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Citations sur Les Saints vont en enfer (12)

« Voici un livre qui risque de déplaire un peu partout. Mais la prudence est-elle encore une vertu ?
Dans un monde où des hommes de même langage ne peuvent plus se comprendre sans interprète ; dans un temps où l’on assassine les médiateurs, et où l’honneur commande d’être écartelé : dans ce siècle où règne la croix sans le Christ, je veux n’être d’aucun parti. J’ai trop vu de partisans pour rester capable d’un autre choix. Ainsi je ne quitterai pas la main des hommes au milieu desquels j’ai grandi, parce que je tends la main à mes amis de Sagny.
Ceux-ci ne reconnaîtront peut-être pas leur visage dans ce livre ; et les autres ne reconnaîtront pas le mien. Chacun me traitera d’agent double. Mais l’honneur d’aujourd’hui commande encore de perdre sur les deux tableaux.
On chercherait en vain Sagny sur une carte ; mais, ce que j’en raconte, on le trouvera dans presque toute la banlieue de Paris à la condition d’y porter un œil pur et un cœur exempt de parti pris.
Je serais bien honteux de blesser quiconque avec ce livre ; et je n’espère y convaincre personne : chacun ne convainc que soi-même. Mais si j’ébranle quelques esprits libres, c’est assez.
A mes amis de Sagny, j’offre cette histoire que je n’avais pas le droit d’écrire, car je n’ai jamais été pauvre, ni prêtre, ni ouvrier.
A vous J., B., A., G., qui refusez que je vous cite, je donne ce livre où tout ce qui est pur vient de vous et, de moi, ce qui est besogneux.
J., B., A., G… Vous ai-je jamais appelés par vos noms de famille ?
Des saints aussi, on ne connaît que le prénom. »
Gilbert Cesbron
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- Pourquoi souriez-vous Madeleine? demanda-t-il au bout d'un instant.
- C'est le seul moyen que je connaisse de ne pas pleurer, répondit-elle en se détournant.
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page 118 [...] Pierre traversa la chaussée, courant vers la gare, évitant les taxis (ils encombraient la rue à présent !) mais pas les injures de leurs chauffeurs ; se précipita vers la salle d'attente des troisièmes. "S'il pouvait y être encore ! Mon Dieu, s'il pouvait ... - Salaud, se dit-il soudain en s'arrêtant, si tu avais une seule petite graine de foi, tu croirais qu'il est là, et il y serait !"
Il marcha, le cœur battant, jusqu'à cette porte qu'il poussa. La salle était presque vide : seule, une forme allongée dormait sur la banquette la plus éloignée. Pierre siffla le signal, et le dormeur tourna vers lui son visage.
- Étienne !
Vingt pas les séparaient : le temps, pour Pierre, de remercier Dieu et de reprendre souffle ; pour Étienne, celui de sourire, puis de craindre, puis de reprendre confiance.
- Pierre, comment m'as-tu trouvé ?
- J'ai ... j'ai deviné.
- A cause du journal ?
- Oui, mentit Pierre, à cause du journal.
Les cils battirent en pluie blonde.
- Tu vois, j'ai été bête de ne pas te le dire. Tu l'aurais forcément deviné, que je partirais pour leur village d'enfants ! (Pierre se rappela l'article : en Provence, une "république" d'enfants abandonnés...). Tu es gentil d'être venu me dire au revoir, Pierre ! J'ai sept cents francs que Denise m'a donnés : ça me conduit jusqu'à (il regarda son billet) Pont-Saint-Esprit. Après, je ferai du stop... Le train part à dix heures cinquante-cinq...
- Tu dormais, tu l'as manqué, dit Pierre.
- Quoi ?
- Regarde l'horloge ... Ah! non, tu as déjà vu un homme pleurer, sans blagues ? (Il pensa à Marcel). Écoute, vieux, je ne venais pas te dire au revoir mais t'empêcher de partir...
Le garçon releva lentement un regard encore noyé mais si froid que l'autre se sentit jugé, rangé parmi les bourreaux d'enfants, les indicateurs de police : le clan de Judas.
- Toi ? dit Étienne, toi qui étais mon ami ! ...
C'était la parole du Christ aux oliviers [...]
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Pierre se réveilla,amer et battu;cet endroit,cette journée lui paraissaient aussi désolants qu'un port à marée basse.Pour la première fois,dimanche ne signifiait rien pour lui ; ce dimanche avait un goût de lundi matin...
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― Comment trouvez-vous Jean ?
― Malheureux
― Qu’est-ce qu’on peut faire pour lui ?
― Rien, répondit-elle à mi-voix : il a découvert le Christ mais le garde pour lui. Il ne l’a pas encore trouvé chez les autres.
― Peut-être est-il déçu, voyez-vous ? Peut-être porte-t-il un grand espoir … un amour secret … Vous ne répondez pas ?
― Si je n’avais pas compris Père, je vous répondrais !
― Et alors Madeleine demanda-t-il pour rompre le silence.
― J’ai choisi dit-elle d’une voix forte.
Il craignait tant de voir des larmes dans ses yeux qu’il enchaîna vite :
― Et Michel ? Quoi de neuf pour Michel ?
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― Je n’irai pas dans une paroisse. Je retournerai dans mon couvent près de Lille.
― Bernard !
― C’était ma vocation. J’ai cru que je pourrais … Je me suis trompé voilà tout ! Notre vocation c’est d’aller là où nous serons le plus utile. Je dois …
― Non ! dit Pierre fermement, d’aller où on appelle. Ce sont les âmes qui nous appellent et pas Dieu : c’est le besoin, c’est l’absence de Dieu qui nous appelle.
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Ce grand corps sans vie, Pierre l’étreint avec la brutalité désespérée des sauveteurs ― « Jean ! … Jean ! … » Il rappelle son copain. L’homme qui vacille au seuil de la mort lève ses paupières de marbre, penche la tête à droite comme le Christ ― il ne pourra plus la redresser ― et parle dans un souffle :
― J’étais là quand tu as crié … Pardon vieux …
Pierre éclate en sanglots. Il hurle : « Jean ! … Jean ! … Jésus ! … » Il ne sait plus lequel est le plus sourd, le plus lointain des deux ! Ils le laissent tomber tous les deux !
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L'innocent qui va être fusillé, tu crois qu'il déteste les gars du peloton ? ou même l'officier ? ou même les juges ? - Mais non ! il sait bien qu'ils ne sont que des instruments, les instruments d'une mauvaise cause et d'un mauvais système. Pour nous, c'est la même chose : la Société est mauvaise ; même ceux qui en profitent en sont les victimes. Ça n'avance à rien de les détester : c'est le système qui est détestable. Lui, il faut l'attaquer, par tous les bouts ! Mais eux, il faut essayer de leur expliquer. Si vous croyez que ça donne de la force de détester, essayez seulement le contraire : d'aimer les autres, tous les autres - et vous verrez la force que ça vous donnera ! et la paix que ça créera en vous et autour de vous !... Créer la paix, c'est chic, dites ? La paix, c'est d'aimer les autres, pour les obliger à aimer les autres - et ainsi de suite, sur toute la terre ! Et ça n'est pas facile..., ajouta-t-il à mi-voix.
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je ne quitterai pas la main des hommes au milieu desquels j'ai grandi, parce que je tends la main à mes amis ...
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Dans un monde ou des hommes de même langage ne peuvent plus se comprendre sans interprète;dans un temps ou l'on assassine les médiateurs,et ou l'honneur commande d'être écartelé : dans ce siècle ou règne la croix sans le Christ,je veux n'être d'aucun parti.J'ai trop vu de partisans pour rester capable d'un autre choix.Ainsi je ne quitterai pas la main des hommes au milieu desquels j'ai grandi,parce que je tends la main à mes amis de Sagny.
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