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Critique de Antoine_Libraire


c'est un livre puissant que je vous présente aujourd'hui.

Déjà, regardez cette magnifique couverture. Les éditions Inculte savent mettre en valeur leurs livres.

Je l'avoue humblement, « hors du charnier natal » est le premier livre de Claro que je lis, malgré la production de l'auteur, qui n'en est pas à son coup d'essai.

Sans le savoir, j'avais lu des traductions du monsieur, notamment « waiting period » de Hubert Selby Jr. Mais aucun de ces livres à lui. Est-ce qu'une traduction est une oeuvre aussi ? Je serais tenté de dire oui, mais ne m'étant jamais frotté à l'exercice (pour cause, je ne parle aucune autre langue), je me garde de l'affirmer.

« Hors du charnier natal » est un livre qui secoue. Premièrement parce qu'il se distingue très largement de la production habituelle de livre présente sur mes tables de libraire.

Ensuite parce que, quelque soit le livre que l'on croit ouvrir, nous sommes percuté par une écriture exigeante et poétique qui nous entraîne ailleurs.

Pas de carte pour guider dans les contrés subtilement parcourues par l'auteur. Se laisser glisser, pas grand-chose d'autre à faire. Ou plutôt si. Car le livre exige du lecteur. Sans que celui ci sache bien quoi.

Sans repère, sans sol stable sous les pieds, au bord du cratère qui, on le sent, n'en a pas fini avec des prétentions éruptives.

Biographie, fiction, auto-fiction, essai littéraire, introspection ??? Les clés du langage, comme autant de manière de forcer les serrures de la littérature. le narrateur nous entraîne à une vitesse folle derrière Nicolaï Mikloukho-Maklai, ethnologue (l'est il seulement, lui qui ne finit aucune étude?), qui se perd en Nouvelle-Guinée, devenant divinité pour une tribu perplexe. Mais l'anthropophage n'est pas le « sauvage ». le narrateur seul éventre et écorche son sujet.

Mais de quel sujet s'agit il au juste. Cet ethnologue disparu, l'auteur lui même ? L'écriture ?

Le narrateur n'a de cesse durant le voyage de s'en prendre à lui même, au fait même d'écrire, moquant les « facilités » (les guillemets doivent en faire partie) qu'il s'autorise pour mieux s'en prendre à elles.

Et c'est un duel à trois qui se déplie (Deleuze, es tu là?) entre l'auteur, son sujet et l'écriture qui les maintient, contrains, en lien. L'autofiction prend le pas sur la biographie, puis inversement.

Clairement, je n'ai pas capté toutes les références présentes dans le livre, et si certaines me sont apparues, je suis bien conscient d'en avoir loupé plein.

« Hors du charnier natal » est le livre le plus compliqué que j'ai eu à chroniquer depuis la naissance de ce blog. J'ai aimé. Mais le verbe aimer est inadéquat.

J'y ai retrouvé ce qui m'avait bousculé chez William S. Burroughs, ce décorticage de la langue, la démonstration que la littérature peut être plus qu'un récit. La langue y est malaxée, la poésie y est âpre et revêche.

« Un livre ! J'aurais juré autrefois que cet objet pouvait passer, ombre aidant, pour un piédestal. Mais c'est là bien entendu une vision tout juste digne d'un benêt. Un livre n'est rien de plus qu'une trappe, située quelque part en soi. C'est aujourd'hui Nikolaï que j'y jette, mais il n'est pas sûr que ce soit lui qui s'y brisera les reins. »

Pour moi, une vrai découverte. J'ai hâte de relire Claro.
Lien : https://bonnesfeuillesetmauv..
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