AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations sur Le secret de Tristan Sadler (14)

Les semaines passent, on avance on s'arrête, on tire au fusil, on balance nos grenades, et rien ne semble jamais changer. Un jour on nous dit que notre ligne de front progresse bien et qu'il n'y en aura plus pour longtemps, mais le lendemain ont nous dit que l'avenir est sombre et qu'il faut se préparer au pire. Mon corps ne m'appartient plus : les poux ont accepté d'en partager la jouissance avec les rats et la vermine, qui me grignotent à l'envi. Je me console en pensant qu'après tout ce sont eux les maîtres des lieux, et moi l'envahisseur. Quand, au réveil, je découvre un de ces parasites en train de me mordiller le haut du corps, frétillant du nez et des moustaches avant de lancer l'assaut, je ne bondis plus en l'air en poussant des hurlements : je me contente de l'écarter du revers de la main, comme je le ferais d'une mouche importune dans le parc Saint-James. C'est la norme à présent et je lui accorde peu d'attention ; au lieu de ça je respecte ma routine, qui consiste à rester à mon poste ;
tenir la ligne de front ; monter à l'attaque quand vient mon tour de risquer ma vie ; manger quand je peux ; fermer les yeux et essayer de trouver le sommeil ; laisser passer les mois, en me disant qu'un jour, soit tout sera achevé, soit ce sera moi qui le serai.
Commenter  J’apprécie          440
Il saisit mon visage entre ses mains et m'attire à lui.
Quand, dans mes moments d'oisiveté, je m'étais imaginé une telle scène, j'avais toujours supposé que les choses se passeraient dans l'autre sens : que ce serait moi qui irais vers lui, et qu'il se dégagerait de mon étreinte en me traitant de dégénéré ou de faux jeton. Mais là, je ne suis ni choqué, ni étonné de son initiative, et je n'éprouve rien qui ressemble à de la précipitation, contrairement à ce que j'avais envisagé - au cas où ce moment surviendrait jamais. Au lieu de cela, tout me paraît parfaitement naturel, tout ce qu'il me fait, tout ce qu'il consent à laisser se produire entre nous.
Et, pour la première fois, depuis ce funeste après-midi où mon père m'avait quasi battu à mort, j'ai l'impression de me sentir en paix avec moi-même.
Commenter  J’apprécie          212
[...] tu es un réfractaire... Et je suis sûr que tu penses que n'importe quoi peut se justifier, à condition de trouver un terme respectable pour le définir. Mais c'est faux !
Commenter  J’apprécie          60
Le pub et la chapelle : tels sont mes deux endroits, antinomiques, d'oisiveté. L'un, social et grouillant de vie, l'autre paisible et funèbre. Mais il y a quelque chose d'apaisant pour l'esprit à se reposer sur le banc d'une belle église ; à s'imprégner de son atmosphère froide, odorante de siècles d'encens et de cierges brûlés ; à observer ces voûtes si élevées qui vous font sentir minuscule face au vaste plan de l'univers, aux oeuvres d'art, aux frises, aux autels de bois sculpté, aux statues dont les bras se tendent comme embrasser celui qui les observe ; et à savourer le moment inattendu où, venu d'en haut, le chant soudain d'une chorale répétant ses matines vous élève l'âme, la libérant du désespoir qui l'avait entravée, et qui vous avait amené à pénétrer en ce lieu.
Commenter  J’apprécie          50
- Vous n'allez pas mourir, Tristan.
- J'ai quatre-vingt-un-ans, lui rappelai-je. J'admire votre optimisme mais, même vous, Leavitt, vous devez reconnaître que c'est de l'ordre du possible.
Commenter  J’apprécie          40
Par bonheur la pluie a cessé de tomber. Les parois des tranchées tiennent bien, et se solidifient à nouveau ; les sacs de sable sont empilés, souillés de boue, là où nous les avons entassés la veille. Je suis de faction dans vingt minutes et, si je me dépêche, j'arriverai à la cantine à temps pour avaler un thé et un peu de corned-beef avant de reprendre mon poste. En chemin, je croise Shields, qui est dans un sale état. Il a l'oeil droit au beurre noir, et une traînée de sang séché court le long de sa tempe. Elle ressemble au cours de la Tamise : du côté de son sourcil, elle fait une boucle vers le sud, en direction de Greenwich Pier, puis elle remonte vers le nord, au niveau du front, pour filer vers le pont de Londres, avant de s'enfoncer dans les profondeurs de Blackfriars, parmi la broussaille de sa chevelure pouilleuse. Je ne fais aucun commentaire ; il n'y en a pas un seul qui ait un aspect normal ces temps-ci.
Commenter  J’apprécie          20
- Tu n'aimes pas la guerre, c'est ça ?
- Personne ne devrait l'aimer, Sadler, me répond Wolf. Je ne peux pas croire que quiconque puisse vraiment aimer la guerre, à l'exception, peut-être, du sergent Clayton. Lui, il semble s'en délecter. Non, je pense tout simplement qu'il n'est pas juste d'ôter la vie à autrui de sang-froid. [...] qu'est-ce-que j'ai contre un pauvre gamin allemand qu'on a traîné loin de Berlin, de Francfort ou de Düsseldorf pour qu'il se batte au nom de sa patrie ? Qu'est-ce qu'il a, lui, contre moi ? C'est vrai, il y a des problèmes en jeu, des problèmes politiques, territoriaux, qui ont causé cette guerre, et il y a de bonnes raisons de se plaindre, je vous l'accorde. Mais il y a aussi un art qui s'appelle la diplomatie, un concept qui implique que des individus sensés s'installent autour d'une table pour tenter d'y résoudre les problèmes. Je ne pense pas que toutes ces voies aient été encore explorées. Au lieu de quoi, on ne fait que s'entre-tuer jour après jour.
Commenter  J’apprécie          20
Au fil des années, penché sur des tables bancales et tachées de bière, j’ai passé maintes heures à lire et à écrire dans des pubs, à y déchiqueter des sous-bocks tout en hissant mes personnages de la misère à la gloire ou, inversement, en les précipitant de la vie de château au caniveau. Seul, toujours seul. Sans boire beaucoup, mais un peu tout de même. Une cigarette dans la main droite, une tache de brûlure sur ma manchette gauche.
Commenter  J’apprécie          20
Je suis un peu surpris par ses paroles, mais je n'y accorde guère d'importance ; je n'imagine pas un seul instant que Wolf s'est enfui.
Commenter  J’apprécie          20
- J'ai parfois du mal à comprendre ce qui se passe dans le monde, monsieur Sadler, me dit-elle, sa voix se brisant un peu. Vos parents ont un fils qui est en vie, mais qu'ils ne voient pas. J'ai un fils que je souhaite voir, mais il est mort. A quelle espèce appartiennent-ils, je me le demande ? Sont-ils des monstres ?
Commenter  J’apprécie          20






    Lecteurs (241) Voir plus



    Quiz Voir plus

    Le garçon en pyjama rayé.

    La soeur de Bruno est...

    ' Une source d'ennuis '
    ' Le bazar continu '
    ' Un cas désespéré '

    6 questions
    92 lecteurs ont répondu
    Thème : Le garçon en pyjama rayé de John BoyneCréer un quiz sur ce livre

    {* *}