Sa colère, pourtant palpable, lui ôtait tous ses moyens. Il était requis « par » son émotion, non pas maître, mais esclave du sentiment qui l’habitait.
(Alto, p.289)
La question se posait (Moody la posa en effet) de savoir comment Löwenthal pouvait être aussi certain des détails exacts de l’incident, attendu qu’il venait seulement de s’en souvenir, près de huit mois après les faits, et qu’il n’avait eu l’occasion de rien vérifier. Comment pouvait-il jurer, premièrement, que l’homme qui avait fait insérer l’annonce était bien marqué d’une balafre à la joue, deuxièmement, qu’il s’était présenté en juin de l’année précédente, et, troisièmement, que le nom figurant dans son extrait de baptême était, sans l’ombre d’un doute, Crosbie Francis Wells ?
La réponse de Löwenthal fut courtoise, mais assez verbeuse. Il expliqua à Moody que le West Coast Times avait été fondé en mai 1865, un mois environ après que lui-même avait pour la première fois débarqué sur le sol néo-zélandais. Le premier numéro du journal avait été tiré à vingt exemplaires, un pour chacune des dix-huit hôtelleries qui avaient alors pignon sur rue à Hokitika, un pour le juge de paix fraîchement nommé, et un pour ses propres archives. (En l’espace d’un mois, et grâce à l’acquisition d’une presse à cylindre, le tirage allait atteindre deux cents; à présent, en janvier 1866, chaque livraison était tirée à près de mille exemplaires, et Löwenthal avait engagé deux auxiliaires.) Pour la réclame, afin de ne laisser ignorer à aucun abonné potentiel que le Times avait été le premier quotidien à paraître à Hokitika, Löwenthal avait fait encadrer sous verre le numéro initial, et chacun pouvait le voir au mur de son bureau. Il se souvenait donc de la date exacte de la création du journal (le 29 mai 1865), parce qu’il avait tous les matins ce numéro encadré sous les yeux.
Le vrai sentiment est toujours un cercle...ou bien un cercle ou bien un paradoxe... Pour la simple raison que sa cause ou son expression sont les deux moitiés d'une même chose ! L'amour ne se réduit pas à une collection de motifs, et aucune collection de motifs ne se combinera pour donner naissance à l'amour. Celui qui n'est pas d'accord avec moi n'à jamais aimé. .. Pas pour de vrai.
– Voilà donc : le mois prochain sera un mois sans lune.
– Tiens ! Tiens !
– Un mois, entendons-nous, dans le courant duquel l’astre n’atteindra jamais sa plénitude. Février est un mois court. Il y aura une pleine lune juste avant le premier, et une autre tout de suite après le 28… donc pas de pleine lune en février.
– Est-ce une circonstance qui se reproduit chaque année ? demanda Gascoigne, amusé.
Lydia, le visage détourné, répondit en passant discrètement le doigt sur une moulure :
– Pas du tout. Le phénomène est très rare.
– La rareté étant un signe de valeur, n’est-ce pas ? Ou plutôt de danger ?…
Elle rectifia l’alignement de la pendulette :
– Cela n’arrive qu’une fois tous les vingt ans.
Nous regardons désormais vers le dehors, à travers le fantasme de nos propres convictions: le monde que nous voyons est un monde que nous aspirons à perfectionner et que nous nous imaginons habiter.
S'il y a bien une chose que l'expérience m'a apprise, c'est à ne jamais sous-estimer la difficulté extrême qu'il y a à comprendre une situation du point de vue d'autrui.
Nous passons toute notre vie à penser à la mort. Sans cette perspective pour nous distraire, nous mourrions tous, passez-moi le mot, d'ennui. Nous n'aurions rien à fuir, à chercher à prévenir , rien qui nous donne à réfléchir. Le temps ne porterait pas à conséquence.
Les suspicions que rien ne vient confirmer dérivent avec le temps vers l'arbitraire et le fallacieux... sujettes aux vicissitudes de l'humeur, elles acquièrent tous les caractères de la superstition ordinaire...
La terre tourne sans bruit pour qui, dans la solitude, broie du noir.
On n'est jamais si fortement attaché à une loi que lorsqu'elle est bafouée (...)