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Critique de Colchik


Que peut-on demander à un roman sinon d'être romanesque ? C'est la première qualité des livres de William Boyd, son talent de conteur me réjouit. Ici, il nous embarque pour un voyage au long cours en nous déroulant les fils, parfois très emmêlés, de l'existence de John James Todd. Si je ne me trompe, John James signifie Jean-Jacques en anglais. En effet, le héros de Boyd découvrira le sens de son existence en même temps que Les Confessions de J-J Rousseau et toute sa vie sera placée sous une quête quasi obsessionnelle : transposer à l'écran l'ouvrage de l'honnête homme.
Pourtant, au départ, rien ne prédispose le jeune Todd au cinéma sinon une certaine capacité à la rêverie (on retrouve ici Rousseau) et un caractère réfractaire à l'enseignement académique tel qu'il est dispensé au début du vingtième siècle, dans les écoles écossaises. Orphelin de mère à la naissance, il est élevé par une servante aimante, mais fruste, et ne suscite que rarement l'intérêt de son père, sauf pour ses expérimentations hygiénistes, ou l'affection de son frère Thompson, un sinistre crétin. Enfant timide et solitaire, il se transforme en adolescent maladroit dont l'imagination cavalcade, ce qui ne va pas sans lui créer des problèmes. Ainsi, il se persuade que Donald Verulam, un ami de sa mère, était l'amant de celle-ci et qu'il est, par conséquent, son vrai père. de même, il s'entiche de sa tante et tente de la séduire en exhibant sa virilité. Ses méprises à répétition l'amène à un engagement précoce dans la première guerre mondiale. La guerre, si horrible soit-elle, lui permet de découvrir les trois pivots autour desquels s'organisera son destin : le travail cinématographique, Les Confessions de Jean-Jacques Rousseau et Karl-Heinz Kornfeld, geôlier complaisant et comédien dans le civil.
Il n'est pas toujours facile de mener à bien une oeuvre et la route est souvent semée d'embûches. La carrière cinématographique de Todd, amorcée dans l'armée sous l'égide de Donald Verulam, l'a conduit dans une prison à Weilberg, puis à Mayence. La démobilisation en fait un jeune cinéaste à succès commerciaux jusqu'à la faillite de la société de production qui l'emploie. le départ pour Berlin, les retrouvailles avec Karl-Heinz, la rencontre des Lodokian père et fils et le coup de foudre pour l'actrice Doon Bogan permettent à Todd de relancer son grand projet cinématographique. Mais la célébrité ne protège pas des aléas de la vie : son mariage bat de l'aile, son second fils meurt et si la sortie de la première partie des Confessions est un succès d'estime, le cinéma muet est bien mort et enterré avec l'arrivée du parlant. Dans une Allemagne crépusculaire que les intellectuels commencent à fuir, Todd voit son entreprise peu à peu sombrer. Il est abandonné par sa femme Sonia, délaissé par Doon et rançonné par son producteur aux abois. Après un séjour désastreux à Londres, une retraite en Écosse, il se décide à rejoindre la Californie.
Qui aurait prédit à Todd qu'il tournerait un jour des westerns et commencerait une nouvelle carrière aux États-Unis ? Encore une fois, de nombreux obstacles vont se dresser devant lui au moment où s'engage une chasse aux sorcières avec l'épisode dramatique du maccarthysme.
Nous le voyons, les épreuves qu'affrontent le héros de William Boyd sont nombreuses et aucun coup du sort ne lui est épargné. L'individu pèse peu face à l'adversité, cependant le courage et quelques règles de survie lui permettent de ne pas sombrer. L'auteur nous le dit avec humour et un certain panache, ce qui nous rend Todd si attachant. Ce gros livre peut se lire comme une épopée, à la croisée du conte philosophique et du roman picaresque.
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