C'était au temps des mammouths laineux

Il est des distances que nous ne pouvons plus combler. Ce sont celles de la nostalgie.

Nous avions peur de devenir des numéros, nous sommes devenus carrément numériques.

Il n'y a rien comme le sourire du fusillé pour laisser un doute profond dans l'esprit du peloton d'exécution.

Car la forêt parle, elle n'est qu'un long murmure, un silence plein, une récitation de bruissements, des chants, des frottements, des craquements qui sont les fondements de toutes les poésies du monde.

C'est dans sa nature, à la Nature, que de montrer tant de visages. Mais encore faut-il avoir les yeux ouverts, c'est-à-dire développer et entretenir la sensibilité nécessaire à la captation de semblables dimensions. Il faut un penchant, une disposition d'esprit, pour ne pas dire un état d'âme.

Il est bon de se taire puisque ne pas parler favorise le discours de l'âme qui déambule en même temps que le corps qu'elle habite.

"...la culture, loin d'être un vernis folklorique, est un ancrage très profond qui donne un sens à la grande affaire qu'est la conscience d'être."

La vie est ainsi faite : nous avons parfois la chance inouïe de devenir ce que nous sommes.

Les rues trouées de Montréal sont encombrées de monticules glacés qui découpent de façon irrégulière les côtés des trottoirs, les voitures stationnées s'accumulent en pagaille, paralysées dans les bancs de neige. Les gens marchent au pas de la résignation, avec le dos courbé de la tortue frissonnante. La ville est anarchique, la glace est mauvaise sous nos pieds, trouée elle aussi, transpercée par des grains de sel qui ont fini par ne plus faire effet, sablée de façon irrégulière, parfois glissante, parfois pas: il faut contourner les obstacles, des formes cachées sous la vieille neige granuleuse et séchée, une borne-fontaine, un arbre rachitique blessé, l'écorce arrachée par des chenillettes en folie!

Lisez entre les lignes des grandes épopées, dans l'infrahistoire et vous verrez se démarquer des personnages beaucoup plus remarquables que ceux que l'on tient d'habitude pour extraordinaires.