Citations sur Le fantôme de Baker Street (10)
"Bref, vers deux ou trois heures du matin, ce 7 juillet, nous avons cru entendre des chuchotements en provenance de sa chambre, ainsi que des jurons lancés par une voix basse qu'il nous était impossible d'identifier. Était-ce celle d'Arthur, rendue méconnaissable par la souffrance ? Était-ce la voix de quelqu’un d'autre ? Mes fils et moi-même sommes entrés à plusieurs reprises, intrigués par ces bruissements étranges, mais à chaque fois nous n'avons trouvé que mon mari, étendu sur son lit, en proie à un demi-sommeil agité. Quand il arrivait à Arthur d'ouvrir un œil décoloré, c'était pour tenter de nous rassurer, nous convaincre que tout allait bien et nous enjoindre d'aller prendre du repos."
J'assistai complètement impuissant à cette comédie. J'avais beau concentrer toutes mes facultés logique pour tenter de comprendre le subterfuge, je ne parvenais pas à expliquer comment il était techniquement possible de faire apparaître un pareil simulacre d'être humain, qui bougeait, qui donnait la réplique et qui se permettait même de faire de l'humour. [...]. J'étais dans la vraie vie, spectateur interloqué d'une véritable séance spirite, le cerveau asphyxié sous un déluge ininterrompu de questions.
Arthur Conan Doyle et lui avaient longuement échangé sur leur attachement respectif au mouvement spirite - la conversion officielle de l'écrivain remontait à 1916, celle de mon père plus ancienne bien que les deux hommes eussent à peu près le même âge, à 1909. Quand à Lady Conan Doyle, d'abord réfractaire à la "religion nouvelle", elle s'était convertie en 1919, avant de se découvrir en 1921 le don de l'écriture automatique.
- C'est exact, Mr Singleton, le n°221 n'existait pas ... En tout cas, pas jusqu'à voici vingt mois ! A l'époque où mon mari a commencé à rédiger la première aventure de Sherlock Holmes, la rue existait bel et bien, mais elle était plus courte et s'arrêtait au n° 85. Sans doute pour ne pas avoir d'ennuis avec un propriétaire irascible, qui n'aurait pas goûté que son adresse figure dans un roman policier, il avait préféré loger son héros à un numéro fictif.
Lady Conan Doyle jeta un bref regard sur les étagères de livres accrochées de chaque côté de la cheminée.
- J'imagine que vous connaissez les œuvres de mon mari ? demanda-t-elle.
- Oh ! pour ça, nous les avons lues et relues, répondis-je en cessant de me tordre l'oreille. Je compte Sir Arthur pour l'un des meilleurs auteurs britanniques.
-J'ajouterais, fit mon compagnon, que son personnage de Sherlock Holmes est ce qui m'a donné envie, depuis que je suis enfant, de me lancer dans cette carrière de détective.
"Un peu de lecture n'a jamais fait de mal à personne"
"… Une veuve éplorée est venue confier ses peurs et ses angoisses à deux hommes qui lui étaient des inconnus il y a encore une heure à peine. J’espère qu’elle n’aura pas à regretter de vous avoir fait confiance."
Passionné de tout en général et de rien en particulier, j'étais capable de dévorer des tonnes et des tonnes d'ouvrages, sur les sujets les plus légers comme les plus ardus,un traite sur l'idéalisme comparé chez Berkeley et Schoppenauer succédant à une histoire du peuple inuit. Tous les genres trouvaient grâce à mes yeux. Ce goût immodéré pour les livres denotait certes une soif intarissable de connaissance, mais trahissait aussi une propension certaine à fuir la vie réelle, ses peines comme ses plaisirs.
C'est alors qu'un prodige plus saisissant que tout ce que j’avais jamais pu imaginer jusqu'à ce jour se produisit là, sous mes yeux.
J'avais beau me convaincre que l'artifice était d'une simplicité enfantine, qu'il suffisait d'une personne dissimulée dans un coin de la pièce et que je n’aurais pas remarquée, à moins que ce ne fût tout simplement une voix enregistrée ou je ne sais quoi d'autre, j'étais noyé sous un flot d'émotion.