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Critique de colimasson


Nietzsche l'avait déjà écrit avant Emil Cioran : le christianisme est une religion de vaincus. Houellebecq le rappelle après Emil Cioran : le christianisme est une religion féminine. le premier construit sa réflexion sur une base philosophique, le dernier sur une base romanesque, et Cioran le devine et le communique à travers des aphorismes exigeants avec la pensée et l'honnêteté émotionnelle.


Nietzsche critique, Houellebecq constate, Cioran s'enivre. Quand bien même le christianisme ne serait qu'une religion de vaincus dominée par la molle énergie féminine, faudrait-il s'en détourner pour autant ? La question ne se pose pas pour Cioran qui a toujours été attiré par les limites où la pensée croît jusqu'à s'effondrer à nouveau sur elle-même.


Le christianisme est le refuge des larmes, « critère de la vérité dans le monde des sentiments », « disposition […] qui s'exprime par une avalanche intérieure », pour lesquelles on compte des « initiés […] qui n'ont jamais pleuré effectivement ». Dans le processus d'effondrement vital, la religion permet de franchir une étape supérieure par rapport à la philosophie. Là où le philosophe se ratatine, le saint moisit, car « il y a quelque chose de pourri dans l'idée de Dieu ! » et Dieu deviendrait le fardeau que l'humanité doit se traîner depuis sa sortie de l'Eden. Mais c'est peut-être aussi son espoir de rédemption : « Celui qui ne pense pas à Dieu demeure étranger à lui-même. Car l'unique voie de connaissance de soi passe par Dieu, et l'Histoire universelle n'est qu'une description des formes qu'Il a prises ». Il s'agit donc de déceler les recoins les plus inattendus dans lesquels se loge la pensée éthérée du saint chrétien. Mieux encore, il s'agit de retrouver l'universelle angoisse humaine qui se dissimule derrière différentes apparences : « Il n'est pas besoin d'être chrétien pour trembler devant le Jugement. le christianisme n'a fait qu'exploiter une crainte afin d'en tirer un profit maximum pour une divinité sans scrupules qui a fait de la terreur son alliée ».


On ne peut pas dire que ce recueil d'aphorismes soit semblable à ceux publiés auparavant par Cioran. Celui-ci semble avoir été achevé par la méthode extatique. Il y a des aphorismes d'une pureté intouchable, des enivrements que seule l'idée de Dieu peut avoir engendrés, et un amour qui ne choisit jamais entre la solitude ou l'univers, le dégoût ou la passion.


BEST-OF :


"Un philosophe se sauve de la médiocrité seulement par le scepticisme ou par la mystique, ces deux façons de désespérer de la connaissance."


« Je méprise le chrétien parce qu'il est capable d'aimer ses semblables de près. Pour redécouvrir l'homme il me faudrait le Sahara. »


« Tout est frivole –y compris l'Ultime. Une fois arrivé là, on a honte de toute interrogation capitale. »


« Je n'ai jamais rencontré personne, je n'ai fait que trébucher sur des ombres simiesques. »


« Vous êtes-vous regardé dans le miroir lorsque entre vous et la mort plus rien ne s'interpose ? Avez-vous interrogé vos yeux ? Avez-vous compris alors que vous ne pouvez pas mourir ? Les pupilles dilatées par la terreur vaincue sont plus impassibles que des pyramides. Une certitude naît alors de leur immobilité, une certitude étrange et tonique dans son mystère lapidaire : tu ne peux pas mourir. »

Lien : http://colimasson.blogspot.f..
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