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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Whaou....
Rarement, je suis surprise lorsque je lis un livre, souvent je lis des critiques avant, j'ai vu que le roman allait paraître, j'ai entendu parler de l'auteur, mais là, rien ... Je l'ai juste pris parce que pour un challenge, j'avais besoin d'un roman classé SF ou fantastique et qu'il était disponible sur une étagère de ma médiathèque..
Sorti en 1979 aux USA, il est disponible désormais en France aux Editions du Diable Vauvert et l'histoire est d'une originalité folle ; mais quelle bonne idée !
On est en 1979 à New York.
Contre l'avis de leurs familles respectives, Dana (jeune femme noire) et Kevin (jeune homme blanc ) sont mariés. Ils se sont connus dans une entreprise, où chacun exerçait un job alimentaire. Kevin et Dana veulent tous les deux devenir écrivains, mais Kevin a une longueur d'avance, il a déjà été publié. le 9 juin, chez elle, tout d'un coup, Dana est prise de vertige et elle se volatilise littéralement sous les yeux de Kevin, elle atterrit en 1815 dans le Maryland, berceau de ses ancêtres, dans la plantation où ils vivaient. Elle porte secours à un petit garçon Rufus, le fils du Maître des lieux, et toute sa vie se verra "appelée" à chaque fois que la vie de ce garçon est en jeu. Pour eux, les années passent implacables, mais pour elle, il s'agit juste de quelques heures ou de quelques jours, par contre, elle ne maîtrise ni ses "venues" , ni ses retours".
Propulsée dans une Amérique esclavagiste, obligée de part sa couleur, de "vivre l'esclavage de l'intérieur", contemplant la bestialité des hommes blancs , Dana souvent dans la révolte n'a pas d'autre choix que d'accepter, de composer d'autant que si elle fait quelque chose, ses ancêtres ne pourraient bien ne jamais voir le jour , et donc elle aussi..
Comme je le disais, c'est une super bonne idée que de placer un personnage "contemporain" , au XIX°siècle, avec son regard forcément plus instruit, plus féministe, plus libre. Dana c'est nous, c'est moi, c'est vous ... Et à travers ses yeux , on contemple médusé cette Amérique esclavagiste. On a beau SAVOIR, le vivre comme cela , provoque des réactions bien plus fortes et révoltées que de lire la même chose dans un livre d'histoire, d'autant que la narration est toute en finesse, nuances, gradations, et subtilité.
Un roman édifiant, instructif, révoltant, sacrément bien fichu ; et bon sang , quelle p.....de sacrée bonne idée !
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"J'ai perdu un bras en rentrant de mon dernier voyage. le bras gauche."
Pouvez-vous imaginer incipit plus alléchant ?
Dana et Kevin sont un couple des années 70, ils viennent d'emménager en Californie, ils sont tous deux écrivains. C'est un couple d'intellectuels, amoureux, égalitaires.
Le seul hic est le rejet par leurs familles respectives : car Kevin est blanc et Dana noire.
Par un tour de passe-passe littéraire – qui importe peu, mais est tout de même rudement bien trouvé – tous deux se retrouvent plongés dans le passé : plus précisément dans une plantation du Maryland, en 1815.
Dans un monde où être noire signifie : être esclave.
Les rapports de pouvoir auxquels ils se retrouvent confrontés, Butler les décortique d'une façon époustouflante.
Son écriture sobre, sans fioriture ni temps mort, m'a suspendue haletante jusqu'à la dernière page.
J'avais lu les deux "Paraboles" de Butler à leur sortie, et j'étais restée sous le choc. Celui-ci m'a paru légèrement en-dessous mais m'a soufflée tout de même.
(Et voilà où s'arrêtait le premier jet de mon avis.
Puis je suis allée lire les autres critiques, notamment celle de juten-doji, celle de Stoffia qui explique le contexte politique qui m'avait échappé, et celle d'Iris29 sous laquelle un commentaire conseille une biographie de Butler en vidéo très bien fichue. Merci les camarades.)

Traduction impeccable de Nadine Gassié et Jessica Shapiro.

Challenge USA : un livre, un État (Maryland)
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Un excellent livre qui mériterait une nouvelle traduction.

On y suit une femme noire de notre époque qui se retrouve catapultée au hasard au travers la vie de ses ancêtres, sur une plantation du sud des États-Unis. C'est un portrait extrêmement réaliste et recherché de l'esclave que trace Octavia Butler.

L'époque de la rédaction du roman date de l'essor du Black Panthers Party aux USA. Dans le langage militant de l'époque, on y référait souvent aux "Nanny" comme des traitres. Ces femmes qui réussissent à quitter les champs de cotton pour aller s'occuper des enfants des esclavagistes et des corvées dans le "confort" de la maison (toujours en tant qu'esclaves). le sous-entendu est qu'elle ont "grimpé" la triste hiérarchie de l'esclavage en dénonçant ses collègues et en se positionnant du côté des maîtres.

C'est ce cliché que Butler cherche à dénoncer dans ce livre. En montrant que cette tension est consciemment utilisée par les maîtres pour diviser les esclaves, et que la nanny était loin d'être privilégiée.

(À la sortie du livre, les Black Panthers ont d'ailleurs révisé leur matériel pour y intégrer cette complexité.)

Le roman explore aussi la relation entre la protagoniste et son conjoint. Ce dernier (un blanc) se montrant peut moins ouvert d'esprit qu'elle le croyait lorsqu'il se retrouve coincé avec elle dans la plantation du 19e siècle.
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Ayant appris que le Bifrost n°108 allait avoir pour autrice centrale Octavia E. Butler, je me suis aperçu que je connaissais à peine le nom de cette femme et que je n'avais rien lu d'elle. Il était donc urgent pour moi de combler cette lacune. J'ai décidé de commencer par un de ses principaux romans, récemment réédité dans une traduction remise au goût du jour par les éditions Au Diable Vauvert. Liens de sang imagine, en 1979, l'histoire d'une femme, noire, qui voyage malgré elle dans le passé. Et se retrouve dans le sud de 1815, quand l'esclavage était la norme.

Pour la narratrice et pour le lecteur que je suis. Dès le début du roman, à peine avons-nous l'occasion de découvrir Dana, jeune femme noire, donc, mariée à un blanc, Kevin, qu'elle ressent un malaise. Sans comprendre ce qui lui arrive, elle se retrouve dans un état du Sud des États-Unis où l'esclavage est encore légal. Elle sauve un jeune garçon qui était en train de se noyer. Comme elle est noire et que le petit est blanc, les adultes présents la menacent. Un homme pointe même un fusil vers elle. Et aussitôt, elle retourne dans son présent. C'est le début d'une série d'allers et retours entre le XXe et le XIXe siècle. Peu à peu, Dana va comprendre, sinon le mode fonctionnement de ses voyages, du moins les déclencheurs. Elle semble liée à ce jeune garçon dont elle va rapidement découvrir qu'il s'agit de Rufus, un de ses ancêtres. Un fils de propriétaire terrien possédant des esclaves. Et n'hésitant pas à les punir quand il le considère nécessaire, le fouet claquant contre les peaux nues. Mais comment tout cela peut-il finir ? Et comment Dana va-t-elle survivre à cette période, elle qui n'a pas la bonne couleur de peau pour circuler sans risque, pour ne serait-ce qu'exister sans risque ?

Je tiens à préciser que si je n'avais pas regardé la date de publication originale du roman, je ne me serais sans doute pas douté qu'il était si ancien (plus de quarante ans, ce n'est pas rien en SF), tellement le discours est moderne. Même si le fait qu'Octavia E. Butler ait placé le quotidien de Dana en 1979, sans que cela influe en rien sur l'histoire, est un indice flagrant. Car le présent de Dana n'est quasiment pas décrit. Ce n'est absolument pas l'intérêt principal du roman. L'autrice veut nous montrer l'opposition évidente entre la vie pour une femme (et j'insiste bien sur « femme », car outre le racisme, ce récit dénonce également le sexisme) au XXe siècle et une autre, presque forcément esclave (car il existe quelques femmes noires libres, mais le pourcentage doit être minime) au XIXe siècle. La première peut choisir de vivre seule ou avec un homme, qu'il soit noir ou blanc. Alors, bien sûr, Octavia E. Butler ne joue pas la carte de l'optimisme béat. Elle évoque les difficultés du couple mixte avec les familles respectives. Racisme chez les blancs comme chez les noirs. Avec des arguments tellement stéréotypés que c'en est à pleurer. Et ce, d'autant que de nos jours, certains de ces arguments nous sont encore resservis avec la même conviction dans la voix. Infériorité des races d'un côté ; trahison de ses origines de l'autre.
La deuxième est donc nécessairement une esclave. Donc un objet ou un animal, au choix. Les propriétaires de ces « choses » peuvent les vendre, les accoupler, les violer, les frapper pour les dresser. Surtout les femmes, qui n'ont pas d'autre choix que d'obéir si elles veulent éviter le fouet. Et bien sûr, obéir est parfois synonyme de se laisser violer. Quotidiennement. Jusqu'à faire des enfants à leur maître. Même si cela leur donne envie de vomir. Même si cela leur donne envie de mourir. Mais il faut continuer à vivre. le quotidien de la ferme, avec cet ordre des choses établi et accepté par toutes et tous, ou presque, est effarant. Et là encore, l'autrice ne se montre pas manichéenne. Elle s'interroge sur les raisons pour lesquelles les gens acceptaient, dans leur immense majorité, cet état de fait. Et je dois avouer qu'après la lecture de Liens de sang, je comprends bien mieux ce mécanisme atroce qui amène à la survie d'un tel système. Tout cela est d'une grande force et d'une grande finesse. Tout en étant extrêmement agréable à lire.

Car Octavia E. Butler se montre d'une grande efficacité dans la construction de ce récit. le rythme varie selon les périodes : rapide, au début, pour nous permettre de prendre pied dans l'action sans trainer, avec des chapitres brefs. Et les parties qui s'allongent progressivement, à mesure que Dana comprend ce qui lui arrive, qu'elle s'intègre dans ce XIXe siècle si dur, mais si intense, à tel point qu'elle finit presque par le considérer comme son « chez soi ». de plus, les trames narratives s'entrelacent et s'enrichissent, sans pourtant se montrer complexes. Ce roman est facile à lire (je ne parle pas du fond, qui est pesant, car les thèmes abordés sont cruels) : les personnages sont suffisamment caractérisés pour que l'on ne s'emmêle pas les pinceaux ; les évènements se succèdent à un rythme plaisant et efficace.
J'ai d'ailleurs, à la lecture de Liens de sang, rapidement pensé au superbe, mais tout aussi terrifiant Nickel Boys de Colson Whitehead. Terrifiant car lui aussi a su retranscrire dans sa prose l'horreur de ces situations quotidiennes de personnes jugées inférieures à d'autres et donc obligées d'obéir en tout à l'autre. Même si c'est un parfait abruti. Ou un sadique. Ou un connard fini. Et avoir une autre preuve de la monstruosité potentielle de l'humain (je sais, je sais, on en a tous les jours) n'est pas réjouissant. Et pourtant, la lecture de ces deux romans est un plaisir. Car dans les deux cas, les auteurs sont parvenus à nous faire vivre ces époques, à nous faire aimer ces personnages. Et donc à souffrir avec eux.

Pour un coup d'essai, c'est un coup de maitre : ma première lecture d'Octavia E. Butler m'a convaincu de poursuivre dans cette voie. Liens de sang m'a enchanté par sa narration et, surtout, par la force de ses personnages : Dana, bien sûr, mais aussi Alice, l'esclave favorite de Rufus, l'ancêtre de Dana. Personnages forts, mais pas stéréotypés. Période cruelle, mais qui évite les clichés. Octavia E. Butler a su dépeindre des réalités sans pitié en finesse, sans les facilités d'usage. Avec le souci de comprendre et de faire comprendre, de partager des interrogations et de tenter d'y répondre. Un magnifique roman, vraiment.
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Quelle belle découverte !
L'histoire est envoutante et nous emporte avec Dana à chaque fois qu'elle voyage.
On s'attache aux personnages, on vit avec eux, et bien-sur, on souffre avec eux. Chacun est composé de nuances bonnes ou mauvaises, ce sont des vrais humains avec des réactions parfaitement adaptées aux situations. Sauf Dana qui a un peu trop tendance à pardonner à Rufus, jusqu'au final.
Bref, un excellent moment de lecture. J'ai vu qu'il y a une série d'après ce livre. Je vais vite la regarder pour voir ce que ça donne car j'avoue que j'ai un peu de mal à quitter Dana.
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Alors qu'elle vient de s'installer en Californie, Dana, jeune femme noire de vingt-six ans, est victime d'un malaise. Elle disparaît brusquement de son appartement, sous les yeux de Kevin, son mari, et lorsqu'elle réapparaît, peu de temps après, elle est couverte de boue, et raconte une histoire extraordinaire. Ce phénomène va se reproduire (pas avec de la boue à chaque fois !). Dana se rend compte qu'elle est propulsée dans le Maryland dans les années 1810 puis 1820, auprès de Rufus, un de ses ancêtres, qu'elle sauve à chaque fois d'une mort certaine. Première surprise, cet aïeul est un jeune garçon blanc aux cheveux roux, de la famille d'un propriétaire esclavagiste. Comme Dana connaît quelque peu sa généalogie par un arbre succinct en marge d'une bible familiale, elle connaît aussi le nom de la femme qui va devenir la mère de l'enfant de Rufus. Au fur et à mesure de ses « visites », elle va presque devenir un membre à part entière de la maisonnée, sans toutefois vouloir influer sur le futur, futur qui inclue sa propre naissance…

Débarquer en tant que femme de couleur dans le contexte d'une plantation ne va pas se faire sans difficultés, bien sûr, et le roman est vraiment astucieux, parce que ce voyage temporel a des particularités qui vont relancer sans cesse le suspense. Ce qui en soit est déjà passionnant, mais s'y ajoutent des observations sur l'esclavage et la manière dont il est ressenti par les esclaves eux-mêmes, un point de vue pas si souvent évoqué… de touriste, en quelque sorte, Dana devient au fil de ses voyages totalement sous l'emprise d'un système bien rodé pour éviter toute tentative de rébellion. Comme le dit Dana : « J'avais craint de trop garder mes distances avec cette époque étrangère. Désormais, il n'y avait plus aucune distance. Quand avais-je cessé de jouer un personnage ? Et pourquoi ? »
N'étant pas trop lectrice de romans classés science-fiction, je n'aurais jamais repéré cette publication récente sans les billets d'A girl from earth et de Keisha. Une commande à la bibliothèque du département et quelques semaines d'attente m'ont permis de les suivre dans cette lecture qui sort complètement des sentiers battus.
A certains moments, les faits m'ont évoqué Underground railroad de Colson Whitehead, ou d'autres lectures sur le même sujet, mais en gardant toujours sa singularité. J'ai noté que quelques répliques émanant de personnages de 1819 sonnaient de manière un peu moderne, mais c'est un bien petit bémol pour un roman à la construction parfaite et aux sujets de réflexion passionnants, écrit dans les années 70, mais toujours très moderne.
C'est une lecture comme je les aime, qui explore le passé avec un regard pénétrant et qui provoque l'émotion sans la forcer.
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Grâce à la très belle critique d'Isacom, j'ai eu un véritable coup de coeur pour ce roman et son autrice. Dès la première phrase on est littéralement aspiré par le suspense. Octavia E. Butler a réussi à écrire une histoire qui vous tient en haleine jusqu'à la dernière page, tout en abordant le thème douloureux de l'esclavage. Elle n'épargne pas son héroïne, qui va subir les pires atrocités dans le Maryland esclavagiste du 19e siècle. J'ai beaucoup apprécié la plume d'Octavia E. Butler, ce qui m'a donné envie de découvrir le reste de son oeuvre.
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Après le coup de coeur qu'a été L'aube d'Octavia Butler, je voulais continuer à découvrir les oeuvres de cette autrice culte de la SF qui commence tout juste à regagner en popularité en France. Liens de sang est l'un de ses romans les plus connus. Il est sans doute celui qui aborde de manière la plus frontale les rapports entre noirs et blancs. J'ai eu l'occasion de découvrir ce roman en VO.

Ce qui frappe rapidement, c'est l'usage intelligent du trope du retour dans le temps, mais pour présenter une histoire intime où la filiation joue un rôle central. Octavia Butler n'explique pas le fonctionnement des retours dans le temps de Dana, ce qui ajoute une ambiance anxiogène. Quand va-t-elle apparaître ? On sait juste que le déclencheur a de fortes chances de mettre le personnage principal en grand danger. Un danger immédiat. Mais Dana étant noire, elle doit également prêter une intention démultipliée à son comportement pour éviter les punitions qui échouent aux esclaves jugés comme désobéissants.

Loin d'édulcorer l'horreur de l'esclavage, les voyages de Dana permettent d'éprouver avec elle la vie des esclaves. Et encore, son lien avec Rufus Weylin, fils unique du chef de la plantation, lui permet d'échapper à la plupart des traitements brutaux que reçoivent les noirs. Ce lien met également à rude épreuve la moralité de la jeune femme, qui se retrouve tiraillée entre deux mondes, comme lui rappellent certains personnages. Mais sa couleur de peau fait qu'elle est en danger de manière permanente. Ainsi, elle doit prendre mille précautions pour éviter de déchaîner les foudres des Weylin, notamment de Margaret Weylin, femme profondément instable émotionnellement.

Octavia Butler est définitivement une autrice que j'adore. Elle met en scène ici des personnages d'une grande subtilité. Comme Dana est mariée à un blanc et qu'elle a un lien avec Rufus, les rapports entre personnes noires et blanches apparaissent comme très complexes et donnent beaucoup de nuances dans les réflexions. En effet, les personnages sont rarement totalement bons ou mauvais. L'écriture d'Octavia Butler les rend vivants, haïssables comme touchants selon les moments, avec une fin qui laisse planer le doute.

Liens de sang nous permet cependant d'en apprendre plus sur le contexte historique. Les réflexions de Rufus, notamment plus jeune, montrent à quel point il est difficile de sortir des carcans dans lesquels on a été élevés. de la même façon, Dana relève en regardant de jeunes enfants noirs jouer à quel point ils sont conditionnés à devenir des esclaves. Même la situation des personnes de couleur libres est fragile, puisqu'elles sont harcelées et que la plupart des Maîtres n'attendent que la première occasion pour les entraver.

L'autrice aborde avec finesse les relations complexes entre noirs et blancs à travers les voyages temporels de l'héroïne, Dana. L'usage astucieux du retour dans le temps crée une tension palpable, renforcée par l'absence d'explications détaillées, ajoutant une dimension anxiogène à l'histoire. La subtilité des personnages, confrontés aux horreurs de l'esclavage et pris entre deux mondes, offre une profondeur et des nuances qui contribuent à la richesse narrative. Octavia Butler excelle dans la représentation de la complexité humaine, évitant la simplification des personnages en bons ou mauvais.
Lien : https://lageekosophe.com/202..
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Seconde lecture pour moi d'une oeuvre d'Octavia Butler, et c'est un nouveau succès dans mon petit coeur de lectrice.

Nous suivons ici le destin étrange de Dana, femme noire mariée à un blanc dans les années 70, et qui se retrouve propulsée à une époque où l'esclavage fait rage et est le quotidien normal et accepté de la plupart.
Ses voyages dans le temps semblent dictés par un lien très fort qui l'unit à un enfant dont la vie est régulièrement menacée, et c'est à travers leurs regards que l'on découvre un esclavage subit et non une leçon de livre d'histoire, jugé par des yeux de notre époque et confrontés à ceux qui ne connaissent que ça.
Ici la "science-fiction" ne sert que de prétexte car aucune explication ne nous est fournie quant au phénomène, mais il permet une vision originale sur une époque qui devrait être révolue mais dont beaucoup de choses de nos jours nous rappellent, malheureusement, jusqu'où l'intolérance et le sentiment de supériorité peut mener nos sociétés.

Un livre à conseiller à tous autant pour L Histoire que pour les éléments fantastiques, mais surtout parce qu'il permet de confronter différentes visions sur un thème qui nous est aussi étranger qu'il est encore latent à notre époque.
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Certainement un des meilleurs romans sur l'esclavage! C'est un voyage constant dans l'espace et le temps, presque sans effort. L'élément de science-fiction tend à s'effacer au fur et à mesure de la lecture pour laisser place au réalisme cru du quotidien des esclaves sur la plantation de Tom Weylins dans le Maryland au 19ème siècle. L'écriture est très épurée, pas de grandes métaphores ni d'envolées lyriques. Butler évite tout sentimentalisme et tout discours moralisateur pour laisser le lecteur former son propre jugement.

L'histoire débute dans un contexte contemprain en Californie en 1976. Elle est racontée du point de vue de Dana, une jeune afro-américaine mariée à Kevin, un homme blanc, tous deux en proie avec leurs propres préjugés raciaux. Outre la relation avec Kevin, c'est surtout la relation de Dana avec son ancêtre Rufus qui retient particulièrement l'attention. Jusqu'où doit-elle aller pour protéger cet aieul quand sa propre vie en dépend? Butler montre à quel point l'esclavage est un héritage commun de tous les Américains; il continue à définir leur identité et menace de faire irruption dans le présent. Butler pousse alors la métaphore à son extrême, et ce avec brio.
Un classique à lire absolument.
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