Survivre au sexisme ordinaire

Notre langue regorge de synonymes pour mettre en avant la haine innée que les femmes sont censées ressentir les unes pour les autres, et leur prétendue absence de solidarité. Ce mythe est aujourd’hui institutionnalisé. Car si la solidarité entre les hommes est gravée sur les frontons de toutes nos institutions républicaines – Liberté, Egalité, Fraternité…-, nos logiciels de traitement de texte continuent d’ignorer son équivalent féminin, la sororité.

[Quand] la Sage lève le poing, I'ldiot commente ses aisselles (21, Klaire fait Grr)

Lorsque nous aurons violé et démembré le même nombre d'hommes que vous l'avez fait avec des femmes, ou avec des homosexuels ou des transsexuels, simplement parce qu'ils seront des hommes, ou parce que leur corps ou leurs pratiques ne correspondront pas à ce que nous entendons par une bonne masculinité hétérosexuelle soumise, alors vous pourrez nous appeler féminazies. Quand nous aurons décidé dans un Parlement composé uniquement de femmes, dans un conseil d'administration composé uniquement de femmes, qu'un homme pour le simple fait d'être un homme doit être moins bien payé qu'une femme dans n'importe quel emploi et dans n'importe quelle circonstances, alors vous pourrez nous appeler des féminazies. Lorsqu'il vous sera interdit d'éjaculer hors d'un vagin sous peine d'accusation d'avortement et que toutes vos pratiques sexuelles en dehors du lit hétérosexuel seront considérées comme grotesques ou pathologiques, alors vous pourrez nous appeler féminazies. Quand vos jambes trembleront lorsque vous traverserez une rue sombre et que vous chercherez avec crainte les clés de votre porte dans vos poches pour entrer chez vous le plus vite possible, quand une silhouette féminine au fond d'une allée vous fera vous retourner et courir, lorsque les rues de toutes les villes seront nôtres, alors vous pourrez nous appeler des féminazies. [...] Et même si, un jour, nous vous soumettons, nous vous exotisons, vous vous violons et vous tuons, si nous accomplissions une tâche historique d'extermination, d'expropriation et de soumission comparable à la vôtre, nous serons alors tout simplement comme vous. Alors, oui, à ce moment-là, nous pourrons partager avec vous l'adjectif "nazi".

Les féministes ne sont jamais contentes, c'est même à ça qu'on nous reconnaît. A ça et à notre colère (de mochetés velues), nos luttes (de mal baisées hystériques), notre sororité de gouines féminazies). Marie Sauvion