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Critique de PatriceG


Le Monsieur de San Francisco
Nouvelles d' Ivan Bounine (1870-1953) aux Editions Stock dans la collection Cosmopolite
Ivan Bounine hobereau né à Voronej, situé à 100 kms au sud-est de Toula, Russie. Il émigrera à l'issue de la révolution russe et obtera pour la France. Il écrira toujours en russe et n'aura de cesse le coeur déchiré d'avoir une pensée pour son pays. Plume déliée et sensible, classique dans sa forme, son oeuvre sera couronnée par l'obtention du prix Nobel de littérature en 1933. Point honteux au tableau, à l'endroit de la France cette fois, il fut question il y a quelques mois de reprendre la concession russe au cimetière de Saint-Geneviève des Bois où reposent quelques milliers de gens connus et moins connus ; on pense naturellement à la tombe d'Ivan Bounine. Deux écrivains russes de renom sont venus se recueillir sur sa tombe en récitant des textes !..


1915

Un corps dont on se débarrasse à Naples ..

Dans ce sens retour sur le même bateau de croisière, un sens unique sur San Francisco semble donner raison à l'auteur russe nobel de littérature, la vie file sans conscience, qu'on soit au niveau des soutes dans une morgue qu'on n'osera voir, avec un cadavre à bord ou aux étages supérieurs où l'offre est suffisamment alléchante pour distraire les passagers huppés ; l'affaire est bien compartimentée pour savoir où les bonnes choses faciles se passent ; et si le confinement d'un thé dansant ou d'une bonne table peut sembler incommode pour filer quelques amours platoniques, le transat langoureux avec vue sur les étoiles qui fantasment dans la noirceur de la nuit complètera le menu.

Ivan Bounine n'en a cure de faire un bilan décevant du sort du monde, il propose à travers un protagoniste un choix plus près de ses convictions qui résonnent comme une évidence : un malheur du monde très mal réparti au détriment des pauvres les plus nombreux dans une nature qui doit changer de nature pour eux-mêmes. C'est une aubaine pour l'écrivain russe de se laisser porter par un parfum nostalgique de la Russie impériale qu'il excelle à décrire ; ses plaies et ses excès invitent naturellement à une panacée qui pourrait être le progrès du peuple dans une nature rayonnante qui lui tend les bras, à condition encore que la grande part lui revienne. Ce que propose l'Amérique n'est qu'un leurre, cet infortuné de vieux riche américain qui vient mourir à Naples sitôt débarqué est là pour le rappeler . Cet homme a peut-être réussi là où il était, mais la réussite rattachée à un tel sort ne rime avec rien, sinon la vanité d'une vie !..

Je ne peux m'empêcher aussi d'y voir le message avant-coureur qu'un siècle plus tard en Italie, sous la covid, les vieux et les plutôt riches tomberont comme des mouches dont on s'empressera par des moyens inhumains de faire disparaître les corps sans le moindre complexe. Comme j'avais tenté un parallèle ici avec la Mort à Venise de Thomas Mann !..
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