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Critique de Henri-l-oiseleur


Nous nous retrouvons sur le site Babelio entre consommateurs de produits culturels imprimés, des livres, et le secteur économique que nous
faisons vivre est chaque jour matraqué par une inlassable propagande. Selon les termes de cette propagande, on n'écrit de livres que pour promouvoir ceci (une abstraction molle, en général) ou dénoncer cela (une autre abstraction molle, comme "la haine") : les figures du publicitaire et du militant se confondent pour nous avec celle de l'artiste. Aussi n'est-il pas étonnant que nous cherchions dans le livre de William S. Burroughs ou une apologie de la drogue, ou une dénonciation de la drogue, puisque l'univers où nous vivons retentit d'apologies et de dénonciations : notre univers est juridique, peuplé de mouchards, de policiers (on écrit même des romans sur eux), d'avocats et de procureurs. Parallèlement, le monde de "Junky" est aussi plein de flics, justement, d'avocats et de médecins inquisiteurs, parmi lesquels évoluent les drogués. Se demander s'ils sont bons ou méchants, c'est faire preuve de sottise, de soumission intellectuelle aux bateleurs du moment : chez Burroughs personne n'est bon ni méchant, car l'univers du livre est construit comme le nôtre sur des lois impersonnelles, pénales ou physiologiques (le manque, le sevrage, la satisfaction). Devant cet univers romanesque où la morale n'a aucune place, le lecteur, s'il veut vraiment lire le livre, doit suspendre son jugement moral. Il ne doit même pas essayer de justifier les drogués au nom du plaisir qu'ils prennent à leur drogue : Burroughs rejette catégoriquement cette excuse hédoniste soixante-huitarde, comme toutes les autres. "Le plaisir qu'on tire de la came est de vivre sous sa loi", écrit-il. N'opposons pas puérilement les méchants policiers aux gentils hors-la-loi qui se révoltent en se droguant contre un ordre social injuste et puritain, nous dit Burroughs : chacun vit sous sa loi propre et tire son bonheur de lui obéir. C'est tout.
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