Lecture courte inspirée, comme peut l'être toute cette série signée
Flora Boukri. Elle prend le parti de revisiter les mythes grecs en faisant parler les grandes oubliées de la mythologie grecque, pensée dans une société patriarcale après tout : les femmes.
Pour ce 2e récit, elle choisit une société matriarcale en faisant de son deuxième roman Penthésileia, l'amazone, l'héroïne principale et éponyme. de cette jeune princesse, Flore Boukri décide de revisiter un peu le mythe en se penchant sur sa personnalité. Longtemps dépeinte comme une fanatique à la rage guerrière et meurtrière,
Flora Boukri la drape dans des sentiments plus complexes et tellement plausibles. Elle nous présente la communauté amazone. Ne connaissant que très peu cette communauté par les mythes, je ne saurais dire ce qui revient des sources et ce qui revient de son imagination. Quoiqu'il en soit, cette première partie du récit m'a plu. Elle prend le temps de nous montrer la psychologie de cette communauté et l'organisation qui en découle. Dans ce système matriarcal où le féminisme est portée à l'extrême, elle permet à son héroïne d'envisager une situation plus équilibrante, de prendre conscience que toutes les qualités de sa communauté ne la rendent pas parfaite, qu'il y a des lacunes, que la liberté n'est qu'apparente du fait d'une absence de certains choix. Elle fait émerger cette prise de conscience graduellement. J'ai trouvé cela plutôt bien mené, surtout que le récit est très court, 160p.
Cette prise de conscience, débutée dans la première partie, s'étoffe lorsque notre héroïne est confrontée à l'adversité : le fonctionnement d'une société patriarcale, tel qu'elle peut le voir quand elle arrive à Troie, en pleine guerre. Elle atteint son apogée avec l'ultime partie qui est celle qui m'a le plus émue.
A plus d'un titre, Penthésileia est un personnage complexe, humain, qui évolue et auquel on ne peut que s'attacher.
Comme pour Ariadnê, l'autrice choisit d'alterner la narration. Si la première partie est toujours du point de vue de l'héroïne éponyme, les deux autres sont des narrations internes de l'entourage de ce personnage, le tout avec des intermèdes divins. Cela permet d'extérioriser notre regard sur le personnage principal. Un point de vue d'autant plus intéressant qu'elle permet à l'une des narrations d'être du côté de l'homme avec qui elle partage une romance. Ici, c'est bien entendu Achille. Un héros de la mythologie grecque que, personnellement j'exècre lorsque je lis l'Iliade. Heureusement que les réécritures sont là pour m'offrir une vision de lui plus honorable. C'est d'ailleurs ce qu'il est dans ce récit. J'avoue d'ailleurs avoir ressenti un goût de trop peu. Il est celui qui a la partie la plus courte et je pense que l'autrice aurait pu lui accorder une plus grande place, permettant d'affiner le personnage et leur romance, toute platonique soit-elle.
Sa décision finale, le combat, me paraît en outre, un peu artificiel. Cela s'enclenche mal avec la psychologie présentée... Lui accorder plus de place aurait peut-être amenée à rendre cette décision plus compréhensible selon moi.
La deuxième partie est celle d'Hippolutê, soeur fidèle et petit accro au récit originel. Normalement tuée par inadvertance par Penthésileia qui vient se purifier en choisissant de combattre, l'autrice choisit de la laisser en vie. L'occasion de présenter Penthésileia comme une cheffe digne d'être suivie. Je pense du moins que c'est l'objectif de cette narration. Pour autant, c'est une partie qui me semble frustrante. Premièrement, Longue, là où celle d'Achille est trop petite. Je ne pense pas qu'il était nécessaire que tant de chapitres soient nécessaires pour nous présenter sa soeur comme une cheffe de guerre admirable, là où la partie d'Achille aurait apporté plus de richesses au récit. Deuxièmement, très frustrante car une prise de conscience est aussi plausible de son côté, l'émergence d'une relation amoureuse, d'une prise de conscience qui est à peine effleurée alors qu'une évolution concrète de son caractère aurait été une double réussite...
Quoiqu'il en soit, malgré ces quelques bémols, cela reste une lecture plaisante, inspirante, qui remplit son objectif : revisiter les mythes grecs sous un angle plus féministe.
A Medousa prochainement!