Nous voilà de retour à Gwendalavir : comme les personnages, le lecteur reprend ses marques. Outre le décor familier d'Al-Jeit et son univers de fantasy épique abandonnés le temps du tome précédent,
Pierre Bottero réinstaure les citations alaviriennes au début de chaque chapitre, nous rappelant ainsi les ressorts immersifs de la première trilogie. Pour autant, qu'on ne s'y trompe pas : comme dans "La forêt des captifs", le ton reste ici encore plus sombre, plus adulte, que dans "La quête d'Ewilan". Les citations, en effet, permettent souvent à l'auteur de susciter l'appréhension du lecteur en les faisant annonciatrices des embûches qui attendent les protagonistes au fil des pages à venir. Une audacieuse façon d'entretenir le suspense, doublée de l'impression qu'une épée de Damoclès pend dangereusement au-dessus de la tête de chaque personnage.
Avec le tome précédent, on avait fait remarquer l'avant-gardisme de l'auteur et les éléments qui, aussi surprenant que cela puisse paraître, évoquaient "Stranger Things" avec vingt ans d'avance. Alors que cet opus-ci nous permet de réintégrer la fantasy pure de Gwendalavir, les similitudes avec la célèbre série de SF persistent. En effet, la méduse qui envahit les Spires tout en cherchant à rejoindre notre réalité, créature tentaculaire typiquement lovecrafitenne, n'est pas sans rappeler le flagelleur mental de la saison 3.
La créature venant bloquer l'accès à l'Imagination, elle permet un ressort scénaristique de taille qui maintient la curiosité du lecteur pour l'univers de
Bottero : là où le Dessin semblait ne plus avoir de limite, le pouvoir de tous les Alaviriens (Ewilan y compris) est considérablement réduit, faisant d'eux des proies faciles. Outre cet axe scénaristique central, l'auteur n'oublie pas de développer des intrigues secondaires qui permettent de voir évoluer l'intégralité des personnages et d'élargir son "livre monde", ce qu'il s'autorise davantage dans cette trilogie : l'apprentissage de Salim et les anciens ennemis d'Ellana sur le retour, un triangle amoureux, une figure cachée dans l'ombre qui semble jouer les Deus Ex Machina et une autre qui suit notre troupe de héros à bonne distance. Ce titre est aussi celui des retrouvailles, notamment le retour d'Artis Valpierre et de Chiam Vite, accompagné de son âme-soeur faëlle. Mais reviendront aussi la Dame et son Héros, dont chaque apparition, grâce à la plume inimitable de
Pierre Bottero, en appelle à l'émotion du lecteur.
En bref : Si
Pierre Bottero nous invite à retourner à Gwendalavir, le vent de renouveau amorcé avec La forêt des captifs continue de souffler sur ce second tome des Mondes d'Ewilan. La tonalité reste résolument sombre et le caractère immatériel de l'ennemi d'Ewilan suppose de nouveaux enjeux et des embûches de taille sur son chemin. Multipliant des intrigues secondaires comme autant de chemins qu'on imagine voir se rejoindre d'ici la fin de la trilogie, l'auteur parvient à faire de L'oeil d'Otolep un véritable page turner.
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