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Critique de Fandol


Dès le départ, j'ai pensé à l'excellent livre de Jean Echenoz, Courir, mais, après quelques foulées et quelques pages, j'ai plongé complètement dans cette course mythique qu'est le marathon, tentant de m'accrocher au rythme efficace d'Abebe Bikila qui court pieds nus ! C'est là que Sylvain Coher se détache complètement du roman cité plus haut car lui se consacre entièrement à une course alors que Jean Echenoz balayait la vie du grand champion Émile Zátopek, présent d'ailleurs à Rome, ce samedi 10 septembre 1960.

Quelle performance littéraire réussie par cet écrivain que je découvre pour l'occasion ! Il m'a emmené dans la foulée aérienne du berger éthiopien, caporal de l'armée du Négus, pendant quarante-deux kilomètres et cent-quatre-vingt-quinze mètres, au cours de ce marathon historique qui voit Abebe Bikila déjouer tous les pronostics et battre le record de Zátopek tout naturellement.
Il court, il pense, il réfléchit. Une Petite Voix s'impose à lui régulièrement et cite Hérodote, Philostrate, Nietzsche et même Dieu ou la Bible car, apparemment, Bikila est très croyant. Sa jeune épouse, Yewebder, qui l'a encouragé à partir contre l'avis de sa mère, est constamment dans ses pensées. D'ailleurs, elle doit écouter la retransmission de la course à la radio achetée juste avant le départ pour Rome.
Justement, la radio revient régulièrement avec des problèmes de liaison fréquents à l'époque mais elle réussit à distiller certaines informations précieuses. Ici, c'est Radio Inter et Loys van Lee, vu souvent à la télévision quelques années plus tard, est l'envoyé spécial pour ces XVIIe Jeux Olympiques de Rome. Sylvain Coher offre même un intermède avec le jeu des 1 000 Francs !
Je n'oublie pas Onni Niskanen, l'entraîneur suédois, si proche de Bikila que celui-ci appelle souvent papa. En plus du côté sportif, physique de l'athlète, course d'endurance, superbement analysé, décortiqué, j'ai beaucoup apprécié le versant politique de ce roman qui met si bien en évidence l'affirmation des pays africains face à leurs colonisateurs.
L'oeuvre néfaste de Mussolini et tout le mal causé au peuple éthiopien sont balayés par ce petit homme, soldat au coeur incroyable, généreux et entraîné à courir depuis sa plus tendre enfance. Symbole inestimable, après tout ce passé difficile : un jeune Éthiopien surprend tous les favoris et franchit en vainqueur la ligne d'arrivée du marathon, l'épreuve ultime et ô combien marquante de l'olympisme, en passant sous l'arc de Constantin, devant le Colisée.
Enfin, je note aussi quelques petits coups de griffe à Pierre de Coubertin et c'est justifié car sa misogynie et son racisme ne font plus aucun doute, comme ses déclarations ou écrits en attestent.
Lire Vaincre à Rome est un véritable plaisir, jouissif même par moments, tellement ce roman est riche et remarquablement écrit. Je précise enfin que, quatre ans plus tard, aux JO de Tokyo (1964), Abebe Bikila remportera son second marathon olympique mais en portant maintenant des chaussures…

Roman découvert dans le cadre des Explorateurs de la rentrée littéraire 2019 de Lecteurs.com et article à la une du site en ce moment.


Lien : http://notre-jardin-des-livr..
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