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Critique de Charybde2


Un court recueil de quatre mini-essais, incisif et efficace, sur les métavers et les transhumanismes, entre fictions et réalités.

Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2022/08/24/note-de-lecture-lhumain-augmente-cyborgs-fictions-et-metavers-collectif/

Pour inaugurer la série Les petits cahiers de tendances, co-construite par les éditions de l'Aube et la Fondation Jean Jaurès, nous avons eu le plaisir de voir arriver en juin 2022 un petit ouvrage passionnant, « L'humain augmenté », composé de quatre contributions d'une vingtaine de pages chacune, autour d'une problématique à la fois civilisationnelle et science-fictive, problématique qui se ramifie rapidement comme en témoigne d'emblée le sous-titre choisi ici : « Cyborgs, fictions et métavers ».

Le philosophe Jean-Michel Besnier, avec son « Portrait du transhumaniste », use d'un ton joliment ironique et pamphlétaire pour brocarder l'étroitesse d'esprit (éventuellement paradoxale pour ces capitaines conquérants de nos futurs) des milliardaires de la Silicon Valley adeptes de l'immortalité « augmentée », de moins en moins métaphorique (jetez donc un oeil par exemple à l'excellent « Agora zéro » d'Éric Arlix et Frédéric Moulin), et plus encore de leurs gourous et adeptes, en insistant sur leur myopie, leur manque de profondeur de champ, et leur astucieux mélange, volontaire ou involontaire, de naïveté et de rouerie cynique. Ce qui n'empêche pas hélas la conjonction de ces intérêts faussement philosophiques avec les priorités beaucoup plus terre-à-terre du néo-libéralisme, on l'aura bien compris.

Ariel Kyrou, que l'on n'a normalement plus guère besoin de présenter sur ce blog, en tant que l'un des plus fins analystes contemporains de la charnière imaginaire, propose dans son « Et si « l'homme-plus » était un « humain-moins » ? une somptueuse lecture-éclair du thème du métavers et du transhumain dans la science-fiction, avec cette prodigieuse culture qu'on lui connaît (vous devez lire dès que possible son remarquable « Dans les imaginaires du futur » si ce n'est déjà fait !), qu'il condense avec brio autour de motifs-clé issus du « Snow Crash » de Neal Stephenson, de la Culture de Iain M. Banks, du « Dernier de son espèce » d'Andreas Eschbach et du « Tè Mawon » de Michael Roch.

Diana Filippova, romancière, essayiste, et politiquement active, avec son « Dystopies vs. autofiction : auteur augmenté, roman diminué », a su jouer finement avec les mots du sujet pour nous entraîner sur le terrain du statut des genres littéraires en France, et notamment du côté sulfureux et passionnant des boucles de rétroaction, particulièrement défaillantes chez nous, entre l'aiguillon science-fictif et la littérature dite générale pour parvenir à mieux penser le réel, et donc inventer le futur. Tout en soulignant au passage le mauvais service que nous rend en permanence l'ego surdimensionné, à l'ombre des technopouvoirs qu'elle connaît bien.

Fanny Parise, docteure en socio-anthropologie, concluant le recueil avec son « Anthropologie de l'humain augmenté en terres virtuelles », affiche en apparence une prudente neutralité, comme celle des outils mis en avant (un habile carré sémiotique de Greimas, notamment), vis-à-vis du double potentiel du rêve éveillé que constitue le « métavers marchand » par rapport au « métavers hacker », mais discrètement, effleurant certaines des conclusions salutaires de McKenzie Wark, elle montre néanmoins l'optimisme déraisonnable de la vision technocapitaliste, bien décidée à toujours ignorer les écueils qui feraient baisser sa valeur.

Quatre voix et quatre approches radicalement différentes pour mettre toutefois simultanément en évidence les composantes d'illusionnisme et de détournement d'espérance que contiennent si manifestement certains des rêves technocapitalistes les plus emblématiques.
Lien : https://charybde2.wordpress...
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