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Lorsqu'elle est arrêtée avec sa mère en 1942 sur la ligne de démarcation, Francine est âgée d'à peine neuf ans. Elles sont dans le train, elles ont des faux papiers mais rien n'y fait, la Gestapo va les interroger pendant des heures, avec des menaces incessantes pour leur faire avouer qu'elles sont juives.

Le père de Francine étant prisonnier militaire, officier, est dans un camp où il restera cinq ans, et cela est censé les protéger, elle et sa mère, leur évitant la déportation immédiate. Elles vont passer par la prison d'Angoulême, le camp de Drancy, puis celui de Pithiviers, retour à Drancy pour être envoyées à Bergen-Belsen.

Francine Christophe nous raconte les « voyages » en train, dans les wagons à bestiaux, sans nourriture ni même une goutte d'eau, essayant de respirer par le moindre interstice, léchant la vapeur sur les parois du train ou sur le corps des autres déportés. Puis, les mauvais traitements (les mots du langage courant ne sont pas suffisants pour décrire les atrocités dit-elle, il faudrait inventer d'autres mots tant cela dépasse l'entendement).

Elle décrit la vie au camp, les insultes, les coups, l'appel qui dure des heures sans bouger, par moins 25°, les cadavres qui jonchent le sol, qu'on finit par jouer, comme à saute-mouton, le typhus, la faim la soif…

Francine Christophe évoque bien ce qu'elle appelle son rapport paradoxal avec la mort : il lui est impossible de regarder un polar, un pistolet ou lame de couteau qui brille, ou des films de science-fiction, alors que, des photos ou des films sur les camps, ne la perturbent pas : c'était son enfance, elle a vu tellement de morts, elle pour qui enjamber des cadavres pour se rendre aux latrines faisait partie du quotidien…

Elle aborde aussi le retour des camps, comment vivre après, alors qu'il faut se taire car on les prend pour des fous, ceux qui tentent de raconter ce qui leur est arrivé là-bas. Il faudra attendre les années quatre-vingt dix pour que les langues commencent à se délier. Il n'y a pas d'autres solutions que continuer à avancer, en se demandant toujours pourquoi on a survécu et d'autres non et si cela valait le coup d'être revenu et il n'y avait pas de cellules psychologiques à l'époque…

J'ai beaucoup sa manière de raconter, l'horreur vue de sa taille et de son esprit de petite fille, la déshumanisation mis en place par les nazis, l'espoir interdit car on risquerait de relâcher la vigilance qui permet de rester en vie, et on ne peut qu'admirer la force qui émane d'elle.

Ce témoignage est particulièrement touchant par la manière dont les évènements sont racontés, il ne s'agit pas d'un ouvrage de plus sur les camps, la Shoah, il s'agit de témoigner sans relâche pour que cela ne recommence pas, ce que fait Francine Christophe, en allant comme d'autres rescapés dans les lycées, les collèges, raconter aux élèves ce qui s'est passé, en retournant régulièrement à Bergen-Belsen pour rendre hommage aux morts et se souvenir.

Un immense merci à NetGalley et aux éditions Grasset qui m'ont permis de découvrir ce livre que j'ai littéralement dévoré et son auteure dont j'ai envie de lire les précédents ouvrages, notamment « Une petite fille privilégiée ».

#Lenfantdescamps #NetGalleyFrance
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“La guerre apprend à tout perdre, et à devenir ce qu'on n'était pas." (Albert Camus)

***

“Mon enfance s'est achevée alors qu'elle avait à peine commencé. C'était un dimanche, le 26 juillet 1942, à la gare De La Rochefoucauld, près d'Angoulême.” 

Francine Christophe a tout juste 8 ans et demi lorsqu'elle est arrêtée avec sa mère sur la ligne de démarcation. Fuyant la capitale, elles espéraient rejoindre un oncle habitant près de Grenoble, en zone libre. Interrogées par la police militaire allemande puis emprisonnées, elles seront ensuite internées de camp en camp, à Angoulême, Poitiers, Pithiviers, Beaune-la-Rolande et Drancy. 

Femme et fille d'un  prisonnier de guerre, elles seront “protégées” dans un premier temps par les Conventions de Genève, traités internationaux édictant les règles de conduite à tenir lors de conflits armés. Un statut “privilégié” leur permettant de rester sur le territoire français et d'éviter la déportation. Deux ans plus tard, elle seront conduites en Allemagne à Bergen-Belsen, un camp de concentration nazi.

Transportée dans des “wagons à bestiaux”, Francine Christophe se remémore ses “voyages” en train. 

“Les portes sont verrouillées, les volets rabattus et plombés. Il fait noir et l'angoisse monte.”

Elle nous raconte les odeurs pestilentielles, la sensation de suffoquer, les corps entassés, les heures voire les jours passés sans boire ni manger, le sol jonché d'excréments, les cadavres qui s'amoncellent. Encore aujourd'hui lorsqu'elle prend le TGV, ces images s'imposent à elle, lui faisant comprendre que la blessure ne se refermera jamais.

De son passage dans les différents camps, elle se rappelle la peur permanente, les coups, les humiliations, les conditions de vie infâmes, la faim, le froid avec des températures allant jusqu'à - 25°, la promiscuité, la vermine qui pullule, les maladies qui prolifèrent, l'absence de soins, les cris, les pleurs et la mort qui règne partout. 

“Aux yeux de la loi nazie, nous n'étions plus des êtres humains, mais des lambeaux de vie dépouillés de tous leurs droits.”

Durant ces trois années de calvaire, la présence et l'amour maternel seront ses seuls remparts pour ne pas sombrer dans le désespoir. 

Au retour de Bergen-Belsen, après la Libération, l'horreur nazie est passée sous silence. Lorsque Francine Christophe essaye de raconter à l'école ce qu'elle a vécu, personne ne la croit. Il faudra attendre les années quatre-vingt-dix pour que les paroles se délient enfin. 

“L'époque n'était pas prête à nous entendre.”

Depuis, elle ne cesse d'intervenir dans les collèges,  les lycées, les médias, pour que nous n'oublions jamais les atrocités nazies ainsi que leurs victimes. Elle est l'auteur de plusieurs ouvrages parmi lesquels figurent Une petite fille privilégiée et Après les camps, la vie que je ne manquerai pas de lire. 

Un récit de vie dense, précis, intime et bouleversant d'émotions.  La rencontre de l'histoire avec L Histoire, de l'innocence avec la barbarie nazie. Une plume enrobée de pudeur et de délicatesse. Un contraste saisissant avec l'abomination des faits décrits. Une force de vie et un courage qui forcent le respect. Un leg précieux pour les générations actuelles et à venir. 

Que dire de plus si ce n'est que malgré les nombreux témoignages lus années après années,  je ressens toujours avec force les mêmes sentiments d'effroi, d'indignation et de honte. 

***

“La guerre?  Au-delà de la douleur et des atrocités, c'est l'âme de chacun et la conscience de tous qui ressortent violées de l'expérience du pire.” (D.H)





Lu en décembre 2021 - récupération des quelques retours partagés sur mon ancien compte avant sa fermeture définitive
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Ce témoignage est bouleversant, comme de nombreux autres que j'ai pu lire également. La chronologie est bien respectée, ce qui permet de constater combien les sévices sont allés crescendo, et combien de force, de courage et de résilience il aura fallu pour survivre à ces horreurs et pouvoir en témoigner aussi longtemps après !
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Il y a des livres qui vous collent une sacré claque, et ces témoignages des rescapés de la Shoah me bouleversent toujours autant. Ça n'est pas par un attrait macabre que j'en lis régulièrement, mais pour me rappeler, redire à mon esprit que oui, ce que je n'ai ni expérimenté ni vu a bel et bien existé.

Dans ce récit assez court qu'elle livre avec l'aide de Pierre Marlière, Francine Christophe relate cette enfance perturbée par la guerre, l'occupation puis la déportation. Avec sa mère, elles sont arrêtées puis emprisonnées, retenues en otage comme elle dira souvent dans son récit.

Elle passera de prisons en camps, toujours sur le territoire français, pendant deux ans. Petit à petit, les conditions de détention se dégraderont, les conventions internationales qui les protègent ne les protègent plus. Elle dit pourtant, avec le recul et le témoignage d'autres rescapées, qu'elle a eu de la chance car elle est restée détenue deux ans en France et n'a pas immédiatement rencontré les pires horreurs.

La douleur viendra lors de leur déportation en Allemagne, à Bergen-Belsen, où l'humanité et la vie lutteront quotidiennement contre la barbarie, la folie mortifère d'un régime, l'administration d'annihilation.

Un récit aussi difficile qu'essentiel pour se rappeler encore et encore ce que nous, espèce humaine, avons été capable de nous infliger il y a de cela quelques décennies à peine. Lire ce témoignage, c'est être touché par la résilience, par l'espoir et par l'humanité en même temps. N'arrêtons jamais d'en parler, ne laissons pas s'éteindre la mémoire de notre histoire.

Chronique publiée sur le compte Instagram de L'Homme Qui Lit. Service de presse numérique obtenu via la plateforme NetGalley.
Lien : https://www.instagram.com/p/..
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En 1942, Francine âgée de 8 ans et demi et sa mère sont arrêtées et mise dans un train. Elles seront ballottées de camp en camp. le père de Francine est prisonnier militaire et est enfermé dans un camp pendant 5 ans, son statut de prisonnier évitera à Francine et sa mère d'être déportée directement.

Francine nous raconte ce qu'elle a vécu depuis son arrestation. Elle a lutté pour survivre pendant trois ans au côté de sa mère. Les camps, le froid, les coups, la faim et la maladie. Après la libération, Francine témoigne également des réactions des autres qui ne comprenaient pas ou qui ne voulais pas comprendre.

C'est un témoignage qui se lit rapidement. Il m'est impossible de mettre des mots et de juger le style ou autres, mais il est important de souligner que le livre est facilement accessible à la lecture.

Il n'est pas nécessaire d'écrire une longue chronique pour ce genre de témoignage, mis à part que je reste admirative de la force de caractère que ces personnes ont face à de telles épreuves de vies.

J'ai donc, malgré le thème et les horreurs vécues, apprécié ma lecture et été touché par certains passages tels que le bébé et le morceau de chocolat. Je resterai vague sur cette partie, mais c'était émouvant à lire.
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Poignant , émouvant sont les premiers qui viennent à l'esprit une fois ce petit livre terminé. Une enfance brisée et malgré l'horreur subie Francine Christophe reste d'une bonté inébranlable . Pas question de vengeance ni de pardon mais bien sûr mais simplement une foi en un avenir meilleur. A lire absolument , relire et partager le plus largement possible en ces temps où la peste brune s'affiche de plus en plus ouvertement .
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Un récit court en terme de pages, mais oh combien riche et déstabilisant. Pourtant, j'en ai lu des ouvrages sur le thème de la déportation et de la Shoah. Déjà adolescente, je me nourrissais de ces témoignages, j'ai d'ailleurs un souvenir encore très présent de ma lecture de « Treblinka, la révolte d'un camp d'extermination » de Jean-François Steiner.

Francine, notre narratrice, est emprisonnée, puis déportée à l'âge de 8 ans et demi. Sa vie s'arrête en 1942, où elle est arrêtée avec sa mère non loin de la ligne de démarcation, et retenue à la prison d'Angoulême. Commencera alors un long périple, elle va survivre de camps en camps, tout d'abord en France, notamment Drancy, puis en Allemagne, pour finalement être déportée à Bergen-Belsen. Deux ans d'errance avant l'abomination, qui lui auront permis, confie-t-elle de « s'habituer au mal ». Mais peut-on jamais s'y habituer ?

La peur, le froid, la faim, la mort seront ses compagnes quotidiennes. Dans des conditions sanitaires déplorables, Francine va passer ces années d'enfance à jouer avec les autres enfants retenus comme elle sous le seul prétexte d'être juif. Les enfants, ces victimes silencieuses de la guerre, dont on parle peu, jetés du jour au lendemain dans l'horreur de la guerre, voyant s'écrouler leur monde, signant la fin de leur innocence. C'est juste épouvantable. Il n'y a pas de mots pour définir cette période. Francine aura la chance d'être restée avec sa mère, car nombreux sont les enfants arrachés à leurs parents.

« C'est devenu mon univers, mon jardin d'enfants. Une terre pourrie qui ravage toute forme de vie, où les cadavres poussent à la place des fleurs et des arbres. »

Francine nous raconte avec des mots simples son quotidien, la lutte pour se nourrir, pour survivre, pour ne pas succomber au typhus. La transformation de la personnalité, la déshumanisation progressive, via les humiliations subies quotidiennement, cela fait frémir le lecteur.

« Aux yeux de la loi nazie, nous n'étions plus des êtres humains, mais des lambeaux de vie dépouillés de tous leurs droits. »

Francine est une survivante. Elle sera libérée avec sa mère, et retrouvera son père, prisonnier de guerre. Elle reverra ce bébé, Yvonne, né en secret au milieu des détenues et de la crasse de Bergen-Belsen. Car oui, au milieu de toute cette horreur, des petits coins de ciel bleu subsistent. Francine nous confiera qu'à l'époque, aucun soutien psychologique n'était prévu pour les miraculés. Ils sont revenus des camps, ont enfouis ces années au fin fond de leur mémoire, et ont tentés de reprendre une vie « normale ».

Un témoignage précieux, bouleversant, nécessaire, pour ne jamais oublier. Et peut-être, pour faire prendre conscience aux gens que la même horreur se reproduit, inlassablement, à différents endroits dans le monde, encore de nos jours.

Je remercie les Éditions Grasset et NetGalley pour cette lecture.

#lenfantdescamps #FrancineChristophe #PierreMarlière #Grasset #NetGalleyFrance #RentréeLittéraire
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L'enfant des camps, de Francine Christophe, n'est PAS un énième témoignage historique ! Récit de son enfance, par le prisme de l'Histoire, elle entremêle des évocations contemporaines et des souvenirs des de sa vie au quotidien, avec sa famille, avant, pendant et après la déportation à Bergen-Belsen, avant, pendant et après l'horreur des camps, des centres et autres lieux de l'entre-deux. Touchant et bouleversant par sa simplicité, sa modestie, ce témoignage dégage une authenticité et une vérité profonde, remettant en perspective les conditions de ces rescapé(e)s, notamment par le regard de la société après-guerre.
La relation intense mère-fille est aussi très émouvante, éprouvante (la brève séparation mentionnée m'est véritablement apparue comme un supplice) car les 4 chapitres aboutissent à la partie finale, en apogée, intitulée "5. C'est leur amour qui m'a sauvée", et l'auteure vise en particulier celui de ses parents. Sa maman est d'ailleurs décrite comme une femme qui "avait le goût des mots et le sens de leur valeur" (empl. 216) ; Francine Christophe aussi, possède la valeur des mots, partagée avec des mots de valeur dans ce témoignage poignant.
Simplement merci aux éditions Grasset et à NetGalley pour ce livre-vérité, une empreinte de plus pour ce long chemin nécessaire du souvenir, un pas supplémentaire sur la route du besoin impérieux de ne pas oublier.
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Dans ce témoignage, l'autrice décrit l'avant, le pendant et l'après Shoah. Certaines phrases m'ont marquée telles que “Hitler n'a pas inventé l'antisémitisme mais lui a donné la forme monstrueuse.” ou encore “La déshumanisation est le symbole du nazisme ; l'élite ce sont les allemands, nous nous sommes des bouches inutiles à nourrir.”. Peu habituée aux témoignages, j'ai eu du mal à terminer le livre qui entrait en résonance forte avec les évènement actuels. le livre est intéressant, il pourrait être destiné aux jeunes dès 16 ans.
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