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Critique de fuji


Alain Cadéo nous livre une pièce de théâtre en trois actes pour revisiter le mythe du Minotaure, créature mi-homme mi-taureau, qu'il faut nourrir afin qu'elle reste tranquille.
Ses deux personnages :
ARSENE dit ARSENIC est râleur, désenchanté, fait des blagues à deux sous.
AZEMA dit Eczéma est un optimiste malicieux, aimant l'aventure (enfin pas trop loin de chez lui), son venin est un filet de vinaigre dans ses propos.
Clin d'oeil de l'auteur, car l'arsenic soigne l'eczéma.
Ce sont deux égoutiers qui sont envoyés dans les boyaux de la ville pour résoudre le problème du 109.
Arsenic est envoyé pour la fuite du 109 et Eczéma pour le bouchon du 109.
Arsenic préfère travailler seul mais Eczéma, lui se réjouit d'avoir quelqu'un à qui parler.
Les égouts sont la lie de la société. Nos deux philosophes d'égouts vont nous interpeller sur la marche du monde.
Eczéma voit le verre à moitié plein, Arsenic le voit toujours à moitié vide.
A eux deux ils forment un tout.
D'emblée le prologue nous dit que notre monde n'est plus flamboyant, plus de goût pour le piquant, le relevé, non tout est « faisandé », âcre, fade.
Le décor est planté, les didascalies sont claires et donnent à voir, ces deux être qui sont là, sous terre, à cause du dysfonctionnement des têtes pensantes du haut.
La scène d'ouverture est grand-guignolesque, sur la courtoisie d'usage et nous livre des indications sur ces deux loufoques. Loufoques ? le sont-ils ?
Les dialogues sont pimentés :
ECZEMA : « —Oh ça va l'agité ! On est pas aux pièces ! Tu vois, quoi que t'en dises, t'as le choix de pas faire du zèle. Y a personne ici, pour contrôler. Et puis tiens, tu peux même imaginer par exemple que tout pète « là-haut »… Et ben nous, là, sous terre, à soixante mètres, on s'en rendrait même pas compte… »
Nos deux compères ont résolu le problème du 109, reste à trouver la sortie.
ARSENE : « — Bon, t'arrêtes tes conneries, je panique pas du tout, j'en ai simplement plein le dos de supporter ton baratin. Ça me déconcentre. Dans ce dédale y faut être attentif. Si tu continues avec tes « élucubrations » c'est plus Eczéma qu'on va t'appeler, ce sera plutôt du genre « cul en feu » ! »
Une pièce de théâtre réussit ne se lit pas elle s'entend et se voit.
C'est le cas, je dirais même elle se sent, car parfois le lecteur se pince le nez à cause des remugles.
Nos deux personnages s'adressent à nous pour nous émouvoir, nous solliciter, nous invectiver et revendiquer. Car la vie est un vaste sujet, surtout si l'on aborde son sens à l'échelle individuelle mais aussi à l'échelle collective.
J'ai indubitablement pensé à Giono, philosophe des Grands chemins.
De l'explication très simple au labyrinthe des expériences, des motivations, des racines, le cheminement se fait comment ?
De ceux qui sont ancrés dans la terre à ceux qui sont des « mangeurs de vent » comment se positionner ?
En 50 pages Alain Cadéo nous amène sur le chemin de la réflexion par le rire, le burlesque.
Notre époque échappera-t-elle au retour des Dieux ?
A vous de le dire.
Alain Cadéo est un homme-orchestre de talent, ses instruments : les mots, en roman, essai, poésie et théâtre.
La couverture d'Isabelle Forno est juste merveilleuse, elle joue entre le visuel d'un labyrinthe et l'oeil du Minotaure qui vous guette. Elle atteint son but.
©Chantal Lafon

Lien : https://jai2motsavousdire.wo..
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