Je n’ai jamais bien su pourquoi j’ai survécu à ce dont, d’ordinaire, on ne revient pas. Il est des pertes sèches qui, loin d’empêcher l’amour ou la joie, les rendent plus brûlants encore, mais dont on ne se remet jamais et dont on ne souhaite pas se remettre.
Ils avaient tous en eux l’espoir que ce ne serait qu’un mauvais rêve, mais en fait, tout cela, ce n’est pas un rêve, tout cela c’est pareil pour tout le monde, tout cela, ce n’est pas grand-chose, tout cela ce n’est que la vie, et, finalement, la mort.
Il était temps qu’il les délivre de lui.
Aux vulnérables et aux endeuillés.
Il est toujours plus facile de soigner les malades quand on les connaît un peu - même quand on sait qu'on ne pourra peut-être pas les sauver, le souvenir de ce qu'ils furent et de l'engagement qu'on a mis à les soigner jusqu'au bout aide parfois à en sauver d'autres.
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On sait ce qu’est la dévalorisation. Plus perçante est la haine de soi. Elle méduse. On se regarde comme les autres vous regardent, comme un être qui aurait tout pour être libre et heureux, et qui rencontre cette haine féroce de soi, dans laquelle toutes vos pensées se réfugient pour vous faire mourir de l’intérieur. Mais ce qui tue, ça n’est pas seulement la douleur morale. Ce qui tue, c’est aussi la condescendance et le mépris de ceux qui pensent que la douleur d’un deuil qui se prolonge relève d’une paresse de la volonté ou d’une faiblesse complaisante.