Le venin de la solitude s'était cristallisé dans son destin.
(Excipit)
Son récit avait la concision et la netteté d'une inscription lapidaire, et dans ses grands yeux verts régnait le calme mystérieux des gouffres sans fond.
Il lui sembla que tout ce qui était arrivé devait laisser sa trace ; et, s'il en était ainsi, combien devait-il y en avoir, de ces traces invisibles, partout ?...
Enveloppée de ce grand silence, Mila se sentit bien. Elle avait conscience que le moindre bruit l'aurait alors blessée d'une douleur presque physique ; et elle sut gré au grillon obstiné de s'être tu.
Dans la solitude enchantée de la nuit, cette porte ouverte glaçait d'horreur.
C'était l'heure entre chien et loup.
Alors oui, Mila les ferma bien vite, de nouveau éblouie par un fulgurant et subit scintillement de miroir. Qu'était-ce que ce rai de lumière, long et blessant, qui séparait si nettement ciel et terre en deux parties ? Le pâtre le lui dit d'un seul mot, d'un mot magique :
- La mer !
Et on dirait que c'est une voix qui me révèle ces histoires ; je m'imagine alors tout ce qui a dû s'y passer, dans ces parages...
De chaque recoin, de chaque rocher, de chaque branche elle voyait sourdre une légende ; et le sentiment du merveilleux s'éveilla en elle comme une nouvelle conscience, une conscience supérieure.
- Tout est beau dans le monde, ermitane, pourvu qu'on le regarde avec les yeux qu'il faut !