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Critique de Plumeetencre


“La guerre apprend à tout perdre, et à devenir ce qu'on n'était pas." (Albert Camus)

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“Mon enfance s'est achevée alors qu'elle avait à peine commencé. C'était un dimanche, le 26 juillet 1942, à la gare De La Rochefoucauld, près d'Angoulême.” 

Francine Christophe a tout juste 8 ans et demi lorsqu'elle est arrêtée avec sa mère sur la ligne de démarcation. Fuyant la capitale, elles espéraient rejoindre un oncle habitant près de Grenoble, en zone libre. Interrogées par la police militaire allemande puis emprisonnées, elles seront ensuite internées de camp en camp, à Angoulême, Poitiers, Pithiviers, Beaune-la-Rolande et Drancy. 

Femme et fille d'un  prisonnier de guerre, elles seront “protégées” dans un premier temps par les Conventions de Genève, traités internationaux édictant les règles de conduite à tenir lors de conflits armés. Un statut “privilégié” leur permettant de rester sur le territoire français et d'éviter la déportation. Deux ans plus tard, elle seront conduites en Allemagne à Bergen-Belsen, un camp de concentration nazi.

Transportée dans des “wagons à bestiaux”, Francine Christophe se remémore ses “voyages” en train. 

“Les portes sont verrouillées, les volets rabattus et plombés. Il fait noir et l'angoisse monte.”

Elle nous raconte les odeurs pestilentielles, la sensation de suffoquer, les corps entassés, les heures voire les jours passés sans boire ni manger, le sol jonché d'excréments, les cadavres qui s'amoncellent. Encore aujourd'hui lorsqu'elle prend le TGV, ces images s'imposent à elle, lui faisant comprendre que la blessure ne se refermera jamais.

De son passage dans les différents camps, elle se rappelle la peur permanente, les coups, les humiliations, les conditions de vie infâmes, la faim, le froid avec des températures allant jusqu'à - 25°, la promiscuité, la vermine qui pullule, les maladies qui prolifèrent, l'absence de soins, les cris, les pleurs et la mort qui règne partout. 

“Aux yeux de la loi nazie, nous n'étions plus des êtres humains, mais des lambeaux de vie dépouillés de tous leurs droits.”

Durant ces trois années de calvaire, la présence et l'amour maternel seront ses seuls remparts pour ne pas sombrer dans le désespoir. 

Au retour de Bergen-Belsen, après la Libération, l'horreur nazie est passée sous silence. Lorsque Francine Christophe essaye de raconter à l'école ce qu'elle a vécu, personne ne la croit. Il faudra attendre les années quatre-vingt-dix pour que les paroles se délient enfin. 

“L'époque n'était pas prête à nous entendre.”

Depuis, elle ne cesse d'intervenir dans les collèges,  les lycées, les médias, pour que nous n'oublions jamais les atrocités nazies ainsi que leurs victimes. Elle est l'auteur de plusieurs ouvrages parmi lesquels figurent Une petite fille privilégiée et Après les camps, la vie que je ne manquerai pas de lire. 

Un récit de vie dense, précis, intime et bouleversant d'émotions.  La rencontre de l'histoire avec L Histoire, de l'innocence avec la barbarie nazie. Une plume enrobée de pudeur et de délicatesse. Un contraste saisissant avec l'abomination des faits décrits. Une force de vie et un courage qui forcent le respect. Un leg précieux pour les générations actuelles et à venir. 

Que dire de plus si ce n'est que malgré les nombreux témoignages lus années après années,  je ressens toujours avec force les mêmes sentiments d'effroi, d'indignation et de honte. 

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“La guerre?  Au-delà de la douleur et des atrocités, c'est l'âme de chacun et la conscience de tous qui ressortent violées de l'expérience du pire.” (D.H)





Lu en décembre 2021 - récupération des quelques retours partagés sur mon ancien compte avant sa fermeture définitive
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