Ancienne capitale est un récit dépaysant, l'histoire d'une femme en quête de ses racines, des fantômes du passé, lieux à présent disparus.
Chu Tien-Hsin est l'une des figures littéraires du genre taïwanais : littérature des villages de garnison. Ces villages ont accueilli les proches et troupes de Jiang Jieshi lors de son repli à Taïwan. Ils ont gardé à l'esprit pendant de nombreuses années, l'idée qu'ils retourneraient un jour sur le Continent. Ils ont dû apprendre à vivre avec les locaux, s'adapter à une nouvelle vie, garder l'espoir qu'ils verraient de nouveau leurs proches restés sur le continent.
L'autrice qui se sert de la narratrice comme d'un alias nous narre sa quête pour retrouver le Taipei de son enfance, celui des garnisons. Elle recherche les lieux de son enfance, une maison devant laquelle elle passait à son retour de l'école, la librairie où elle se rendait. Elle ne retrouve plus le charme de cette époque, la tradition à laquelle elle est attachée. Elle a toujours aimé Kyoto, justement pour ce côté hors du temps, lieu sur lequel la modernité ne semble pas avoir d'emprise, et lors d'un voyage sur place, elle achète un petit guide touristique en japonais de Taipei à l'époque coloniale. C'est par ce biais qu'elle retourne sur les traces de son enfance. le désenchantement est brutal, la narratrice emploie des mots assez durs et négatifs pour décrire son environnement, en total opposition à ce qu'elle a pu retrouver de chez elle à Kyoto.
Ce récit est très complexe, il y a une intertextualité assez dense où des textes classiques s'entremêlent à des ouvrages historiques ou à de la littérature moderne japonaise. Kyoto de Kawabata est souvent cité lors de sa balade dans la ville éponyme, La source aux fleurs de pêchers est elle évocatrice de ce lieu sur lequel le temps n'a pas d'emprise, vestige d'une civilisation passée, lieu qu'elle cherche à retrouver. La langue est belle, les références sont nombreuses mais n'empêchent en rien la lecture. Ses remarques, son style nous font voyager dans le temps et entre Kyoto et Taipei.
Un récit essentiel pour comprendre le déchirement qu'on pu ressentir certains Chinois issus des villages de garnison.