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Critique de ODP31


« L'amour est aveugle »… Pas forcément le lecteur.
Je ne pense pas que l'auteur et l'éditeur soient partis une semaine en séminaire pour trouver le titre de ce roman. Ils ont dû se contenter de prendre une bière à notre santé au troquet des lieux communs. Avec l'usure du temps et son usage dans le langage courant, cette locution (d'origine shakespearienne tout de même ! ) a perdu une grande partie de sa poésie. le sous-titre, « le ravissement de Brodie Moncur », alourdit encore le blason.
Si l'auteur n'avait pas été l'immense William Boyd, je pense que j'aurai boycotté cette lecture.
Pour rester dans le registre des expressions toutes faites à haute valeur ajoutée, je dirai que ce roman m'a laissé une impression mi-figue mi-raisin.
Côté figue, un premier tiers du livre assez ennuyeux. Brodie, un jeune accordeur de piano écossais très talentueux découvre Paris à l'aube du 20ème siècle. Il se met au service d'un virtuose vieillissant qui vit avec son frère, agent fourbe et machiavélique, et Lika, une ravissante compagne russe, chanteuse sans grand talent. Sans surprise, le jeune accordeur entame une liaison passionnée avec Lika.
Pour tomber encore un peu plus dans le mélodrame convenu, Brodie découvre qu'il est atteint de Tuberculose… Ah, les héros de romans situés à cette époque avaient décidément les poumons bien fragiles. Les sanatoriums devaient sponsoriser les écrivains pour générer une telle hécatombe.
J'ai également trouvé que les personnages étaient trop effacés, trop effleurés, plus creusés à la petite cuillère qu'au tractopelle. William Boyd est un romancier de l'action, un conteur imaginatif, très à son aise dans les récits tissés sur fond d'espionnage. Il suffit de relire plusieurs de ses derniers romans pour s'en convaincre ( « La vie aux aguets », « l'attente de l'aube », « les vies multiples d'Amory Clay »…). Ce n'est pas pour rien si les descendants de Ian Flemming lui avaient confié l'écriture d'une aventure de 007 (« Solo »).
Je l'ai donc senti moins à son aise dans cette histoire surannée d'amour impossible et les relations troubles suggérées entre le pianiste, son frère Malachi et Lika, auraient mérité une place plus importante dans le roman.
Côté raisin, William Boyd demeure un grand romancier et je me suis laissé peu à peu embarquer dans l'histoire. Brodie suit le virtuose dans une tournée à Saint-Pétersbourg avant de fuir avec sa belle. La partie Russe du roman compense à elle seule le démarrage un peu toussoteux…si j'ose dire. William Boyd y semble habité par l'âme russe et squatté par ses grands auteurs, notamment Tchekov, cité à plusieurs reprises. Les sentiments sont voraces et les réactions démesurées. le roman prend vie.
Obligé de fuir, l'auteur nous fait ensuite traverser l'Europe et il dépeint de façon très réaliste et documentée les villes étapes à cette période. La qualité des dialogues (Boyd est également un grand scénariste) permet d'éviter au récit de tomber dans le circuit touristique, façon guide vert littéraire. le roman se termine avec une touche exotique et décalée dans les îles Andaman-et-Nicobar.
Au final, un bon moment de lecture mais un roman selon moi mineur dans l'oeuvre de William Boyd. Qu'il retrouve vite ses espions.

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