Dorothée n’avait jamais fait un travail honnête de sa vie. Elle dormait, se prostituait, s’assurait que je mange et que j’étudie. Une fois par mois, elle me coupait les cheveux. Elle n’avait pas d’énergie supplémentaire à dépenser. Sa seule monnaie d’échange était son corps que par ailleurs elle détruisait méthodiquement avec de l’alcool bon marché.
Dorothée mettait un soin si particulier à me coiffer que peu à peu, les autres mères voulurent la même chose pour leur fils. Sa seule exigence état que chacun apporte sa paire de ciseaux et des lames de rasoir neuves. Pour le reste, vous payiez ce que vous pouviez: 150, 200 francs CFA, peu importe. Tout au long de mon enfance, tant que ma mère me coiffa, tous les jeunes gens aux alentours eurent aussi des cheveux impeccablement tenus.
L’exil est un bannissement et une mutilation, il y a là quelque chose de profondément inhumain. Quel que soit le danger que l’on fuit et le soulagement de s’en éloigner, chacun mérite de garder quelque part en lui l’espoir d’un retour.
Il était venu solder ses comptes avec le passé, pas une seconde il n'avait prévu que ce passé que ce passé l'accueille sourire aux lèvres dans une maison comme ils n'auraient jamais pu en rêver dans leur enfance, ni qu'elle soit marié à Nella. Son esprit n'arrivait pas à assimiler ces nouvelles informations
... il sentit monter en lui une drôle d'émotion. Il ne l'avait jamais expérimenté, alors il ne reconnut pas le sentiment d'être libre, à sa place, en accord avec soi-même. [...] Un changement de perspective, un éclairage nouveau qu'il se contenta d'éprouver sans l'analyser ni s'en effrayer. (p. 307)
La vie d’un homme ne tient pas en quelques mots: il est né, il a vécu, il est mort, ci-gît-il. Pour qui veut l’entendre, le récit est beaucoup plus long, plus tortueux. Il contient des joies, des peines, des rencontres, des déchirures, des amours et des deuils. Il est fait d’embardées, d’échappées belles, de chutes, de chemins de traverse, de sens uniques, de culs-de-sac, de morts et de vivants. Il est tissé dans les rêves, les peurs, les doutes et les espoirs. Le récit enfle dans la voix de celui qui raconte, il grossit, s’amplifie au point de contenir à lui seul toutes nos existences. Ainsi va la vie d’un homme quand il la relance à un cœur frère disposé à l’écouter.