Je dédie ce livre à tous les enfants dont je croise le chemin de l’école : les joyeux, les timides, les furieux, les « c’est pas moi ! », les enthousiastes, les stupéfaits, les fragiles, les protecteurs, les rêveurs, les « ça passe trop vite ! », les endormis, les « moi-je-sais ! » et les « ben, j’sais pas », les « et moi mon chat s’appelle Marcel », les coiffés à la dynamite, les « j’vous jure ! ».
Ma confiance dans l’enfance.
Laisse-le trouver SES solutions.
« Ils sont très grands. Que dis-je? Immenses! Avec des voix fortes, des rires à faire s’envoler des corbeaux, des coupes de cheveux comme dans les magazines et des gros mots plein la bouche. Quand ils ont envahi la cour en riant comme des ogres mutants, je suis allé me cacher derrière le tronc du tilleul pour les observer en sécurité. On ne voit plus qu’eux. Les troisièmes ! »
Le ciel paraît soudain s'ouvrir, me happer. Il aspire quelque chose en moi, qui monte dans ma gorge et c'est un rire que je laisse échapper dans un hoquet de surprise. Une grappe de rire don chaque grain, enflé d'une peur que je reconnais, éclate dans un palpitement doux.
« – Arrête d’avoir peur pour moi. Je veux grandir. Je peux grandir. Mais pas quand tu me traites comme un bébé. (…) – Je veux avoir mes secrets, maman. Tu peux pas tout le temps être dans ma tête. »
Parfois aussi, je m'échappe. Cest ce que disait ma maîtresse de cm2. "ca y est, Leon Tournier nous a encore echappe !" . Je n'étais plus dans la classe, je ne sais pas vraiment où j'étais. Je restais un moment a fixer une couleur sur un cahier, sur un mur, et j'y entrais, tout disparaissait autour de moi. Je flottait agréablement. Je m'echappais jusqu'à ce que Véronique pose la main sur la mienne pourme ramener a monde. Je lui demandais de ne pas répéter a maman que je m'étais enfui, c'était notre secret.
Les supers héros savent voir à travers les murs, voler ou soulever un paquebot d'un seul doigt, moi, je m'évade.
Je sais que je ne suis pas comme les autres, mais je veux essayer de le devenir, pour qu'on arrête tout le temps de me parler comme à un bébé. J'ai bien remarqué que les maîtresses de maternelle avaient des yeux plus doux avec moi et qu'elles se baissaient pour le demander quelque chose, comme on le fait avec les petits.
Moi quand j'avais peur, je ne réussissais plus à réfléchir, dis-je. Je faisais n'importe quoi.
Je veux des secrets à moi !
« – (…) Des fois, je suis quelque part et …tout à coup, je sais plus où je suis. Je suis perdu. En classe, chez moi, ou dans la rue. Ça me fait peur. Ça énerve les professeurs, mais je fais pas exprès. C’est des absences. Ça s’appelle des absences. Mon cerveau se trouble, comme l’eau d’une rivière quand il pleut. Maman me l’a dit, et la psychologue. Je suis dans mon monde, pour me rassurer. C’est quand j’ai peur. Et… j’ai souvent peur. J’arrive pas à être comme les autres. »