Le sel de la Bretagne

"J'appris ainsi que le poivre, le cachou, le séné, le piment, l'aloès, la muscade, le girofle, et même le thé et le café servaient indifféremment de remède et d'assaisonnement culinaire. Dans tous les cas, c'étaient les apothicaires qui commercialisaient les épices.
J'ai aussitôt repensé au kari, et à la discussion que j'avais eue avec ma mère du temps de mon adolescence. Voilà qui justifiait que le secret du kari fût détenu par une dynastie d'apothicaires et qu'on dût l'acheter à la pharmacie. Une survivance des temps où les épices servaient autant à soigner qu'à cuisiner."

En compagnie des Indes - Irène Frain

"A Groix, il n'y a pas de sensiblerie mais des sentiments, pas de baratin mais des actes, pas de solitude mais de la solidarité."

La corne du bateau - Lorraine Fouchet

"Quand le bateau donne de la voix devant les feux d'entrée du port, le rouge et le vert, mon chien aboie, mon cœur crie de joie, mon corps se détend, mon visage s'illumine. Nous sommes là où nous devons être."

La corne du bateau - Lorraine Fouchet

"Et puis, soudain, le bateau a corné en manœuvrant pour entrer à Port-Tudy. Ce son m'a chamboulée pour toujours. Étrangement, j'ai alors su que j'arrivais, non pas chez moi, mais au juste endroit de ma vie. Sur ce caillou de huit kilomètres sur quatre kilomètres, planté au milieu de la mer, trois lieues au large de Lorient, comme le chante dans ses poèmes le barde Yann-Ber Kalloc'h."

La corne du bateau - Lorraine Fouchet

"Surprise ! La fille n'est ni musulmane, ni indienne, mais native du port sardinier au bout du goulet de Brest. Deux jours après, le poète part en repérages. Et comme la fausse Gitane le lui avait prédit, après vingt heures de train, une heure de bateau, le choc est immédiat. Une rade miroitante ; des falaises rousses où bat l'Iroise ; le vent en écharpe autour des îles rondes et des rochers affûtés. Sous un soleil de juillet, il trouve à ce trident de grès, où rivalisent les à-pics et les anses, de faux airs d'Irlande ou d'Ecosse. Et puis ces trognes aux yeux bleus sur les quais, ces jolies filles en coiffe, le parfum du varech mêlé aux effluves des pins...
Tout le ravit dans la lumière cristalline, sur cette presqu'île qui, en effet, est presque une île, et se nomme Crozon."

Je me souviens de vous, Saint-Pol-Roux - Jean-Luc Coatalem

"C'est une chambre de bonne, à l'extrémité d'un sombre couloir, et non dans la lumière tamisée du paradis finistérien, que prend place l'acte de chair crucial. Dommage. Je me voyais bien en enfant mystique de la vague et du roc, et d'ailleurs je l'ai été, "quelque part", au long de mes vagabondages là-bas, sandalettes en plastique et boxer-short, sous la pluie fine qui m'ondoyait en passant."

La maison de la pointe - Georges-Olivier Châteaureynaud

"Par marée haute, il suffisait de quelques mètres pour plonger dans les vagues. A marée basse c'était le parcours du combattant. Marchant vers le large sur le sable ruisselant et entre les algues visqueuses, on aimait se faire peur, on s'imaginait rattrapé et englouti par le flot des eaux montantes... Ici, selon la légende, "la mer remonte à la vitesse d'un cheval au galop". Il y avait de quoi frémir. D'autant que nos maillots [en laine], imbibés de mer salée, nous brûlaient l'entrejambe, les fesses, et nous empêchaient d'accélérer le pas. Bref, le bonheur !"

Les dimanches de Sainte-Marguerite - Jean Bothorel