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Critique de nadejda


«Rue de l'Odéon, chez un marchand de livres anciens, je trouvai un jour, par hasard, perdue au milieu des romans et des recueils de poèmes, une petite boîte noire, qui portait ce titre : Collection secrète d'un auteur célèbre.»
Cette boîte contient des photos de femmes nues. Toutes sans exception sont brunes, dans des poses provocantes. L'une de ces jeunes femmes détonne au milieu de toutes les autres : " le visage de l'inconnue, avec un regard à la fois tendre et malin, et un sourire de connivence qu'elle échangeait avec le photographe, tranchait avec l'air bestial ou simplet des autres. Elle n'en était pas moins impudique, mais se prêtait au vice de l'objectif avec une tranquille ingénuité."
Le libraire révèle à Dominique Bona que ces photos appartenaient à l'écrivain Pierre Louÿs et que la photo qui la retient est celle de Marie, l'une des trois filles de José Maria de Heredia.
A travers le destin des trois soeurs, Hélène, Marie et Louise c'est toute la vie littéraire, artistique et libertine de la Belle Epoque que va nous faire traverser Dominique Bona. 
J'ai songé en découvrant ces trois femmes, dont la plus voluptueuse et attirante reste quand même Marie, au beau poème de Baudelaire «A une dame créole» :

Son teint est pâle et chaud ; la brune enchanteresse

A dans le cou des airs noblement maniérés ;

Grande et svelte en marchant comme une chasseresse,

Son sourire est tranquille et ses yeux assurés.

Marie se mariera avec Henri de Régnier et deviendra la maîtresse de Pierre Louÿs auquel l'unira une brûlante passion. Elle aura aussi pour amant Jean de Tinan, Henry Bernstein «le roi, ou l'empereur du théâtre de boulevard», Gabriele d'Annunzio. 
Elle favorisera le mariage de Louise sa soeur cadette, qui ignore leur liaison, avec Pierre Louÿs. Il continuera bien sûr à être son amant.

Elle sera elle-même poète et publiera sous le pseudonyme de Gérard d'Houville.
«Autour de Marie de Régnier, hors ses soeurs, toutes les femmes écrivent. Paul Léautaud finit par s'en plaindre : «Toutes les femmes écrivent aujourd'hui au point qu'on ne peut plus trouver de femme de ménage.»
Au fil des pages on découvre tous les liens qui unissent de nombreux écrivains de cette époque et cela donne envie d'en savoir plus et de lire ou relire leurs textes sous ce nouvel éclairage.

Marie est une amie très proche de Catherine Pozzi qui deviendra la maîtresse de Paul Valéry poète et ami de Pierre Louÿs. 

Anna de Noailles fait aussi partie de ses amies et lui écrit : «Nul ne pourra vous admirer plus que moi. Les êtres sont rares qui, par leur rayonnement et leur rêve, apportent à la solitude une espérance.»
L'on croise, au fil des pages, Oscar Wilde, Proust, Colette, Nathalie Clifford Barney qui recevra pendant 60 ans dans son salon de la rue Jacob et Liane de Pougy.
Tout est passionnant dans ce livre qui, s'il est traversé de rencontres exceptionnelles, nous fait aussi partager la vie somme toute assez bourgeoise et calme de la famille Heredia qui reste très unie.
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