Citations sur Pour tous mes péchés (14)
Elle commence tout juste à transpirer : cela signifie qu’elle court de la bonne manière. Des gouttes coulent le long de son dos, d’autres glissent de ses tempes jusqu’à la peau ambrée de son cou, pour ensuite se nicher au creux de ses seins toniques. Elle court vite, mais elle n’est pas encore à son maximum. Elle dépasse le carrefour de la Madone del Sasso, une étrange sculpture creusée dans un énorme bloc de pierre, et désormais recouverte de chapelets et de cœurs posés en offrande. La Maison bleue n’est plus loin : c’est le moment du sprint final. Après presque une heure de course, Linda est un faisceau de muscles, toute son énergie est dans ses jambes : elle ne pense plus à rien, seule la route existe. La route et son instinct.
L’indice ultime qui classe cet homme dans une tout autre catégorie que ceux qu’elle a vus en sous-vêtements jusqu’à présent : c’est le boxer de quelqu’un qui sait vivre au sommet de l’élégance, d’un homme qui connaît parfaitement les femmes et sait comment les embrasser, les caresser et bouger ce doigt en avant et en arrière, ni trop fort, ni trop lentement, précisément comme il le fait à cet instant, avec la juste impulsion et la juste intensité.
— Et les Vietnamiennes, elles sont comment ?
— Parmi les Asiatiques, ce sont peut-être les plus belles : elles sont longilignes, les cheveux noirs et longs, très raides, une peau de velours…
Elle a quarante-deux ans mais semble en avoir dix de moins. C’est une de ces femmes qui semblent tout droit sorties des pages glacées d’un magazine de mode, même au réveil. D’origine libanaise, elle fait partie d’une des familles les plus politiquement influentes de Beyrouth, mais elle a grandi à Paris et ne parle pas moins de cinq langues.
Elle a toujours aimé conduire, même plusieurs heures de suite. Appuyer sur l’accélérateur, agripper le levier de vitesse, observer le monde qui défile à travers les vitres, tout cela lui confère un sentiment de liberté que rien d’autre ne parvient à lui procurer.
Avec ses petites mains nerveuses, elle savait faire des miracles, et c’étaient là les seuls moments où il se souvient de l’avoir vue sereine. Pour sa mère, fille de nobles vénitiens déchus et mariée très jeune à un entrepreneur prometteur, le reste du temps s’écoulait dans la monotonie de ses journées de riche épouse sans occupation, puis de mère hyper protectrice. Si toutefois on laisse de côté les pleurs et les grandes scènes durant lesquelles elle se défoulait des déceptions causées par les continuelles infidélités de son mari.
Ils ne disent rien, et pourtant c’est comme s’ils se parlaient. Quelque chose qui aurait voulu dire : on aurait pu se donner plus pendant ce temps passé ensemble, et va savoir pourquoi, on ne l’a pas fait. Peut-être par peur, par timidité ou par indécision. Quoi qu’il en soit, il est trop tard. Et désormais il faut regarder vers l’avenir.
… comment fais-tu pour contrôler une émotion qui naît profondément en toi ? C’est comme une tempête, ou un tremblement de terre : quand ça arrive, ça ne te prévient pas et surtout, tu ne peux pas l’arrêter.
— Et toi, comment fais-tu pour toujours garder ton calme ?
— Ce n’est pas difficile. Il suffit de connaître et d’être capable de prévoir ses propres émotions... Finalement, tout est une question de mental.
Les formes peuvent changer, mais l’âme d’un lieu reste immuable en dépit du temps.