AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Floyd2408


Une belle découverte dans ma librairie indépendante, Nicolas Bouvier avec son Journal d'Aran et d'autres lieux, un récit de voyage unique dans trois contrées différentes. Nous allons d'un coup être transportés dans ces pays lointains, d'une culture, d'un paysage, d'une population différence et de leurs identités propres. Nicolas Bouvier est un voyageur écrivain, de langue française, originaire de la Suisse, il a cette chance d'être mandaté par des revues pour parcourir le monde et de son écriture en faire profiter ces lecteurs, il est l'auteur de L'Usage du monde, de Chronique japonaise et d'autres relatant ces expéditions diverses.
Lorsque l'auteur vogue vers une terre difficile, un paysage sauvage parcouru par une météo entrainant la désertification des touristes, laissant les autochtones dans une solitude de routine, Nicolas Bouvier erre dans cette atmosphère rude, cette apprêté Irlandaise qu'il va côtoyer dans une liberté solitaire avec pour compagnon, ces âmes pilier de ce terroir, gardien des traditions, des us et coutumes, le lecteur les accompagne à travers la prosaïque artistique de ce visiteur perdu dans les méandres de ces iles d'Aran. Ce premier récit perce la culture d'Irlande, celle méconnue de ce peuple meurtri par une deuxième guerre mondiale en marge de cette neutralité suspecte, mais aussi de ces légendes, celle des fées et du monde du dessous, le side, cette contrée fait partie intégrante de celle de l'Ulster. Je me suis laissé happer par la vie rude de ce paysage forgé par le temps et les siècles, épargné par la culture romaine, ce peuple reste ancré dans une misanthropie des étrangers, mais cette apparence se brise par l'amitié et la bienveillance naturelle que l'on leur apporte, c'est un peuple ancestrale, prisonnier de trop de légendes et du side.
Ce périple débute en 1985 à Clon-mac-noïse, cette abbaye d'un historique que Nicolas Bouvier nous laisse caresser, de faits historiques et de petites anecdotes, puis nous avançons avec plaisir avec ce voyageur hors saison, la météo est grise, le vent violent, la pluie lacère les lieux et sculpte le relief de cette région, où tinte au loin de mon esprit une musique de Michel Sardou, les lacs du Connemara. Je ferme les yeux et me berce des mots pour peintre ce tableau qui comme une photo se présente à moi, Nicolas Bouvier mêle les descriptions du paysage, des bâtiments, des personnes qu'il rencontre, des animaux aussi, et laisse ces guides lui narrer des petites légendes qu'il distille dans ces écrits, pour notre plus grand plaisir. C'est troublant de se sentir aspiré par ces mots et d'être projeté dans ces territoires et ces iles d'Aran de leur architecture comme ces étranges édifices de pierre sèche. Dun Angeus, de la faune, comme les merles de Sibérie, et ce pays du mensonge, c'est une belle carte postale pour venir visiter ce pays Irlandais.
Le second récit est une promenade du côté de l'Asie en 1970, Nicolas Bouvier nous fait découvrir plus précisément le peuple coréen, face à ce Japon colonisateur de ce pays, lui pillant beaucoup de sa culture comme le bouddhisme, l'écriture chinoise…Le coréen est selon notre visiteur, aime être dans l'emportement, tout chez lui est dans la frénésie de l'instant, ils sont aussi bagarreur, ils se chamaillent souvent, d'une nervosité à fleur de peau, mais ils sont travailleurs. L'homme doit pouvoir pleurer sans être moqué de cette faiblesse dans d'autres sociétés, au contraire c'est une force, une marque de confiance pour les coréens, ils seront traités de « vauriens », s'ils se cachent ou ne pleurent pas, la primeur aux larmes n'est pas exclusive aux faibles et n'entache pas la virilité d'un homme, la sensibilité est humaine, je dois avoir des gènes Coréens. Au-delà du caractère, Nicolas Bouvier nous gratifie de petits anecdotes sur la façon d'être des Coréens, comme de mettre un doigt dans l'oreille d'un inconnu, comme l'a pu le constater notre voyageur, pour vérifier la teneur du cérumen, une pratique bien familière comme le souligne l'auteur, il y a aussi le Dieu du Pet, ce pays est totalement à l'opposé de Nadine de Rothschild avec son savoir vivre asservissant et ridicule de petite bourgeoisie démodée. le pet donnant naissance à cette Île Quelpaert, où notre auteur donne quelque notion de sa découverte, une quête historique remontant au XVII e siècle, cette naissance de l'île n'est pas « scabreuse » pour ces coréens, pour eux , je cite Nicolas Bouvier :
« Les traditions extrême-orientales n'ont jamais humilié le corps et ses fonctions, elles les ont plutôt considérés comme compagnons de travail ou de plaisir qu'il faut traiter avec égards, voire, comme dans l'Inde tantrique, comme instrument de connaissance spirituelle »
J'aime que le corps d'humain et ses fonctions ne soit pas cachés par des politesses niant celle-ci par du puritanisme d'un savoir vivre d'une époque perdue dans les abimes de l'oubli.
Nicolas Bouvier laisse la suite de son voyage dans une excursion journalière, en compagnie de sa compagne, arpentant les sentiers de ce volcan Halla-san, constituant l'île, sa narration est précise au fil du temps, avec comme souvent des petits faits historiques habillant la légende du lieu. Cette excursion éprouvante marque notre auteur pour un plaisir certain, cette exaltation est catalysée par l'adversité, il aura cette phrase belle de sens et de poésie :
« Si on ne laisse pas au voyage le droit de nous détruire un peu, autant rester chez soi. »
Le dernier récit du livre se déroule dans le coeur de la Chine à Xian, je n'ai pas trop accroché à cette visite guidée par ce Monsieur X, cette Chine de paradoxe, le passage du deuil est une tradition différente que celle occidentale, où, la mort est cachée, comme si la vie et la mort n'était pas liées, en Chine la mort est visible par la festivité de la cérémonie, celle rencontrée par notre globetrotteur, est ce cortège féerique avec ce dragon, pour une fin heureuse que célèbrent les vivants à ce mort.
Les trois textes sont de valeurs inégales, le premier est enthousiasmant, l'Irlande nous accueille de sa sauvagerie de son paysage et des us et traditions qui la rendent énigmatique et mystérieuse. le deuxième, nous présente le peuple de la Corée et de ces habitants, avec beaucoup d'humour, et le dernier sur Xian et cette Chine est peu attractif et trop court. Nicolas Bouvier est un voyeur littéraire qui vous emporte dans des récits complets pour vous aspirer dans ces pays et vous faire voyager à votre tour tout en découvrant l'histoire et des petits légendes et traditions, bon voyage à vous.
Commenter  J’apprécie          60



Ont apprécié cette critique (6)voir plus




{* *}