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Critique de fulmar


Une minuscule boîte à livres sur la place d'un petit village où je me suis garé pour faire une balade sur les chemins bocagers.
Maigre choix, mais un Buzzati s'y cache entre deux inconnus. Une édition de 1959, nous sommes presque du même âge, je ne peux résister à emprunter cet ouvrage.
« Barnabo des montagnes », suivi de « Le secret du Bosco Vecchio », aussitôt d'autres mots me reviennent à l'esprit.
Barnabo, ça sonne comme Bargabot, une des suites du Pascalet de « L'enfant et la rivière » d'Henri Bosco.
Bosco, sacrée coïncidence, est-ce que l'écrivain provençal connaissait le secret du Vecchio, ruisseau italien, pays cher à ses origines ?
« Barnabo des montagnes », ça me fait aussi penser à « Gaspard des montagnes », le conte d'Henri Pourrat.
Deux Henri de la même époque, celle également de Dino Buzzati. Les conteurs du Sud montagnard, Luberon, Livradois, Dolomites, lieux envoûtants propices à des découvertes magiques.
Il ne m'en faut pas plus pour délaisser ma lecture actuelle, qui parle aussi de bois - « Lorsque le dernier arbre... » - pour partir en Italie avec le premier roman de l'auteur du désert des Tartares.
J'ai choisi de commencer par « Le secret du Bosco Vecchio », pour rester dans l'ambiance forestière.

Le monde de Buzzati est kafkaïen, plein de détours, carrefour d'espace et de temps, mais aussi intimité avec les choses de la nature.
Car les hommes, des villes surtout, sont méchants à l'égard des éléments. Ils gardent envers eux ce mélange de timidité et de brutalité qui est , au fond, le signe de la peur.
Peur de l'invisible, de l'insolite, de ce qui se cache dans les coins obscurs. Et le surnaturel n'est qu'une autre manière qu'a la nature de se manifester.

Cette histoire est une féerie cocasse, une fable, faite d'émerveillement et d'enchantement.
Les vents ont des noms humains, parlent et obéissent aux hommes qui ont acquis pouvoir sur eux. Une pie récite, avant de mourir, un poème grave et solennel.
Ce récit débouche en plein mystère. Ses éléments burlesques dégagent une intense beauté. On croirait revenir aux origines du monde, où il existait un langage commun aux hommes et aux choses.
Mais le temps dévore les éléments naturels de la même manière que les hommes, les forêts et les vents meurent de vieillesse.
Et le Bosco Vecchio, merveilleuse forêt magique où depuis des siècles on n'avait pas touché à un arbre, est tributaire d'un héritier aux goûts limités qui ferait volontiers tailler de larges coupes si la peur ne le retenait.
Ce citadin ignorant soumet à ses volontés, par la violence et par la ruse, les génies des vents et des arbres. Ce qui montre à quel point la nature peut être faible et désarmée lorsqu'elle est menacée par la méchanceté et la sottise des hommes.
« A quoi me sert la forêt alors ? Tous ces arbres ne me seraient plus d'aucun rapport ? M'en savoir propriétaire serait l'unique satisfaction ? »

Ce texte a presque un siècle, à une époque où on ne parlait pas encore d'écologie, mais il est terriblement d'actualité.

Je garderai de cette lecture le côté fable, qui permet de savoir encore comprendre le langage des arbres, des oiseaux, des fleurs et des vents, et la grande leçon qu'ils donnent. 






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