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Citations sur Le ventre de la péniche (13)

Rien de plus simple, il suffit que le portable se cale sur la même gamme d'ondes que la carte à puce de cette bagnole et le tour est joué, c'est une simple application que tu peux acheter sur le net pour quelques dizaines d'euros, une histoire d'Andoid en mode open source, un système d'exploitation mobile fondé sur le noyau Linux. C'est bien ça Rémy ?
En gros oui patron.
P 96
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Ces salopards vont me le payer, se dit-il, ça schlingue l'arrogance de crevure, ça dégouline velu la dérobade en loucedé, l’esquive mesquine des petites frappes, la prise d'otages pas cool.
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La mort de la mère d' Hannah, à sa naissance, avait pétri son père d'une nostalgie en pâte à sel qui avait fini par se durcir, se fossiliser, un minéral figé dans son évolution du jour au lendemain par la disparition de l'être aimé.
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Le soir, à la veillée, je construisais une espèce d'orgue à percussion, avec des bois plus ou moins denses, plus ou moins résistants à la compression, avec des résonances différentes suivant les essences, l'épaisseur du bois de l'année ( l'aubier ), ou la dureté de son duramen ( la partie morte interne du tronc ). Un vrai casse-tête auditif pour lequel je me passionnais.
[...]
J'avais répertorié tous ces bouts, puis je les avais classés par densité et par poids. D'abord les légers : sapin, épicéa, peuplier, tremble, tilleul, bouleau, orme, platane, noyer. Puis les mi-lourds comme le pin sylvestre, l'aubépine, le pin maritime, les bois de fruitiers, le hêtre, l'acacia. Et enfin les lourds, le buis, le chêne, l'if, le charme, l'olivier. Passionnant, c'était vraiment passionnant.
P345-346
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Je suis issu d’une famille modeste et j’en suis extrêmement fier. Je ne porte pas ce patrimoine comme une légion d’honneur, mais pas loin, un dérivé de médaille du mérite made in Calabre. Je suis estampillé populaire sur mon front en caractères gras, dans mes chairs et dans mon bide, et pas seulement à cause des nouilles pas chères que j’ai bouffées toute mon enfance. Mes couilles produisent des spermatozoïdes d’ouvriers, chez nous les bébés naissent avec des truelles dans leurs petites mains charnues, les sage-femmes hallucinent, les enfants Cervantès sortent des maternités avec des chaussures et des casques de chantier, pas avec des robes à fleurs qu’ils porteront pour leur rentrée des classes dans des écoles privées anglaises. Je ne suis pas un fils de et c’est ce qui m’a rendu fort. L’effort est mon quotidien, la difficulté m’a donné de la consistance et je la trouve facile. Notre patrimoine génétique est tapissé de ténacité et de patine artistique, nous sommes constitués d’acharnement, d’abnégation, de pugnacité maladive, d’obstination obsessionnelle, exagérée, quasi absurde ; ne pas naître avec une cuillère en argent dans la bouche m’a offert du mordant, un héritage customisé pitbull, une notion élémentaire fondamentale du travail bien fait. C’est notre étendard, notre blason, notre échafaudage, notre secret de fabrication, ils sont ancrés dans nos viscères et sous nos peaux.
Mon père me faisait jouer de la bétonnière des week-ends entiers pour que je me paie l’entrée du cinéma. J’avais onze ans. Lorsque j’arrivais à la caisse du cinéma avec ma pièce de cinq francs qui prenait la moitié de la main, j’avais la tête haute, les mains en feu par le manche de la pelle et le ciment pur, mon dos était en miettes, mais je marchais droit.
À douze ans je ratissais les feuilles mortes de mes voisins.
Je me suis payé mon premier argentique avec cet argent, un Ricoh modèle 500 ST, une merveille qui m’a apporté mes premiers frissons photo. Je me rappelle des hésitations, parce que la pellicule coûtait une fortune, l’attente du cliché idéal, la contemplation, les soirées à guetter la lumière du couchant qui n’arrivait jamais. Le délai d’attente du développement, interminable, où tu avais l’impression que ton horloge de salon remontait le temps et que tu rajeunissais. Les premières merveilles pondues lors de focales hasardeuses et de diaphragmes réglés à la wanagain, le tout couronné d’une bonne couche d’à-peu-près et d’advienne que pourra. Autodidacte fauché, je m’en référais à l’instinct de l’instant de mon instantané. Des souvenirs de résultats miraculeux viennent à moi, des photos qui me valurent parfois les compliments de photographes bluffés par ces visages figés mais en mouvement. Il n’est pas si loin le temps où des âmes bienveillantes me prodiguaient des conseils pratiques parce qu’ils avaient vu en moi comme une sorte de don de l’œil, de Don Juan du Canon.
J’attendais alors, impatient, les week-ends, que papa rentre de sa semaine de déplacement à l’autre bout de la France. Il était rincé, brisé, mais ses yeux s’émerveillaient lorsque je lui tendais mes divines photos.
– C’est toi qui as fait ça ? disait-il les yeux écarquillés.
– Ben ouais.
– C’est bien mon fils, continue, je suis fier de toi, ne t’arrête pas de prendre des photos mon cœur.
– Oui, papa, promis.
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Elle s'approche, elle me serre, elle m'embrasse, je trouve qu'il y a beaucoup de beauté chez une femme qui pleure sous l'orage, on ne sait plus si elle pleure de la pluie, ou s'il pleut des larmes.
P 486
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Un matin, un martin-pêcheur m'a surpris en train de pisser dans le canal, ça m'a insufflé une subtile ivresse enracinée. D'aussi loin que je m'en souvienne, c'était la première fois que j'en voyais un en vrai.
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Mon père me faisait jouer de la bétonnière des week-ends entiers pour que je me paie l'entrée du cinéma. J'avais onze ans. Lorsque j'arrivais à la caisse du cinéma avec ma pièce de cinq francs qui prenait la moitié de la main, j'avais la tête haute, les mains en feu par le manche de la pelle et le ciment pur, mon dos était en miettes, mais je marchais droit.
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Les paupières semi-ouvertes, l’officier de gendarmerie Vincent Givert avale une nicorette.
Je vois qu’il apprécie secrètement lorsque la dose homéopathique de nicotine pénètre sa bouche pâteuse, et entre enfin en contact avec ses papilles gustatives, injectant le microshoot de soulagement, un sursis de quelques précieuses minutes dans son désert de sevrage de tabac. Il la broie nerveusement dans un raffut buccal qui me glace le sang, et qui me sort de mon entame de demi-sommeil, puis il trimballe gauche droite les miettes dans sa bouche sans quitter l’écran des yeux.
Pendant ce temps, je n’existe plus, je ne pèse pas grand-chose face à la gomme médicamenteuse. Je déguste en silence ces quelques minutes de répit, je pense à Hannah.
– Nom de famille ?
– Cervantès.
– Prénom ?
– Jason.
Il pose un œil sur moi, un vague oxymore javellisé, clair foncé franchement incertain, ce n’est pas du dégoût ni de la répugnance, on dirait plutôt un mélange sucré saoulé entre surprise et déplaisance, ça a au moins le mérite d’exister.
– Comme Jason et le poisson ?
– Non, ça c’est Jonas… Jason c’est l’histoire de la toison d’or…
Je ne sais pas si c’est vraiment moi qu’il scrute méticuleusement ou un autre, j’ai l’impression que derrière mes pupilles il a trouvé un territoire dans lequel son esprit vagabonde, un terrain vague pourlingue au paysage de matin embrumé. L’insistance de son regard de pierre me met mal à l’aise, ça dure une éternité et des poussières, puis mon OPJ revient dans la réalité, il plonge toute son attention sur son écran des années deux mille.
– Date de naissance ?
– 29 septembre 1969…
– Lieu de naissance ?
– …
– Eh oh, z’êtes né où ?
– À Édimbourg-des-Sept-Mers…
– C’est où, ce bled ?
– Sur l’île de Tristan da Cunha, un territoire britannique au milieu de l’Atlantique sud, entre l’Afrique du Sud et l’Urug…
– J’m’en fous.
– Moi aussi.
– Ça aussi j’m’en fous.
Il poursuit sa drôle d’observation statique de moi, insondable, ambiguë. Je contemple, fasciné, ses yeux bleu azur incrustés de têtes d’épingle vertes, ocre, terre battue, qui jouent à un-deux-trois-soleil, à croire que son cerveau erre dans un entre-deux approximatif, une zone déserte non répertoriée sur sa carte mémoire, sans eau ni électricité, avec pas un rade pour étancher sa soif.
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Dix ans de certitude, dix années d’auto persuasion, où je m’étais convaincu dur comme fer, à force de jouer sur la forge de mes souvenirs, que cette folle ne mettrait plus jamais les pieds chez moi sans que je compose le 15, le 18 ou le 36 quai des Orfèvres.
- Tu as maigri non? du visage en tout cas. Mais tu es toujours aussi beau.
Dix ans de recul, de vie recluse d’ascète, de cloisonnement, pour ça, un si piètre résultat.
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