Quand j’eus une discussion avec mon maître Jean-Marie Pelt, nous commencions à entrevoir le retournement de paradigme de la thérapeutique à base de chimie qui allait advenir. Jusqu’aux années quatre-vingt-dix, le credo de la recherche médicamenteuse en chimie s’est fondé sur les seules molécules de synthèse. Une molécule agit sur une cible bien précise. Une autre voie de recherche est apparue depuis, qui redonne sa place au global, avec l’utilisation de mélanges de molécules, d’extraits de plantes ou de mélanges d’extraits de plantes.
1973, Sahara. Le désert, enfin ! La décision était prise d’une traversée nord-sud, d’Alger à Agadès, puis retour par le redoutable désert du Ténéré. Trois massifs montagneux étaient au programme : le Hoggar, l’Aïr, et le tassil n’Ajjer. Et d’immenses étendues de sable et de regs. Il fallait prévoir une autonomie de carburant de 1.000km et d’eau pour 7 jours. Nous avions peu de moyens financiers et nos véhicules habituels, des Peugeot 404, ne pouvaient réaliser ce périple. Dans la recherche de partenaires financiers, nous avions déposé un dossier pour l’obtention du tout nouveau 4*4 Toyota Land Cruiser que les Japonais venaient de mettre sur le marché pour concurrencer l’indétrônable Land Rover. Nous devions réaliser un reportage en images pour faire découvrir les capacités du véhicule en conditions extrêmes. Nous nous étions rapprochés de Maurice Freund, patron fondateur du Point Mulhouse, pionnier des voyagistes, qui a initié les découvertes et aventures dans des régions inaccessibles. […] Depuis un an, nous préparions ce voyage avec une excitation débordante : le planning des tâches, le matériel photo et ciné pour les reportages, les jerricans à essence, les bidons plastiques pour l’eau, un treuil, deux roues de secours, des échelles de sable, des outils, des pièces de rechange, des médicaments, deux tentes et du matériel de camping, des cartes, de la documentation. La route nous mène à travers des paysages méditerranéens, s’élève vers les montagnes de l’Atlas, l’Aurès, puis redescend vers le Sud. La végétation se raréfie, lentement le paysage change. Le désert de pierre de Tademaït nous stupéfait. Aux quatre points cardinaux, le même paysage, la même aridité, le même silence, la même chaleur, une enclume. Seule trace de la civilisation, ce ruban de bitume qui file à l’infini. Enfin, quelques traces d’une végétation herbacée discrète et rabougrie, puis, soudain, des arbres au tronc jaune torturé qui jaillissent au détour d’un oued : des Calatropis procera, avec leurs rameaux feuilles au bout desquels s’épanouissent des grappes de petites fleurs bleues. Leurs grandes feuilles vertes et leurs tiges sont parcourues par des petites vaisseaux libérant un latex blanc irritant protégeant la plante de la pâture. Ce latex est utilisé comme poison de flèche pour son action cardiotoxique et ses effets irritants en facilitent la diffusion dans le corps de la victime. Au Yémen, le latex est employé en médecine vétérinaire pour traiter les galles et les affections dermatologiques des dromadaires. Les Touaregs en font un usage similaire au Sahara où le Calotropis est parfois le seul arbuste présent dans les immensités désertiques.
Ça, c’est une anthémis. Et elle n’est pas plus toxique que la marguerite. Elle a poussé toute seule, elle voulait sans doute être en bonne compagnie. C’est une fleur toute simple qui se balade. […] L’anthémis, de la famille des camomilles, est une sorte de marguerite au cœur jaune. Nous avons choisi son nom pour nos expéditions car la camomille n’est pas une fleur, mais une société de nombreuses fleurs rassemblées sur un capitule, chacune ayant une spécialisation dans le travail. Ainsi, notre équipage se composait de Martine, en charge de l’intendance, de Jacques, photos et botanique médicale, de Georges, photos, et de Patrick, responsable de la partie mécanique.
Quand une veille personne meurt, c'est une bibliothèque qui disparaît.
Comme aujourd'hui encore le Yémen était en proie à de vives tensions. Entre Yémen du Nord et du Sud, l'un soutenu par l'Arabie Saoudite et l'autre par les soviétiques. Une guerre pouvait éclater à tout moment, et la ville de Taiz, en position stratégique près de la ligne de démarcation, serait la première attaquée.
Voyager et découvrir le monde, c'est admirer sa beauté, c'est vivre de peu...
... se détourner de l'inutile et de la consommation, mais aussi se confronter à l'injustice, à l'inégalité criante et à la misère.
Peut-être est-il venu, le moment de se laisser gagner par la douce immobilité des plantes, pour réfléchir à un autre destin...?
La drogue est l'illustration saisissante et ambiguë de l'éternelle dialectique du remède et du poison, du rêve et de la réalité, de l'action et de la contemplation, de la libération et de l'oppression.
Peut-être est-il venu, le moment de se laisser gagner par la douce immobilité des plantes, pour réfléchir à un autre destin... ?
Notre médecine à base de chimie ne peut pas répondre à tout. (...) Dans certains cas, les plantes sont plus efficaces qu'un traitement chimique avec effets secondaires.