le sectarisme conduisant aux comportements les plus extrêmes et les plus abjects.



Dans la deuxième partie du livre, Alain de Benoist revient sur les débats contemporains autour des études décoloniales et postcoloniales et la montée du courant indigéniste en France. L'auteur décrit à merveille les dérives de ce néo racialisme venu des Etats Unis qui conçoit la société et le monde en termes de « races » tout en niant le fondement scientifique de ce concept. Nous vivons un antiracisme qui n'est rien qu'un racisme inversé, essentialisant des concepts comme « Noir » et « Blanc », faisant des hommes blancs des racistes avérés et des noirs des victimes potentielles. On retrouve son parallèle dans le néo féminisme haineux et revanchard, qui contrairement au véritable féminisme (que l'auteur défend), ne vise pas l'égalité en termes de droits mais souhaite la domination des hommes par les femmes, en guise de revanche sur l'histoire du patriarcat.
« L'idéologie indigéniste prétend s'inscrire dans une critique générale de la domination, mais on voit bien qu'en fin de compte elle se borner à militer en faveur d'une simple inversion des anciennes hiérarchies ».
Les autres conséquences de cette folie vont de la moralisation de l'histoire (cancel culture, déboulonnement de statuts..) jusqu'à l'exclusion d'un professeur de l'Université de Californie pour avoir enseigné le mot chinois « ne-ga » à ses élèves en passant par le refus d'un autre professeur d'enseigner l'algèbre et la géométrie sous prétexte que ce sont des sciences « blanches ».
L'auteur regrette que le seul modèle opposé à cet indigénisme basé sur la lutte pour la reconnaissance des particularismes (De Benoist trouve cette revendication légitime), soit un universalisme républicain qui sonne creux dans les oreilles du camp adverse. En effet, l'universalisme pêche par son indifférence aux différences et par une conception trop étriquée et trop occidentale de l'identité (Résumer l'individu à un citoyen ne peut répondre à ses besoins vitaux de reconnaissance).
Alain de Benoist soutient au contraire un « pluriversalisme » basé sur la nécessité d'imposer une conception positive de l'identité et des identités collectives, fondée sur la culture et l'histoire. « La coexistence des cultures exige qu'on reconnaisse leur irréductible pluralité ».
L'auteur conclut tristement sur le rôle des idiots utiles que jouent ces pourfendeurs de conceptions racialistes victimaires : « La révolution sociétale se substitue à la révolution sociale, la déconstruction des bases anthropologiques de la société à l'abolition de l'aliénation humaine. L'indigénisme peut bien se présenter comme une révolte, les capitalistes et les publicitaires se frottent les mains ».



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