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Critique de AtelierdeClaire


Autant l'avouer d'emblée : cette lecture a été une déception.
J'en attendais sans doute trop, ou en tout cas autre chose pour cette première approche de J. Coe. Toujours est-il que ce texte m'a vraiment déroutée et laissée bien perplexe quant au message qu'a pu vouloir y transmettre son auteur (dont c'est toutefois le premier roman, et donc peut-être pas le meilleur).

« Per ardua ad astra » (C'est en traversant les difficultés que l'on atteint les étoiles) : telle était la devise du lycée de Maria, jeune femme que l'on suit durant une quinzaine d'années, depuis la Terminale jusqu'à sa vie d'adulte.
Si Maria a bien traversé nombre de difficultés, force est de constater qu'elle n'a jamais atteint le firmament… Était-ce de sa faute ou celle du hasard ou du manque de chance ??
Difficile d'en juger.

Toujours est-il que Maria était une jeune femme très singulière, dotée d'une personnalité hors normes. Excessivement froide, réservée, renfermée, silencieuse, passive, volontairement isolée socialement, elle ne manifestait jamais aucune émotion ni aucun sentiment, quelques soient les circonstances.
Face aux nombreux et malencontreux hasards qui ont croisé sa route, elle est restée d'une passivité insupportable, ne faisant rien pour réagir ni éviter quoique ce soit. Jamais elle n'a saisi la moindre opportunité au rebond. Elle a toujours attendu ou subi… sans se battre.

Si l'objectif de Jonathan Coe était de brosser le portrait d'une anti-héroïne, il a parfaitement réussi sa mission, beaucoup trop bien même, à mon goût ! Car le côté dépressif, peu combattif et fade de Maria ne m'a arraché presqu'aucune pitié ni empathie. Elle était antipathique pour son entourage, et elle l'a été pour moi, qui n'ai pas réussi à m'y attacher ni à entrer dans son monde.
Elle dégageait une telle force d'inertie que j'ai tout au plus ressenti la furieuse envie de la secouer régulièrement… avec en parallèle, celle d'abandonner ma lecture.

Car je n'ai trouvé presqu'aucun plaisir à suivre la vie de Maria, qui d'ailleurs n'en trouvait elle-même aucun, puisqu'elle n'avait aucune ambition, aucune passion, rien qui l'animait.
Maria avait fait le vide autour d'elle, le vide dans sa vie, et malgré cet aspect pathétique et d'une tristesse absolue, je n'ai eu aucune compassion.

En cherchant désespérément un sens à ce texte ultra déprimant ( que de surcroît, je n'ai pas lu au mieux de ma forme), j'en ai conclu qu'il tentait de nous amener à réfléchir sur le bonheur, pas celui que l'on pense trouver couramment, superficiellement, mais le vrai bonheur, profond, puissant et intime. Celui peut-être auquel on n'accède en réalité jamais, sauf en espérance ou en souvenirs… comme Maria.

C'est donc aussi sans doute un roman sur la solitude, l'introversion, la dépression et les souffrances qui peuvent en découler. On y aborde également brièvement des thématiques fortes, telles que le harcèlement (scolaire, sexuel ou au travail), les violences conjugales, le déracinement familial, l'importance des liens familiaux. Mais malheureusement, ces sujets ont cruellement manqué de développement à mon goût, alors qu'ils auraient pu apporter du corps, de l'intensité, et l'émotion que j'ai cherchée en vain tout au long du récit.

Quelques passages caustiques ou humoristiques (cf. pages 123-124 au sujet du journal féminin, un des rares moments réellement savoureux de ma lecture !) et un dernier tiers du roman un peu moins « mou » n'ont pas suffi à combler mon intérêt.

Ce texte présente certainement de nombreuses qualités qui m'ont échappé, et je le regrette… Une chose est sûre, je vous le déconseille si vous traversez une phase un peu morose !!

J'ai d'ailleurs eu le sentiment que l'auteur lui-même s'était ennuyé à relater cette histoire morne et lugubre et qu'il avait fini par prendre son héroïne en détestation ! Je m'interroge encore sur l'objectif qu'il a poursuivi : pur exercice de style ? Défi personnel un tantinet masochiste ??

Et, si l'écriture n'est pas désagréable, ce ne sont pas les interjections récurrentes auprès des lecteurs, ni l'introspection régulière quant à sa propre prose qui m'auront permis de m'immerger dans son récit, bien au contraire. Même si je dois saluer la prouesse d'avoir écrit un roman entier doté presqu'exclusivement de personnages antipathiques ou dotés de travers conséquents, voire flirtant avec l'univers psychiatrique.

Au bout du compte, comment accéder au bonheur, si on y est volontairement hermétique, si on ne tente pas de forcer le destin ni de se projeter dans des perspectives de vie, si on reste inexorablement passif et indifférent à tout ?? Peut-on alors toujours parler de hasard et de malchance ? Quelle est la part de responsabilité personnelle dans ce cas ?

Voilà les interrogations de fond que soulève ce roman et qui en font finalement tout l'intérêt à mes yeux. La fin ouverte nous laisse avec bien des incertitudes, mais toutefois quelques pistes de réflexions intéressantes.

- CHALLENGE SOLIDAIRE 2022
- CHALLENGE ABC 2022-2023
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