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Critique de Woland


Woland
27 décembre 2015
ISBN : ?

Ben non, il n'y aura pas d'extraits parce que ce livre de Pierre Boileau et Thomas Narcejac m'a vraiment, vraiment, beaucoup, beaucoup déçue ! On connaît leur technique, si souvent éblouissante, de prestidigitateurs émérites. Mais quand ils se laissent distraire ou forcent trop sur le côté "magie pure" de leur intrigue sans songer à compenser par une fin qui lui arrive à la cheville, cela ne peut donner qu'une chute qui est déjà un abîme à elle toute seule.

Avec "A Coeur Perdu", nous sommes dans le monde du spectacle, celui du vieux disque vinyle alors dans toute sa gloire. Eve Faugères, de son côté, est une chanteuse qu'on peut imaginer comme "réaliste", dont la voix vous racle le coeur et qui vous fait salle comble en moins de temps qu'il n'en faut pour ouvrir le guichet où l'on vend les billets de son nouveau spectacle. Elle est mariée - depuis plus de quinze ans - à Maurice Faugères, son impresario et compositeur, et l'union de ces deux talents a conçu de véritables merveilles musicales. Mais voilà, le temps est passé, passé ... Et Maurice, comme la majorité des hommes, surtout dans ce milieu, est coureur. Sa nouvelle lubie : lancer à tout prix la petite Florence Brunstein, toujours chez les disques Serge Méliot, ceux-là même où Eve a connu son premier succès.

Il faut être franc : d'un accord commun, Eve et Maurice s'étaient autorisé des passades mutuelles. Tout, pourvu que cela restât relativement discret et surtout qu'aucun ne songeât à jouer un mauvais tour à l'autre - comme remplacer Eve par exemple par une chanteuse plus jeune ou encore divorcer pour un play-boy.

Justement, en ce moment, chacun voit quelqu'un d'autre : Eve a son pianiste, Jean Leprat, par ailleurs virtuose-né et Faugères ... la petite Brunstein. Mais les dangers caracolent à l'horizon : Eve parle carrément de tuer son mari et celui-ci - nous nous en doutons dès le second chapitre - médite un divorce ou une séparation au profit de Solange Brunstein.

Survient alors ce qui survient toujours dans une situation telle que celle-ci : l'Amant tue, mi-rage, mi-légitime défense, le Mari, le tout sous les yeux de la Femme-Maîtresse. Tous deux remettent le corps dans l'automobile avec laquelle il devait gagner Paris et tirent parti d'une route bien sinueuse, du côté d'Ancenis, pour précipiter la voiture dans un gouffre. Et hop ! Ni vu, ni connu : le tour est joué.

Eve est veuve. Leprat prend des airs à la fois rogues et dégagés de beau gosse qui aura toujours son talent pour vivre. La petite Brunstein voit, patatras, s'évanouir tous ses espoirs. La police, en la personne du commissaire Borel, suspecte plus par habitude que par nécessité réelle. Quant à Méliot, il est bien embêté ...

Et il l'est encore plus lorsque, le jour même où Eve et Leprat reçoive leur exemplaire, il ouvre un paquet contenant un disque, intitulé "A Coeur Perdu", où Faugères lui-même chantonne sa dernière mélodie et ... met les pieds dans le plat en déballant toute l'histoire - enfin, rien que le début, il faut savoir faire durer le plaisir. Bien entendu, vous vous en doutez : ça ne va pas s'arrêter là. Borel, ayant reçu de son côté une lettre lui évoquant l'éventuel assassinat de Faugères, est bien obligé d'ouvrir une enquête. Et voilà que surgissent, de nulle part bien sûr, un second, puis un troisième disque. Pour épicer la sauce, Méliot est retrouvé mort chez lui, sur son beau tapis. Eve perd d'autant plus son sang-froid que, pour la galerie, elle se doit d'afficher une assurance sans failles. Bref, tous les pantins s'agitent mais aucun ne sait plus à quel saint se vouer ...

Si l'on était dans un roman d'épouvante, ça ferait un sacré numéros de zombis faisant des claquettes ! ;o)

Oui, ce serait faire preuve d'une mauvaise foi incroyable de nier l'excellence de toute cette partie-là. L'ennui, c'est qu'elle a le mérite - et le tort - de faire miroiter à tout lecteur qui veut son plaisir une fin particulièrement sournoise, tordue, incroyable, ahurissante ou, comme nous diraient les Inconnus, "bouleversifiante."

Or, en fait de "bouleversifiance", la réalité nous contraint à vous avouer que ça ne casse vraiment pas trois pattes à un canard et que l'on en reste sur le fondement, déçu, déçu, déçu, et pratiquement aussi frustré dans sa vénération pour le tandem d'écrivains français que Faugères l'était, finalement, dans l'amour qu'il éprouvait pour sa femme.

C'est d'autant plus dommage que, franchement, les deux premiers tiers du livre témoignent d'une rare habileté. Certes, on ne demandait pas aux auteurs de ressusciter Faugères ou d'imaginer un complot entre lui et sa femme pour perdre Leprat mais tout de même, ils auraient pu faire bien mieux. Tant pis. Ce sera pour la prochaine fois.

Peut-être ... ;o)
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